Et voilà qu’arrive Pales, avec un premier EP, In Our Hands ! 5 titres à peine, une grosse demi-heure qui brûle et déchire (presque) tout et suffit à vous filer une patate grosse comme ça. Au point qu’une écoute laisse un peu sur sa faim et qu’il en faut bien une seconde pour être rassasié et profiter pleinement de ce que Pales nous propose.
À quoi est-ce que ça tient ? Deux guitares, une basse et une batterie, une voix, rien que ça. Du grand classique – on ne peut être qu’émerveillé de voir que ça marche encore. Et ça marche que parce que Pales sait se servir de ces instruments. Des ingrédients simples, mélangés avec une bonne dose de talent et auxquels on peut ajouter un supplément d’énergie et un éclectisme qui confine à l’éparpillement – le groupe se revendique du post-punk et évoque des influences qui vont de Beyoncé à Nirvana, en passant par Autolux, Janis Joplin et Texas… Rien que ça. Tout ça ! Mais ces influences sont digérées, moulinées. On sort de l’écoute de l’album emballé, enchanté, enthousiasmé même parfois.
Un premier morceau instrumental, qui commence avec un rythme simple martelé à la batterie, avant que les guitares n’arrivent et la basse, avec leurs gros sabots, leur son lourd et massif. C’est fort, puissant, massif. C’est simple, martial, plutôt lent, très mélodique, assez sobre mais extrêmement efficace. Nothing, mais on évitera les plaisanteries faciles, pousse déjà les aiguilles vers le rouge. Une ambiance assez sombre – elle reste assez sombre sur l’ensemble de l’album pour tout dire. On se dit à ce moment-là que le groupe est déjà très bon. Mais ça, c’était avant ! Avant d’avoir écouté les morceaux suivants, sur lesquels Célia chante… et elle chante très bien. Une vraie voix, lisse et franche, sans affectation, profonde avec des inflexions chaudes qui donnent aux morceaux une autre dimension. Célia chante bien quand elle chante, parce qu’elle éructe aussi, crie, monte dans les tons sans dérailler. Et comme Pales semble être un groupe intelligent, ils ont compris qu’il fallait que la musique respecte la voix, et lui permette de s’exprimer dans son registre.
https://www.youtube.com/watch?v=Ct8dxIU9DjM
Sailor, Trippy Season et Beat it sont dans la même veine que Nothing avec cette voix en plus. Une énergie folle. Un rythme effréné pour des morceaux qui foncent comme des malades. L’intro de Sailor est superbe. À donner des fourmis dans les jambes. Impossible de résister. Et le morceau continue de sautiller dans tous les sens animé par des guitares qui tricotent en se répondant l’une à l’autre. Et la voix qui monte dans les aigus, descend dans les graves pour accompagner le rythme. Le résultat est frénétique. Comme l’est le morceau d’après, Trippy Season. Pourtant le début est plus calme. Nerveux, agile, rapide mais loin de l’énervement qui pointe à la fin de Sailor. Plus de changements de rythmes aussi, de respirations, qui préparent à une fin où les instruments se déchaînent. Presque 2 minutes de quasi-transe. Irrésistible. Comme Beat It, riff de guitare, basse et batterie qui enchaînent. Le morceau est proche de la rapidité de Trippy Season que du déchaînement de Sailor ou de Nothing. Mais Beat It change de rythme plusieurs fois… il faut dire que le morceau dure presque 12 minutes, et laisse voir les capacités de Pales à jouer dans plusieurs registres. Et on a le temps de déguster tout ce qui fait Pales. Avant que l’album ne termine avec quelque chose d’autre… un morceau qui cache son énergie et sa force derrière une lenteur presque langoureuse. La voix s’envole comme si le groupe était à la proue du Titanic !
Le post-punk… cet espèce de genre musical un peu mal défini (au sens strict, tout ce qui vient après le punk n’est-il pas postérieur au punk?), facilement fourre-tout, dont on ne sait plus trop s’il existe encore mais auquel pas mal de groupes se raccrochent encore.
Alain Marciano