White Lung – Premonition : un final en beauté pour un groupe énorme

C’est la fin pour le trio de Vancouver. Un des meilleurs groupes (punk) de ces dernières années tire sa révérence après cinq albums énormes, explosifs, furieux, puissants, véhéments. Premonition ne déroge pas à la règle. A écouter et réécouter sans fin !

White-Lung

Enfin ! Enfin… Voici qu’arrive un nouvel album de White Lung. 6 ans après Paradise (2016). 6 ans, alors que jusqu’ici le groupe avait sorti un album tous les 2 ans depuis 2010 et leur déjà excellent It’s the Evil. Certes, il y a de bonnes raisons qui explique le délai – le groupe allait enregistrer quand Mish Barber-Way (la chanteuse) a réalisé qu’elle était enceinte… Il n’empêche, on se languissait, franchement. Un groupe faisant d’aussi bonnes chansons emballées dans d’aussi belles pochettes…

WhiteLung-2022D’autant que Paradise avait clairement montré une évolution. Le groupe avait mis plus de pop dans son punk rock enflammé et flamboyant. Et avait réussi à rester flamboyant. Des morceaux étaient toujours aussi rapides, enlevés, portés par la batterie hyper-sonique d’Anne-Marie Vassiliou (à faire pâlir d’envie Paganini lui-même), la guitare aussi tranchante qu’un couteau de boucher Kenneth William mais des mélodies encore plus mélodieuses auxquelles Mish Barber-Way donnait une vraie puissance. Un album plutôt plus pop que les précédents. Un bel album mais différent.

Décevant ? Difficile d’oser parler de déception (même si quand même…) surtout après avoir lu le commentaire étonné et sans appel de Mish Barber-Way : « There’s this stupid attitude that only punks have where it’s uncool to become a better song writer. In no other musical genre are your fans going to drop you when you start progressing. » Évidemment. Le groupe progressait et montrait qu’il savait écrire et jouer des morceaux moins punks !

Mais White Lung n’avait jamais été un groupe ne sachant pas écrire des chansons. Même leurs brûlots les plus punks gardaient une puissance mélodique incroyable ! Donc, après 6 ans et un virage amorcé, on était impatient de voir si le groupe allait pousser dans cette direction. Pourtant, avant même d’écouter l’album, on apprend que ce cinquième album est aussi l’ultime album du group. Ultime, comme dans dernier ? Comme dans fini, terminé ? Il semblerait bien : Premonition « is the last album we’ll be getting from one of the best bands to ever do it ». Pas besoin de traduire, on comprend, oui. La question devient encore plus importante. Qu’elle est la dernière impression que va White Lung ?

Qu’est-ce que vous croyiez ? Bonne, évidemment. Oui, White Lung est un des meilleurs groupes de punk de ces 15 dernières années. Une bombe. Alors, oui, Premonition est dans la lignée de Paradise. Mais Premonition est aussi dans la lignée des précédents. Pop, parce que certains morceaux sont moins speedés que sur les trois premiers albums du groupe – les indispensables It’s the Evil, Sorry et Deep Fantasyun des 40 plus grands albums de punk de tous les temps selon Rolling Stones ! Il y a même un morceau plutôt lent, Under Glass. Mais on ne leur en voudra pas, on ne jouera pas au fan de punk stupide et bas du front. On se laissera charmer par cette capacité à faire de la musique pour tout le monde, une belle mélodie, qui permet à la voix de Mish Barber-Way de s’exprimer pleinement. Mais ce Under Glass est la seule respiration de l’album ! Le seul moment de « détente ». L’album, comme ses glorieux prédécesseurs, est un concentré de puissance, de dynamisme, de rythme. On retrouve ce qui fait la force du groupe : cette guitare en riffs ou en solos omniprésente ; cette batterie hyper rapide, ultra régulière, complètement furieuse – comme sur… sur tous les morceaux en fait ! Il y a une homogénéité dans les morceaux du groupe qui finit par devenir hypnotique. Que l’on ne puisse rien distinguer de rien, qu’on ne puisse pas dire autre chose que « de vraies mélodies chantées à plein poumons, des rythmes féroces et furieux, haletants, et addictifs » est une vraie qualité.

On ne sait pas s’il y a un morceau meilleur que les autres. On passe Hysteric, le premier morceau, son intro en forme de déluge sonore et ses 2’52 de fureur bruyante en se disant que la barre est déjà mise très haute. Mais arrive Date Night, 2’54, et on en reprend pour son grade – même si cette fois, le côté pop de Paradise est plus présent. Ouf. On respire, le temps de passer à Tomorrow, et ça continue… En fait, ça dure une grosse demi-heure, 10 morceaux. Certains sont plus pop que d’autres. D’autres sont bien plus punk – Hysteric, Girl, Winter. D’autres sont au milieu. Mais cela fait quand même une grosse demi-heure de hurlements entrecoupés de riffs de guitare assassins et portés par une batterie déchaînée. Ce qui fait dix morceaux extraordinaires, qu’on écoute et réécoute sans fin. Une grosse demi-heure de furie diabolique, d’énergie pure. Un rythme effréné. Un feu d’artifice.

Au final, l’impression reste la même : White Lung est/a été/restera l’un des meilleurs groupes de ces 15 dernières années.

Alain Marciano

White Lung – Premonition
Label : Domino Recording
Date de sortie : 2  décembre 2022