Philippe Jaenada s’est plongé dans le dossier d’une récente affaire criminelle qui a vu la condamnation d’Alain Laprie à 15 ans de prison pour le meurtre de sa vieille tante. Une fois encore, l’écrivain va démontrer dans un récit passionnant à quel point l’enquête a été bâclée.
Après la sortie du livre Au printemps des monstres, auquel il avait consacré plusieurs années, Philippe Jaenada avait décidé de ne plus se lancer dans une telle entreprise avant longtemps, préférant faire une pause avec ces récits d’affaires judiciaires, plus ou moins célèbres, qui ont fait sa renommée au cours des dernières années. Mais voilà, un jour, un ami libraire du côté de Bordeaux, lui parle d’Alain Laprie, un homme condamné à 15 ans de prison pour le meurtre de sa vieille tante, Marie Cescon, en 2004. Avant d’être incarcéré après un procès en appel perdu, Jaenada a pris le temps de rencontrer cet homme, de parler avec lui, puis avec sa femme et son fils, pour estimer que finalement il n’en avait pas fini avec les affaires judiciaires bâclées, et que l’affaire Alain Laprie méritait d’être examinée sous un jour nouveau.
Voilà donc notre Jaenada parti pour relire entre les lignes d’un copieux dossier d’instruction pour tenter de comprendre pourquoi cet homme, Alain Laprie, s’est retrouvé condamné, alors que beaucoup d’éléments du dossier semblaient peu convaincants, bourré de déclarations douteuses, de conclusions hâtives, d’expertises peu concluantes. Bref, un dossier sans véritable preuve et encore moins d’aveu.
Comme pour ses précédents récits (Sulac, La petite femelle, La serpe, Au printemps des monstres), Jaenada reprend les choses par le commencement, posant les faits, présentant les personnages, et au fil du livre, avançant, mettant en lumière les incohérences du dossier.
Jaenada, s’interroge. Jaenada suppute, Jaenada ne comprend pas comment, une fois encore, les gendarmes et la justice ont pu bâcler un dossier comme celui-ci avec une instruction menée à charge. Et, comme pour ses précédents livres, la démonstration de l’écrivain est plutôt convaincante, décortiquant avec minutie et l’ironie qu’on lui connait, les invraisemblances du dossier de cette sinistre affaire, affaire de famille où l’on a tué pour l’argent.
Écrit dans l’urgence, sans les digressions dont il nous gratifie généralement, – on ne parle pas de lui, de son cholestérol, ni de ses rapports avec son médecin – , l’écrivain a choisi d’aller à l’essentiel, pour s’attacher uniquement aux faits. Car le temps presse, et pour cause, un homme que tout semble innocenter croupit en prison ; et à moins qu’un élément permettre de rouvrir l’enquête, Alain Laprie, âgé de 66 ans, risque de passer encore quelques longues années en détention.
Benoit RICHARD