[France TV] Vortex : effet papillon sur le Finistère

Et on aura fini l’année 2022 en la compagnie improbable d’un flic de Brest, dans un polar de SF mélodramatique de France 2 recyclant l’Effet Papillon avec une indéniable habileté. Rien de génial, mais rien de honteux non plus dans ce Vortex bien plaisant.

Vortex
Anaïs Parello et Tomer Sisley
Photo – Copyright Julien Cauvin

S’il y a un nom au générique de Vortex, la nouvelle série policière matinée de SF de France 2, qui rassure, c’est celui de Franck Thilliez, crédité comme responsable de l’idée de départ : même si, évidemment, la réussite d’un bon thriller dépend avant tout de la qualité de l’écriture scénaristique, avec Thilliez, on a à peu près la garantie d’un sujet original, voire décoiffant. Mais il faut aussi admettre que le script de Vortex, que l’on doit à Camille Couasse, tient relativement bien la route : il fonctionne sur une dynamique de polar scandinave classique, alignant au fil des épisodes divers suspects crédibles, de manière certes systématique, mais raisonnablement divertissante pour le téléspectateur (même si, pour tout habitué aux intrigues policières, il est relativement aisé de deviner tôt dans la série l’identité du coupable…).

Vortex afficheLe héros de Vortex, Ludovic Béguin, policier acharné, voire obsessionnel, perd Mélanie, sa jeune épouse, peu de temps après la naissance de leur fille, dans une chute accidentelle d’une falaise au cours d’un jogging matinal. 27 ans plus tard, en 2025, alors qu’une technologie de réalité virtuelle permet aux enquêteurs de s’immerger dans une scène de crime, Ludovic – qui a refait sa vie et a une nouvelle famille – enquête sur un meurtre ayant eu lieu sur la même plage où le corps de Mélanie a été retrouvé. Par un phénomène inexpliqué et inexplicable – qualifié de « vortex » -, mais bien commode pour l’intrigue, Ludovic va entrer en contact avec Mélanie, en 1998, quelques jours avant sa mort, et essayer d’empêcher celle-ci. Mais c’est sans compter avec « l’effet papillon » qui, à chaque tentative de modifier le passé, remodèle le présent de manière plus ou moins radicale.

Si la référence à l’Effet Papillon, le film de 2004, sur un sujet similaire, est assumée par Vortex, et cité tel quel par les protagonistes, c’est que le véritable intérêt de la série n’est pas cette fameuse enquête policière sur un serial killer laissant une bague au doigt de ses victimes, mais bel et bien l’excitation que génèrent ces altérations du flux temporel, et le plaisir – ou l’angoisse – de découvrir à chaque fois ce qui a changé dans le présent… Et en particulier l’impact de l’enquête conduite en parallèle par Ludovic et Mélanie (elle est elle-même juge) sur la vie sentimentale et conjugale de Ludovic, sur sa nouvelle épouse, sur ses enfants. Car Vortex, plus qu’un thriller – un peu ordinaire, on l’a dit – est avant tout un joli mélodrame, qui nous régale de plusieurs scènes réellement touchantes, pour peu qu’on oublie un instant son cynisme de téléspectateur blasé.

Si le vieillissement – ou le rajeunissement -, réalisé numériquement, des acteurs que l’on voit alternativement en 1998 et 2025, est un peu trop minimal pour être crédible, Tomer Sisley, toujours charmeur, et Zineb Triki, qui dégage le même charme entêtant que dans le Bureau des Légendes, font bien leur boulot, tandis que le reste de la distribution est un peu plus fragile, une faiblesse malheureusement classique dans les séries TV françaises.

Le travail du réalisateur de télévision Slimane-Baptiste Berhoun est un peu trop lisse pour qu’on en pense quoi que ce soit. On nous dit aussi que Vortex est la première œuvre française utilisant la nouvelle technologie du « Volume », mais on est loin des effets fascinants que l’on pouvait admirer dans 1899, et on se demande donc pourquoi ne pas avoir tourné tout simplement sur une plage bretonne. Car on appréciera l’implantation clairement assumée de Vortex à Brest et dans ses environs – qui nous change plaisamment de Paris… Quant à ceux que la défaite de la France en finale la Coupe du Monde aura frustrés, ils auront le plaisir de revivre la victoire de 1998 !

Et on se dira à la fin de ces 6 épisodes plutôt bien troussés, que cette dernière minisérie de 2022, sans être une grande réussite, n’a rien de honteux…

Eric Debarnot

Vortex
Minisérie TV française de Camille Couasse
Avec : Tomer Sisley, Camille Claris, Zineb Trikik, Eric Pucheu
Genre : policier, SF, mélodrame
6 épisodes de 55 minutes mis en ligne (France 2) le 26 décembre 2022