Alors que l’année 2023 de concerts n’a pas encore passé la seconde, quoi de mieux en un samedi soir froid et pluvieux que d’aller suer un bon coup dans le sous-sol de l’International ? Et prendre une fois encore le pouls du Rock français, qui nous semble péter la santé !
L’ajout de EggS, un groupe dont nous avons grandement apprécié le premier album, à l’affiche de la release party du nouveau disque des Lyonnais d’AVIONS, a rendu cette soirée à l’International à peu près incontournable, en une période de début d’année assez peu fertile en sensations musicales. Et puis, alors que Paris frissonne sous une pluie hivernale qui ne semble pas vouloir s’arrêter, quoi de mieux pour un samedi soir qu’une bonne triple décharge d’électricité ?
20 h : « On va jouer du rock, désolé ! » Pas de problème, on est là pour ça ! Le quatuor de Montreuil Normcore nous assène 40 minutes de bonne musique, à la fois mélodieuse et musclée, portée par deux guitares volubiles et un bassiste qui fait le spectacle en dépit de l’étroitesse de la scène. Les compositions, dès la première écoute, sont accrocheuses, on pourrait pinailler en disant que les vocaux, partagés entre les trois frontmen, sont parfois incertains.
Les deux derniers titres (dont leur presque classique Buddy Bud), accueillis par des cris de joie par les fans, sont particulièrement convaincants. Bref, un bon groupe dont on attendra le premier LP, en cours de réalisation. Tiens, on aurait aimé entendre leur reprise du True Love Will Find You in the End de Daniel Johnston, on n’a pas autant d’occasion que ça d’entendre jouer les chansons du génie de Sacramento…
21 h 05 : on se demande un peu comment toute la troupe de EggS – 7 musiciens et musiciennes – pourra tenir sur la petite scène de l’International. Mais finalement, ça passe, même si Camille, la saxophoniste, est quasi invisible en retrait sur le côté gauche. Invisible mais très audible, son saxo jouant un rôle clé dans la musique du groupe. Plus original et plus puissant sur scène que sur album, ce qui est toujours un bon signe, EggS jouent une musique lyrique, emportée même, très séduisante par sa fougue et sa manière de faire sonner, voire carillonner les guitares (il y en a quatre à la fois sur certains morceaux), mais aussi par sa force émotionnelle. La combinaison voix masculine (Charles Daneau est un vrai chanteur, chose qui manque régulièrement dans le Rock français, on le répète malheureusement trop souvent…) et voix féminine (Margaux) très haute, fonctionne à merveille. Pour ceux qui voudraient des références, disons qu’on est du côté du Dunedin Sound, mais revisité avec l’esprit de collectif des débuts d’Arcade Fire. Et c’est très beau. Gros final sur deux titres qui ne figurent pas sur l’album A Glitter Year… 35 minutes seulement, un set trop court mais parfaitement efficace.
22 h : pas facile de suivre après EggS, mais AVIONS ont pour eux de vrais atouts, heureusement : une excellente technique acquise au long de dix ans d’existence et de pratique, et des chansons très énergiques, beaucoup plus proches de l’esprit punk original que leur nouvel album chez Howlin’ Banana ne le laissait entendre. Le batteur est particulièrement efficace et a une bonne voix, le bassiste met une ambiance fantastique, et le guitariste est très classe : bref, on ne s’ennuie pas une seconde, même si le groupe manque quand même de chansons réellement mémorables. On appréciera un nouveau morceau, Life’s a Riot, très Clash 78, et l’enchaînement de deux titres datant de 2017, Van Halen et Moms & Punks. Au bout de 40 minutes, on a l’impression de tourner un peu en rond, mais c’est à ce moment que le moshpit s’embrase. Et le chaos qui régnera pendant la fin du set fera qu’on se préoccupera plus de ne pas trop prendre de coups que des dernières chansons. Belle ambiance, indiscutablement !
Trois bons groupes, ce soir, dans des styles bien différents, pour une soirée qui, une fois encore, fait honneur au rock d’ici. Dommage que dehors, la pluie tombe désormais à torrents… Pas idéal après une grosse suée !
Texte et photos : Eric Debarnot