Le duo Baya Kasmi et Michel Leclerc propose avec Youssef Salem a du succès une nouvelle comédie débridée dont ils ont le secret, racontant les déboires familiaux d’un écrivain au succès inattendu. Un film tendre, sincère et intelligent.
Dans cette nouvelle comédie plutôt réussie, on retrouve le style si singulier du duo Baya Kasmi (Je Suis À Vous Tout De Suite) et Michel Leclerc, que l’on avait apprécié notamment dans Le nom des gens, en 2010, cette comédie débridée dans laquelle, une femme se tapait tous les mecs de droite pour les rallier à ses idées. Tout aussi original, Youssef Salem a du succès raconte les déboires familiaux d’un écrivain, auteur d’un roman à succès pour lequel il a puisé dans ses souvenirs d’enfance et s’est inspiré de sa famille. Pris au piège de cette reconnaissance inattendue et effrayé que ses parents puissent lire un jour son livre, Youssef Salem – incarné par un Ramzy Bedia qui vieillit très bien -, va devoir jouer serré et affronter les reproches de ses frères et sœurs.
Dans ce film, aussi drôle que subtil, Baya Kasmi parle de ces Français d’origine arabe qui connaissent un succès artistique, de l’étiquette et du rôle qui leur sont souvent accolés dans les médias quant à leurs origines ou leur culture, et ce qu’elles représentent dans leur œuvre, leur parcours. Le film parle aussi du rapport de l’écrivain avec sa famille, mettant en exergue la citation de Philippe Roth qui dit, en connaissance de cause : « quand un écrivain naît dans une famille, alors cette famille est foutue ».
Baya Kasmi filme tout ça avec beaucoup de tendresse et de générosité, montrant deux générations de maghrébins de France aux idéaux très différents, avec notamment le père (Abbes Zahmani) obnubilé par son désir d’intégration, avec ce besoin quasi obsessionnel d’écrire et de parler un français toujours impeccable.
On l’a dit, Ramzy Bedia fait le taf, jouant une sorte de personnage « à la Bacri », incarnant un musulman non pratiquant, alcoolique, mais aussi tendre, mélancolique, en proie au doute et atterré par la bêtise de ses congénères, et qui doit parvenir à briser les tabous et les non-dits au sein de sa propre famille. Ramzy forme un duo parfait avec une Noémie Lvovsky pleine d’énergie qui joue le rôle de son éditrice. Les seconds rôles ne sont pas oubliés et tiennent chacun une place importante dans l’histoire, notamment la sœur de Youssef Salem, incarnée par Melha Bedia, la véritable sœur de Ramzy, elle aussi épatante à chaque fois qu’elle apparait à l’écran.
Une comédie tendre, sincère, subtile, modeste et intelligente… bien trop rare dans le cinéma français !
Benoit RICHARD