D’origine polonaise, Ian Culbard revisite son enfance, le franchissement angoissant du rideau de fer pour retrouver son grand-père.
Le jeune Kaspar Salamandre dessine à l’école les aventures de son père sous-marinier. Quand ce dernier disparait en mer, hélas « pour de vrai », son monde intérieur s’effondre. Incapable de l’aider, sa mère le confie à son grand-père paternel.
La salamandre de la légende vit dans le feu et s’y baigne, elle ne meurt que s’il s’éteint. Si son père vivait dans l’eau, son grand-père semble vivre pour ses fleurs tandis que Kaspar découvrira qu’il vit, vous l’avez deviné, pour la bande dessinée.
L’univers de Salamandre a survécu à une guerre mondiale. Si la république de Montparnasse vit en paix dans un monde qui pourrait être le nôtre, l’Empire du Monolithe subit la férule d’un tyran moustachu qui interdit les arts, la lecture et les fleurs. Sa police politique est omniprésente et les récalcitrants disparaissent sans laisser de traces.
Ian Culbard pratique un dessin à la ligne étonnement claire. Ses aplats de couleurs sont légèrement ombrés et travaillés avec des reflets. Ses visages sont beaux et ses regards clairs. Des couleurs vives viennent égayer une atmosphère pesante. Les décors sont simplement posés, sans artifices. Présenté en annexe, le travail de recherche sur la couverture et surtout la magnifique couverture fleurie rappelle qu’il sait travailler plus en profondeur.
Dans la douleur, Kaspar va progressivement découvrir, qu’en restant prudent, il est possible de lutter. Discrètement, autour de lui, on danse en silence, on produit et on cache des œuvres d’arts, on se prépare pour la révolution qui viendra, un jour. Les personnages secondaires sont particulièrement bien écrits, le grand-père, la cousine, l’artiste peintre et les deux policiers. Salamandre est une très belle histoire de résilience et de confiance en l’avenir.
Stéphane de Boysson