DIRK. – Idiot Paradise : le déjà-vu a du bon

DIRK. Tout est dans la typographie du nom : quatre Belges qui jouent fort, sans pause, le tout en une formule harmonieuse et concentrée.

DIRK.
© Camille Mortier

Son nom ne vous dit peut-être rien, mais du côté de nos voisins, DIRK. affiche complet à l’Ancienne Belgique de Bruxelles. C’est dire la côte de popularité exponentielle du quatuor belge qui entend bien franchir les frontières flamandes avec Idiot Paradise, troisième album dont les deux prédécesseurs étaient passés relativement inaperçus en France, mais qui promettaient déjà un bel avenir à ces quatre garçons intrépides.

DIRK.Avec Idiot Paradise, le groupe présente une troisième version d’un rock élaboré quelque part entre les années 90 et 2000 pour en retirer une étiquette grunge tout droit sortie du garage où toi et tes potes avez essayé de devenir les futurs Sum 41. DIRK. ne prend pas vraiment de détours, et fonce droit au but, misant sur des harmonies impétueuses taillées par des guitares saillantes.

Ne pas être en quête de virtuosité ou de textes savants : ici sont servis sur un plateau tournant une bonne dose de riffs chargés et de rythmes uptempo, et à vrai dire c’est plutôt savoureux, si l’on accepte d’emprunter, pour une fois, un sentier battu. On l’aura compris avec ce préambule, DIRK. ne révolutionne pas les codes, mais sait habilement user d’une formule dont on connait déjà les effets. La nostalgie est de mise sur ce troisième album, mais pas de celle qui vous fait déprimer la tête sur la vitre, non, plutôt de cette nostalgie qui donne envie de ressortir les disques de son adolescence et se remémorer ses années lycéennes, à la fois furieuses et innocentes.

Vous doutez encore, de peur de vous retrouver avec un fac-similé de Weezer, ce rock stéréotypé, un peu facile, de celui qui ne vieillit pas forcément bien, mais pour controversée que soit la référence aux Américains mentionnés ci-dessus, elle est pertinente quant à la chaleur renvoyée par le disque qu’on a entre les mains. Du reste, on évitera de trop assimiler DIRK. à un groupe qu’il paraît être devenu conventionnel de détester, car on ne voudrait pas desservir la belle énergie convoquée par le quatuor sur ce troisième album.

De toute manière, pas de retour en arrière possible une fois entamé Half-Life, premier morceau de l’album. On a parlé de sentiers battus, oui, mais personne n’a parlé d’une balade, et DIRK. ne veulent pas que l’on s’installe confortablement. « You’re not wise, you’re depressing » : eh bien, c’est dit. Pas d’ésotérisme ni de faux-semblants dans les paroles de Jelle Denturck, mais le timbre de sa voix, spontané et un peu criard sur No, se marie bien avec deux guitares qui s’associent à merveille pour diriger des harmonies qu’il faut reconnaître très attractives.

DIRK. ne laisse jamais vraiment de répit : même Are You Awake, à l’introduction plus pondérée, se transforme en invective dont le sarcasme, souligné par la dissonance des cordes, séduit nos oreilles. Mais c’est peut-être le titre éponyme, Idiot Paradise, et sa ritournelle indie rock, qui nous fait tomber sous le charme de ce groupe à l’attitude à la fois candide et hardie. Les riffs staccato du titre Help I’m Going Sane sont remarquablement entraînants, et on se laisse à penser que la voix du chanteur poussée dans ses retranchements sur la fin incarne en quelque sorte ce cri de l’adolescent furieux contre la terre entière. C’est cependant Afraid To Go Home qui reflète le mieux cette fougue juvénile, et pourrait tout-à-fait constituer la bande-son d’un teen movie des années 2000, mais rien de mal à cela, surtout quand les guitares sont à ce point accrocheuses. C’est enfin la belle escalade rythmique et harmonique d’Alarms vient mettre un point à 32 minutes d’un jeu non pas innovant, mais authentique et surtout communicatif.

32 minutes, il n’en fallait pas plus, au risque de trouver à redire à cette formule dont il ne faut pas abuser. Mais ici les quatre Belges savent ce qu’ils font, et nous offrent un condensé bien ficelé, une ode à la légèreté et à l’innocence, portée par des compositions mordantes et attractives. A écouter sans prise de tête.

Marion des Forts

DIRK. – Idiot Paradise
Label : Mayway Records
Date de sortie : 3 mars 2023