En adaptant en bande dessinée le journal de guerre d’André Hébert, Nicolas Otero, nous plonge dans un monde violent et impitoyable et nous rappelle que la guerre est à nos portes.
André Hébert est un militant révolutionnaire de 24 ans qui souffre de l’atonie de la vie politique française. Il découvre sur sa télévision l’existence d’une révolution prometteuse au Kurdistan, jadis initiée par Abdullah Öcalan, et aujourd’hui menacée par l’avancée triomphale de Daech. Ces marxistes ont bâti un État non reconnu par la communauté internationale, le Rojava, qui, au cœur d’un Moyen Orient compliqué, se veut un État laïque prônant confédéralisme démocratique, socialisme et féminisme radical. André prend contact par Facebook, puis, après un vol Paris / Istanbul / Bagdad, s’engage dans les Unités de protection du peuple (en kurde : YPG), la branche armée du Parti de l’union démocratique kurde en Syrie.
Après une rapide, mais sérieuse formation, André est envoyé au front avec d’autres volontaires internationaux. Il est affecté au déminage, puis au maniement d’armes lourdes. Son récit est bien construit, même si le scénario est peut-être un peu trop sage. La guerre est faite d’attentes interminables. Il s’ennuie, travaille la langue kurde et refait le monde entre deux assauts. Sans surprise, les djihadistes se révèrent impitoyables et multiplient les attentats suicides et les assassinats. Bénéficiant de l’appui, hélas très ponctuel, des Occidentaux qui tiennent à ménager la susceptibilité de leur allié turc, les Kurdes répliquent avec une courageuse retenue. Ils avancent et mettent le siège sur la ville Raqqa, la capitale de l’État islamique, pour un ultime combat.
Très documenté, le dessin réaliste et précis de Nicolas Otero rappelle certaines planches du jeune William Vance. Il nous immerge dans un pays dévasté. On y meurt beaucoup, que ce soit sous les obus, les tirs de sniper ou sous les bombes « amies », de tragiques erreurs de visées. La guerre n’est pas un jeu. Après deux séjours éprouvants, André est revenu en France et a repris une vie « normale ». Son Journal a été publié par les éditions Les Belles Lettres.
Stéphane de Boysson