Brièvement cultes en France au début des années 1990, The House of Love passaient par la capitale à l’occasion d’une tournée hexagonale. Pour un retour satisfaisant mais faisant en partie regretter l’absence de leur guitariste d’origine.
A l’instar de l’enfant terrible mancunien, lui aussi ne s’était pas produit sur scène dans l’hexagone depuis longtemps. Depuis très longtemps même, la reformation de 2003 n’ayant pas occasionné de concert en France jusqu’à cette année. Et le bougon Guy Chadwick semblait heureux. Il a même fait sourire le public en le remerciant d’être venu dans le contexte agité actuel… et en ajoutant que le monde entier pensait à la France. L’agitation sociale n’était d’ailleurs pas le seul élément perturbateur de ce retour à guichets fermés de The House of Love : pour cause de fermeture de La Maroquinerie, le concert avait été déplacé au Café de la Danse.
Mais rembobinons un peu. Royaume-Uni, fin des années 1980. Les Smiths viennent de se séparer. Alan McGee n’avait pas encore changé la face du rock indépendant anglais en découvrant Oasis. Son label Creation était déjà cependant une vraie pépinière de talents. Dont The House of Love, au nom hommage à Anaïs Nin, au leader/auteur-compositeur aussi cynique que talentueux (Guy Chadwick), au guitariste mêlant saturation et ligne claire (Terry Bickers) et à la raideur rythmique évoquant le Velvet Underground. Avec quelques singles culte et un premier album éponyme coup d’essai/coup de maître, le groupe devient un des chouchous de la presse musicale anglaise. Qui, en ces temps où elle envoyait un groupe de rock indépendant britannique au cimetière juste une heure après en avoir fait les prochains Beatles, passa très vite à autre chose : Madchester et le Shoegaze. Un petit culte français prit brièvement le relais avec le second album de 1990, toujours éponyme et surnommé « le papillon ». Donner des titres à ses albums ne portera ensuite pas bonheur à Chadwick, ceci coïncidant avec le début du déclin artistique.
Retour au Café de la Danse. Le public du concert, assez âgé, était probablement composé majoritairement de fans de rock indépendant se souvenant du bref « quart d’heure de célébrité » hexagonal du groupe. Et par « quart d’heure de célébrité » on entend bonnes critiques de la spécialisée et play back chez Ardisson. Public qui fit preuve d’un « enthousiasme retenu » : ni public anesthésié du premier concert du Moz à Pleyel, ni agitation façon celui des Arctic Monkeys à Rock en Seine. Avec parfois des applaudissements en plein morceau (The Beatles and the Stones). Et le groupe ? Contrairement aux deux précédents albums post-reformation, le line up du moyen dernier album (A State of Grace) n’incluait pas Terry Bickers. Il est cependant difficile de démêler ce qui déçoit dans l’exécution des classiques enragés des débuts (Christine, Shine on, Destroy the heart, I don’t know why I love you) : Keith Osborne pas à la hauteur même si loin d’être honteux à la six cordes ? Mixage de la guitare trop en retrait par rapport aux versions studios amoindrissant l’impact des morceaux ? Les partis pris conviendront mieux aux titres calmes des deux premiers albums, de Babe Rainbow et du dernier album. Au hasard à un Se Dest dont l’alternance couplets calmes sous perfusion jazzy/accélération au refrain fait toujours mouche.
Le groupe fera deux rappels. Une première série de quatre titres, avec entre autres un beau Fade Away interprété par Chadwick seul à la guitare électrique. Puis le poussif Melody Rose de son dernier album. Concert dans l’ensemble satisfaisant en dépit de la déception concernant les classiques du groupe.
Texte : Ordell Robbie
Photos : Robert Gil