En mélangeant polar et comédie (sans tomber dans la caricature), Jonathan Barré réussit avec son Bonne Conduite à nous faire rire non pas de ses personnages, mais avec eux…
Après le gros flop des Vedettes, Jonathan Barré revient pour un film qui n’est pas exactement estampillé comme « du Palmashow », même si les deux comparses y participent : Bonne conduite se présente comme une comédie policière, dans laquelle une psychologue spécialisée dans la prévention routière se met en tête d’assassiner les chauffards récalcitrants.
Le mélange des tons est assumé dès l’ouverture, qui lorgne du côté de Drive, un petit défi de mise en scène pour Barré qui s’astreint à filmer une course poursuite dans la campagne, dans une obscurité qui pourrait paralyser toute la dynamique : le genre, en filigrane, s’invitera autant dans les scènes d’action que leur pendant grotesque, notamment dans le portrait de la protagoniste (Laure Calamy qui se fait visiblement plaisir), qui oscille entre blessures sincères et personnage qu’on croirait sorti de Red is dead. Mais le film se distingue en ce qu’il ne s’engouffre pas dans les facilités paresseuses de la parodie : si les personnages jouent volontiers de la caricature, notamment dans la galerie de beaufs confondant virilité et immaturité, Barré poursuit un ton qui avait déjà rendu singulier l’approche des Vedettes : celui d’un regard très sincère et en empathie avec ses personnages. Le séducteur maladroit incarnée par Thomas VDB ou le duo de flics du Palmashow synthétise parfaitement cette approche, qui consiste à rire avec plutôt que contre des caractères.
Le film tresse ainsi avec le cahier des charges parfois un peu atone du polar (et de certains développements assez dispensables, dont l’intervention des cousins vengeurs), les trouvailles comiques (les photos du mari défunt dans tous les lieux de vie de la veuve, sa tentative de se débarrasser de la voiture, les délires du flic sur le blockbuster, la camionnette de l’Écailler du cinéma) et la tendresse pour des personnages qui parviennent à se rendre véritablement attachants. Pour ce faire, rien de tel que le duo entre Grégoire Ludig et David Marsais, dont la complicité irrigue chaque vanne, et crée une alchimie qui ponctue habilement le récit alterné.
Espérons que le trio saura garder cette patte sur ses prochains projets, sans que la frilosité du public ne les décourage.
Sergent Pepper