Fantasy, le nouvel album de M83 évoque un voyage rétrofuturiste presque réussi, mais qui n’évite que partiellement l’emphase.
Avec la fin de Daft Punk, M83 monte sur le podium des groupes français qui cartonnent aux Usa, aux côtés de Phoenix et Gojira. Depuis 2008 avec Saturdays = Youth et surtout avec la sortie de Hurry up, We are Dreaming et son tube planétaire Midnight City (2011), M83 pérennise la French Touch version rock planant, reconnaissable par l’utilisation stupéfiante de synthétiseurs dont l’inspiration doit autant à la Kosmische Musik des 70’s qu’à la new wave 80’s et le shoegazing 90’s.
Sur ce neuvième album Fantasy, le musicien originaire d’Antibes Anthony Gonzalez collectionne donc les strates et les nappes tel un junky modulaire. On y croise des sons à la fois rétros et futuristes croisés chez Tangerine Dream, School of Seven Bells ou Fuck Buttons.
Le single Fantasy tient du miracle. Une chorale sacralise le titre dont le refrain funky-pop et les voix oniriques à la The Prefab Sprout fourmillent de clichées assumés, des flutes de pan et des cascades de breaks confirment l’encrage dans les années 80. Une jolie petite horreur qui se laisse écouter comme on goûterait aux soucoupes pétillantes. Convaincant, M83 l’est plus encore lorsque ses espaces sonores balisent la motorik.
Oceans Niagara offre un condensé de guitares vite rattrapées par les synthés en surnombres. La tête dans la galaxie, le thème gagne en finesse noisy-pop et trouve son apogée dans la montée finale. Tout comme Amnesia, qui se démarque par un riff de guitares aux accents new-wave encadré de chants aériens avant de s’égarer dans un tourbillon FM. Pas si éloigné, le beau Earth To Sea distille sa mélancolie, toujours à la limite de la surenchère sonore, ou l’on retrouve un peu de Supertramp gonflée aux harmonies et aux anabolisants pour une des réussites de l’album. Tout comme les instrumentaux planant que sont Water Deep et Sunny Boy Part 2, éloges à la lenteur qui doucement propulsent les sons de synthèse en éclaireurs. Zenitude dans cette collégiale sonore avec Radar Far Gone, Laura, Deceiver et Dismemberment Bureau qui doivent autant aux ballades de sitcom qu’à la musique prog.
Une basse plus lourde qu’à l’accoutumée sur Sunny Boy rappelle que M83 maitrise les ambiances, et particulièrement ici, ou une faille temporelle nous renvoie toujours dans ces années 80, visiblement formatrice pour Anthony Gonzalez. Kool Nuit ft Kaela résume parfaitement ce jeu d’équilibriste entre onirisme et rythmes autobahn, la voix de Kaela embaume la chanson, prend de la vitesse pour finir en jerk électrique revigorant.
Revenu du fond de la galaxie, M83 renoue avec des compositions mélodiques simples aux arrangements complexes qui ne rechignent en rien à la surenchère pindarique.
Mathieu Marmillot