Cette délicate quête métaphysique, d’une touchante tendresse, nous ramène avec douceur vers notre propre destinée. Nous mourons seuls, mais notre part d’enfance peut faire la différence et nous apporter la plus belle des consolations.
Dans une région isolée qui pourrait être la Corse ou l’Italie du sud, un vieil homme a choisi de s’installer dans un hameau désert pour y vivre ses derniers jours. Chaque soir sur la colline d’en face, une lumière apparaît soudainement. Est-ce le réverbère d’un autre hameau inhabité ? Mais qui donc pourrait vivre là-haut, dans les bois ? D’après les habitants du village le plus proche, des OVNIS ont été vus dans le coin. Dès lors, notre ermite n’aura pour seule obsession que de découvrir la vérité.
Dès les premières pages, ce récit nous embarque par son atmosphère mystérieuse. Sans rien déflorer de l’intrigue, on pourra dire que le vieux solitaire va accéder à une étrange dimension où le rêve se confond avec la réalité. Celui-ci est-il gagné par la sénilité ? Serait-il victime d’hallucinations ? Dans sa solitude, il suscite l’empathie du lecteur par son courage. Dans sa masure sans âge et sans électricité, où les murs craquent la nuit et semblent faire jaillir des fantômes, notre ermite affronte vaillamment sa fin qu’il sent proche, même si son regard révèle une sourde inquiétude. Mais surtout, ce mystère qui fait irruption au crépuscule de sa vie, il devra absolument l’élucider ! Sa quête finale le mènera vers des chemins à la fois déstabilisants, touchants et apaisants comme la pureté de l’enfance.
Adapté d’un roman d’Antonio Moresco, remarqué par la critique et couronné de plusieurs prix, La Petite Lumière à la sauce Panaccione est une réussite. Le co-auteur d’Un océan d’amour nous livre ici un récit intrigant et fluide que l’on dévore jusqu’au bout. Son trait déstructuré et un peu fragile traduit parfaitement la sensibilité du propos qui invite le lecteur à faire corps avec le vieil homme, lequel nous renvoie à notre propre fin dans sa quête ultime. Difficile de rester de glace devant la poésie de cette histoire intemporelle utilisant à bon escient la métaphore des saisons et magnifiquement restituée d’un point de vue visuel. Grégory Panaccione recourt à une palette restreinte où le vert (la nature est omniprésente ici) se mêle à des tonalités sombres où parfois on ne fait que deviner les silhouettes (avec de nombreuses scènes de nuit).
Si l’on accepte de se laisser porter par la poésie de l’ouvrage, sans chercher à avoir des réponses à toutes les questions qu’il suscite, on tombera facilement sous le charme de cette Petite Lumière, aussi fragile que puissante par sa capacité à nous habiter longtemps une fois le livre refermé. C’est souvent à cela que l’on reconnaît les œuvres de qualité et celle-ci se révèle en outre un vrai coup de cœur.
Laurent Proudhon