Désastre sans appel, la terrible série Black Knight démontre avant tout la stérilité de l’approche des cinématographies non américaines mise en place par Netflix. Une leçon, mais une leçon consternante.
Excités par le succès inattendu de l’excellente Squid Game, les actionnaires et le management financier de la société Netflix ont décidé d’investir massivement en Corée. Bien ! C’est logique, et rien à y redire quand, en tant que cinéphile, on sait bien que le cinéma coréen est l’un des plus stimulants et originaux du monde depuis… l’an 2000 (si l’on choisit la sortie du sublime le Chant de la Fidèle Chunhyang comme premier marqueur du génie local). Le problème est que les productions Netflix engendrées par cette stratégie varient, en étant gentil, de très moyen à totalement catastrophiques. Et surtout ne traduisent aucune des qualités que moindre K-drama le plus standard déploie. Il faudra bien essayer de comprendre la cause de ce désastre, mais pour le moment, concentrons-nous sur ce très mauvais Black Knight, et tentons de résumer ce qui cloche horriblement dans cette mini-série post-apocalyptique qui semblait avoir tout pour être intéressante.
On part donc d’un sujet à la mode, l’effondrement environnemental de la planète, et on y ajoute la voracité du capitalisme, la haine extrémiste des réfugiés, la création de zones réservées aux plus riches, et l’injection forcée à la population d’un vaccin inquiétant, pour faire bonne mesure. On investit un maximum d’argent dans les effets spéciaux, confiés à la société responsable de ceux de WestWorld, et on va tourner dans le Désert de Gobi pour représenter une Corée dévastée par la sécheresse. On emprunte le style à de solides canons du genre, comme Mad Max. On embauche une vedette charismatique (Kim Woo-Bin, beau, beau et… inexpressif à la fois) pour tenir le premier rôle de 5-8, le héros « transporteur » mutique et invincible. On explique bien aux scénaristes que la faiblesse de nombreuses séries modernes réside dans l’étirement de leurs histoires au long d’épisodes inutiles, et on leur demande de concentrer un maximum de péripéties en 6 épisodes de 50 minutes.
Pourquoi alors le téléspectateur se retrouve-t-il devant un résultat aussi laborieux, aussi… ennuyeux, au point que terminer le visionnage de cette série pourtant remplie d’action, de mystères et de péripéties, s’avère une véritable épreuve ? Tout simplement parce que tout est MAUVAIS dans Black Knight ! Le scénario est aussi inutilement compliqué que totalement invraisemblable (déjà, le principe de la livraison des doses d’oxygène à une population confinée par une caste de transporteurs d’élite est d’une débilité totale), ce qui nous conduit à nous désintéresser complètement de ce qui se passe au bout des 2 premiers épisodes. Ensuite les acteurs n’ont strictement rien à interpréter tant la totalité des personnages manque de substance, et on se moque donc de ce qui peut leur arriver. La mise en scène est inexistante, enfilant des plans qui ne sont qu’une suite de clichés et ne génèrent même pas un minimum d’excitation pavlovienne durant les très nombreuses scènes d’action. L’image et la photographie en général sont d’une laideur immonde, mais également tellement banales que l’on ne peut même pas qualifier le tout « d’effets de style ». Les effets spéciaux sont la plupart du temps tout juste convenables, au point où l’on peut se demander où est passé l’argent. Quant au « style coréen », ce fameux mélange déstabilisant de genres incompatibles et de poussées délirantes de violence et d’hystérie, il pointe aux abonnés absents. Black Knight s’apparente avant tout aux mauvaises séries Z états-uniennes. Point final.
Point final ? Non, car le pire est finalement, comme c’est souvent le cas dans les productions « populaires » US, le discours politique réactionnaire qui transparaît peu à peu derrière la modernité des thèmes : ici, la pollution est le résultat de la chute d’une météorite et non de l’activité humaine, et tout se rétablira par miracle sans que nul n’ait besoin de faire d’efforts. Les ravages du capitalisme sont l’effet des décisions d’un seul homme, un fou dangereux que même son père désavouera, et c’est bien sûr le pouvoir politique et l’armée qui rétabliront l’ordre. Si l’on ajoute que les fameux réfugiés opprimés et finalement réhabilités sont bel et bien des Coréens bon teint et non pas des étrangers immigrés, et que, bien entendu, le vaccin obligatoire est un plan diabolique pour décimer la population, il est difficile de contrôler la nausée qui nous envahit.
Un message final aux responsables culturels du pays du matin calme : le cinéma coréen est devenu l’un des meilleurs du monde en restreignant l’accès des salles nationales aux blockbusters US, il est urgent de bouter Netflix hors de Corée pour préserver la qualité de la série télévisée coréenne !
Eric Debarnot
c’est une excellente série ! invraisemblable oui et alors ?
nous savons que les korean drama ont souvent 16 épisodes mais pas black night. on a eu l’impression qu’ils étaient pressés de finir la série où qu’ils n’ont pas eu le temps de la finir. en plus on dirait qu’ils ont eu peur d’oser en faire de trop. ils n’ont pas voulu faire dans le Blow out their mind