On était passé, en juin dernier, à côté de Indie Rock, malgré son titre parfaitement clair quant à son contenu, le dernier album de Th Da Freak. On a profité de cette période de vacances pour rattraper le retard, et on revient sur cette réussite épatante…
Depuis la mini bombe (de plaisir) dans le Rock français que fut la parution en 2019 de l’album Freakenstein, paradigme d’indie rock tendance slacker, comme on l’avait qualifié à l’époque, on suit avec passion la carrière de Th Da Freak, au fil de concerts régulièrement ébouriffants et d’albums dont de plus en plus soignés, comme Coyote, qui pouvait passer pour « le disque de la maturité ». Et puis en juin, six mois plus tard seulement, Thoineau Palis nous a offert cet Indie Rock, présenté par son auteur comme une sorte de projet parallèle, moins travaillé que l’officiel Coyote. Et avouons-le, toujours emballés par le raffinement du dernier disque, nous sommes passés à côté de ce disque-là, forcément (?) secondaire. Mal nous en a pris, car, à y jeter négligemment une oreille, nous en sommes restés estomaqués !
Dès Feel Animal, Young Bro et I Was Around, le trio de titres ouvrant ce bien nommé Indie Rock, nous sommes littéralement transportés par les mélodies qui paraissent terriblement simples mais sont surtout parfaitement évidentes, qui nous sont offertes sur une orchestration joliment branlante, totalement en adéquation avec le propos de Th Da Freak : rappeler, reconnaître que les sources de leur musique est cet indie rock, mi grunge, mi lo-fi, millésimé années 90, mais prendre note que les temps ont changé, nous ont changé. Reproduire le miracle de Freakenstein, qui est d’actualiser les codes de cette musique aimée, mais à travers une sorte de relecture « ligne claire » – entendez épurée, rendue plus lisible – du genre.
Serie A s’ouvre sur une guitare acoustique désaccordée, avant que la rythmique saccadée et le chant nous fassent proprement décoller sur ce morceau qui est le plus excitant de l’album, et qui devrait générer de beaux pogos dans les salles de concert surchauffées. Somewhere, s’ouvrant sur une électronique chaloupée, montre avec ses vocaux idylliques que l’univers surf des Beach Boys ne perd rien à se confronter aux vagues de l’Aquitaine. Say Say fait à nouveau péter les guitares, sur lequel le chant rêveur de Thoineau crée un effet shoegaze garanti. Keep It est une belle parenthèse enchantée de dream pop, avant que le long Flies – sans doute le morceau le plus « chargé » du disque – change de registre, basculant dans une sorte d’angoisse existentielle paradoxalement enivrante, avec sa mélodie faussement joyeuse, son rythme martelé et son crescendo final qui fera forcément un gros effet en live.
Naked nous rassérène avec sa dream pop chatoyante, mais Thoineau préfère les montagnes russes : après un silence d’une dizaine de secondes, le riff dépouillé, le chant d’abord plaintif, puis les cris de Let Me See The Sun déchirent notre béatitude. Encore un grand titre en dépit (ou à cause…) de sa simplicité, intense celui-ci, peut-être parce qu’il ressemble à une improvisation en studio plus qu’à une chanson soigneusement écrite. A Drummy Alley Straight To Indie Rock Land referme Indie Rock en une accélération jouissive, une sorte d’envol quasi extatique vers la satisfaction que peut apporter la musique. Que peut apporter l’avenir… un avenir qui sera définitivement brillant pour Th Da Freak !
Eric Debarnot