Et on en est arrivé au quatrième album de Royal Blood, ex-nouvelle merveille du rock britannique, qui peine à se renouveler et affronte l’ire du public anglais : leur ouverture (partielle) à la tradition pop locale n’est pas encore convaincante…
On connaît la propension de la presse Outre-Manche à célébrer chaque mois la naissance de nouveaux sauveurs du Rock Anglais, bien mal en point depuis plus d’une décennie alors que la créativité musicale semble s’être déportée vers le vieux continent, vers l’Australie, la Nouvelle-Zélande ou le Canada. La dernière fois qu’il y avait eu une sorte d’unanimité en la matière, c’était il y a juste 10 ans, pour célébrer l’apparition du duo de Royal Blood, fans des White Stripes, mais aussi de QOTSA (ça s’entendait, surtout dans le chant de Mike Kerr) et de Blues Rock bien hard. Comme avec les Arctic Monkeys à leur époque, on prédisait un nouveau départ du « rock à guitare », un retour au Rock de la jeunesse fan de hip hop et « d’urban music », comme on dit là-bas : un mouvement imaginé par les journalistes qui a fait long feu, même si Royal Blood ont de fait, et malgré leur manque d’originalité patent, rencontré un beau succès, plaçant leurs albums en tête des charts britanniques. Et remplissant, même chez nous, des salles de taille conséquente.
Ce qui ne les a pas empêchés de se trouver démunis quand est arrivé le moment du troisième album – traditionnellement celui de « la maturité » – sur lequel ils on clamé leur nouvel intérêt pour les musiques de danse, sans nous convaincre outre mesure… D’où la nécessité de revoir leur copie avec ce Back to the Water Below, nouvel album où l’on fait machine arrière, en revenant aux bases solides des débuts, tout en s’intéressant cette fois à la riche tradition pop anglaise, disons le courant Beatles revisité par les Arctic Monkeys ? Est-ce là la solution pour retrouver ce second souffle qui se fait attendre ?
Back To The Weather Below est donc d’abord copieusement rempli de ces titres puissants, aux riffs efficaces, emblématiques du groupe, où la basse sonne comme une guitare 6 cordes – on peut trouver ça amusant, mais bon… – et où une batterie solide supporte le tout sans problème : Mountains At Midnight, en intro, prouve que le duo se replie confortablement sur ses positions traditionnelles. Triggers nous emporte efficacement grâce à un rythme plus soutenu. Tell Me When It’s Too Late représente une sorte d’apogée du genre, mais le problème de Royal Blood, ce qui les a toujours empêché de parvenir au niveau de leurs modèles, reste la relative banalité de leurs compositions : peu de mélodies mémorables, aucun riff qui puisse réellement devenir légendaire (dans un genre finalement proche, on est en droit de trouver les compositions de leurs cousins belges de Black Box Revelation bien supérieures !).
L’autre composante de cet album particulièrement soigné, il faut l’admettre, est donc constitué de tentatives d’intégrer l’héritage pop anglais, avec les Arctic Monkeys comme modèle. Le problème est qu’avec des titres pompeux comme There Goes My Cool, on est plus proche des mauvais penchants d’un Muse ! On appréciera quand même – en dépit, répétons-le de structures mélodiques assez ordinaires – un Pull Me Through touchant, un Firing Line qui est peut-être bien l’une des producttions les plus complexes et réussies de Royal Blood à date, et la conclusion d’un Waves au texte peut-être prophétique (« But where would I go? What would I take? / If you ever find me falling away / Don’t let me choke, like I’m nothing to save » – Mais où irais-je ? Que devrais-je prendre ? / Si jamais tu me trouves en train de m’effondrer / Ne me laisse pas m’étouffer, comme si je ne valais pas la peine d’être sauvé).
Car rappelons le problème supplémentaire qu’affrontent en ce moment Royal Blood dans leur pays, la fronde – abondamment relayée sur les réseaux sociaux, où l’affaire est devenue virale et où ils sont devenus sujets de moquerie – d’un public jeune n’appréciant pas du tout leur attitude de « rock stars » arrogantes à l’ancienne (un incident ayant eu lieu au cours du Radio 1’s Big Weekend festival à Dundee !). Il n’est pas certain que dans ce contexte délicat, ce quatrième album, semblant hésiter sur le direction à prendre par le groupe, soit aussi chaudement accueilli qu’il pourrait le mériter.
Une histoire à suivre…
Eric Debarnot
En tant que fan de Death From Above 1979, je n’ai jamais tout à fait compris l’engouement de la presse anglaise à l’époque du premier album. L’effet que cela me faisait était un peu celui d’une basse-cour devant un canif.
J’ai écouté, retenu quelques singles sympathiques (la chanson-titre du deuxième album me plait encore beaucoup), j’ai apprécié la participation de Mike Kerr aux dernières Desert Sessions, mais je suis globalement resté très en dehors du buzz autour de ce groupe. Ce n’est peut-être tout simplement pas pour moi.
Oui, je trouve en effet difficile de vraiment s’enthousiasmer devant ce groupe.