Attention les oreilles, les furieux de Frankie and the Witch Fingers reviennent nous assommer de leur funk-hard-prog-rock jouissif. 42 minutes à une vitesse supersonique. Mais, ce qui ne gâche rien car c’est suffisamment riche et intelligent pour que ce soit très agréable à écouter. Quasiment sans modération !
Commençons avec un avertissement : ce Data Doom devrait ne pas surprendre celles et ceux qui ont écouté un ou plusieurs des albums de Frankie and the Witch Fingers ou qui les auraient vu en concert ! Il représente parfaitement ce que sait faire le groupe. D’ailleurs, pour en parler, on pourrait sans hésiter reprendre ce qu’en a dit Eric D. dans ses chroniques des concerts du Bataclan, en 2019, en première partie des Oh Sees), au Supersonic en 2022 ou au Folk Blues Festival de Binic en 2023… des « maîtres de l’extrémisme » qui jouent « toujours plus fort, toujours plus rapide, toujours plus hystérique », « décidé(s) à repousser les limites humaines de la violence musicale » ou qui exercent une forme de « terrorisme sonore », qui jouent une musique d’une « brutalité sans égale, d’une frénésie insensée » ! Ceci décrit non seulement la manière dont FATWF joue en concert mais aussi sur disque. C’est peut-être encore plus vrai pour cet album. Ne vous attendez pas à une minute de répit, elle n’arrivera pas (presque pas, et quand cela arrive, ce ne sera que pour quelques secondes). 9 morceaux, même pas 45 minutes, une explosion sonore, une avalanche, une éruption digne des plus cataclysmes…
Cela commence avec les premiers riffs de Empire, 1 minute 45 de guitares en fusion qui vous dégoulinent dessus, une véritable coulée de lave sonique, un morceau qui commence quasiment comme du hard-rock des années 1970. Et puis l’ambiance change, mais pas le niveau sonore, pas le niveau d’énergie et de puissance, on se retrouve dans un morceau de funk, de musique africaine, la rythmique prend (presque) la main sur le morceau, basse et batterie qui jouent à une vitesse incroyable des rythmes d’une complexité incroyable. « Presque » la main parce que les guitares sont toujours là, à se glisser dans les interstices, solos et riffs assassins… ébouriffant, épuisant, excitant… Et, pour rendre la sauce un peu plus épaisse, le groupe ajoute des éléments empruntés au rock progressif (toujours des années 1970). Fantastique, vraiment. Hallucinant, hallucinatoire. Mais attention, cette musique n’est pas que cela, pas que violence et énergie, puissance et force. Il y a aussi une vraie mélodie chantée, comme de juste, un peu aussi à perdre haleine et avec pas mal d’échos, qui est parfaitement addictive et qui reste dans la tête bien longtemps après que le morceau soit terminé.
Enfin, pas vraiment, parce que Burn me Down arrive, exactement sur le même modèle que le premier (peut-être un peu plus hard, et un peu moins funk), et puis Electricide et Syster System (un des meilleurs morceaux de l’album, avec son accélération frénétique qui vient secouer les rythmes syncopés et heurtés qui portent le morceau)… Et cela continue. Certains morceaux sont plus rock, d’autres plus funk, peut-être, mais tous sont construits sur le même modèle, suivent la même logique. Sur chaque morceau, on retrouve une basse puissante, une batterie syncopée aux rythmes complexes, des riffs et des solos de guitare brutaux et violents, et des mélodies extrêmement mélodies. Même quand le morceau semble plus funky et moins violent, cela finit par s’emballer (et dégénérer) – comme sur Doom Boom, ou encore Futurephobic ou Political Cannibalism , qui commencent de manière peut être plus calme, mais qui finissent dans un délire absolu de sons. Et on adore, forcément. Même quand cela dépasse les 6 (Syster System) voire les 7 (Empire) minutes, au contraire quand les morceaux s’étirent, le groupe est encore meilleur. Comme si l’idée de mélanger toujours plus d’instruments, et de changer de rythmes souvent, les galvanisaient !
Alain Marciano