Bien qu’en partie difficile à suivre, L’Arbre aux papillons d’or révèle un jeune auteur asiatique aux influences bien digérées nommé Pham Thien An.
Avec L’Arbre aux papillons d’or, Pham Thien An a décroché cette année la Caméra d’or à Cannes. Prix dont l’appellation est parfaitement synchrone des qualités de ce premier film, qui se situe formellement plusieurs divisions au-dessus de, au hasard, la Palme d’or de cette cuvée cannoise 2023. Le cinéaste n’apporte rien de neuf sous le soleil du cinéma asiatique abonné aux grands festivals. Mais ses influences sont bien digérées. Cadre large surplombant ses personnages comme Jia Zhang-ke, photographie évoquant Mark Lee Ping-bing (aka le chef op’ attitré des HHH contemporains), goût de la durée et travail sur le hors champ, suggestion de la présence des morts par le son évoquant Weerasethakul, quelques plans séquences évoquant Bi Gan.
On pourrait même dire que la mise en scène est, avec les dialogues questionnant la foi catholique de son personnage principal, un élément rendant limpides les tenants et aboutissants d’un récit pas totalement lisible. Difficulté de lisibilité dont témoignent quelques claquements de sièges en séance (et à Cannes aussi d’après certains témoignages). Un nom de personnage lancé à la cantonade plusieurs dizaines de minutes avant que le film n’explique qui il est par exemple. On pourrait même conseiller la lecture du résumé avant.
Ce que ça raconte ? Sa belle-sœur étant morte dans un accident de moto à Saïgon, Thien doit ramener son corps dans son village natal. Il ramène au passage son neveu Dao, qui a survécu par miracle (divin ?) à l’accident. Ce qui donnera une jolie scène sur la transmission de la mort à un enfant. Thien va se mettre à la recherche de son frère disparu pour lui remettre Dao. Un retour en forme de voyage au milieu des fantômes, des ombres du passé pas très loin dans l’esprit du Bi Gan d’Un Grand Voyage vers la nuit. Avec une scène entre Thien et son ex à la lisière du fantastique. Et l’ombre des fantômes, de la difficulté d’être en paix avec les morts accompagnant des discussions sur l’immortalité de l’âme, comme un ping pong entre le religieux et le surnaturel.
L’Arbre aux papillons d’or a peut-être enfin quelques séquences trop longues ou au contenu trop nébuleux. Mais il révèle un tempérament de cinéaste, chose désormais plus rare du côté de l’Asie qu’il y a quelques années.