Depuis dix ans déjà, La Revue dessinée aborde l’info sous un angle original, en alliant journalisme d’investigation et neuvième art, avec un soin éditorial qui ne s’est jamais démenti. Happy birthday !
Fort de son succès, l’éditeur publie un numéro anniversaire, où l’on retrouve des enquêtes « à rebours du flux d’informations en continu », ainsi que les rubriques culturelles habituelles : cinéma (« La Revue des cinés »), musique (« Face B »), celle, toujours instructive et subtile du dessinateur James, sur l’origine des expressions de notre si belle langue (« La sémantique c’est élastique ») et le fameux zoom sur une photo célèbre (« Instantané »). Et pour les plus sportifs, la rubrique « Mi-temps », qui expose un aspect particulier d’une discipline sportive.
Il suffit de feuilleter un numéro quel qu’il soit pour saisir la passion et le professionnalisme qui animent les équipes d’une publication pionnière et fière de son indépendance, garantie sans pub. Depuis 2013, la revue trimestrielle aura vu la participation de « près de 300 signatures » et noué quelques projets avec des éditeurs tels que Médiapart, Delcourt, Seuil, le site Disclose ou encore la chaîne Arte. Plusieurs hors-séries sont déjà parus, dont Benzine s’est souvent fait l’écho, notamment Algues vertes de Inès Léraud et Pierre van Hove et plus récemment Capital et Idéologie, de Benjamin Adam et Claire Alet, d’après le livre de Thomas Piketty. Et depuis l’an dernier, une petite sœur italienne (La Revue dessinée Italia) a même vu le jour, preuve s’il en fallait du dynamisme du projet…
Les enquêtes sont sérieuses mais jamais plombantes, grâce à la patte graphique d’auteurs professionnels bien en phase avec le propos, elles évoquent les grands sujets d’une actualité pas toujours heureuse (c’est tout simplement notre monde tel qu’il est…) mais le font avec un soin analytique salutaire, en mettant le doigt là où ça fait mal. Victime de blacklisting voire de menaces de la part du lobby agro-industriel en terre bretonne, Inès Léraud en sait quelque chose. D’ailleurs, cette dernière, qui n’a pas froid aux yeux, persiste et signe, étant conviée dans ce numéro anniversaire à dresser un état des lieux de la liberté d’information en France. Pas brillant comme on peut s’en douter, puisqu’un rapport situe la France à la 24e place mondiale en la matière.
Parmi les autres sujets abordés dans cette 41e parution, un reportage en Une qui montre que la situation dans les prisons françaises est loin de s’améliorer, avec une violence endémique « qui contamine tout le monde », ainsi qu’une enquête sur les fameuses espèces « envahissantes » qui tente de dédramatiser cette nouvelle psychose environnementale pas toujours justifiée. Plus inquiétant, le thème de la surveillance au travail à travers les logiciels espions, une pratique sournoise qui s’est accentuée avec le télétravail et pourrait concerner bon nombre de salariés. Enfin, un constat désolant sur la mise aux normes énergétiques du parc immobilier français, que le double langage des instances gouvernementales cherche à enjoliver.
Essayer La Revue dessinée, c’est l’adopter ! On a donc envie de lui souhaiter longue vie, avec dix belles années supplémentaires d’information de qualité mais aussi d’émerveillements graphiques, parce que oui, c’est aussi ça La Revue dessinée ! Et le meilleur moyen de soutenir un si belle initiative, c’est encore de s’y abonner.
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