S’attaquant à l’un des sujets les plus difficiles de notre époque, l’irréconciliable conflit entre ceux qui s’engagent pour la cause environnementale et ceux qui peinent à survivre économiquement, Nakache et Toledano nous livrent un film trop tiède. Mais heureusement, très drôle.
Une année difficile s’ouvre sur une idée simple mais formidable, que nous ne spoilerons pas, et qui illustre parfaitement le concept « politique » d’une année « difficile »… et comment on passe peu à peu à une « vie difficile », qui aurait été un titre parfait pour le nouveau film de Toledano et Nakache. Une vie difficile, comme celle d’Albert (Pio Marmaï, parfait) et celle de Bruno (Jonathan Cohen, tout aussi parfait), tous deux surendettés et au bord du gouffre… Jusqu’à ce que le hasard les mette au contact d’une bande de bobos écolos activistes, en lesquels ils voient la possibilité de tirer quelques avantages financiers. Mais, bien sûr, rien ne se passera comme prévu…
Inspirés par la théorie optimiste, partagée pendant le confinement, que le monde serait différent une fois la crise du Covid terminée, Nakache et Toledano ont écrit leur film le plus politique, potentiellement le plus audacieux : il s’agit ni plus ni moins de sourire des activistes écolos dont les actions ne servent à rien, mais de reconnaître qu’ils ont pourtant totalement raison face à l’inertie générale. Et de pointer la folie planétaire de la surconsommation, qui ruine la planète mais aussi la structure sociale et l’équilibre mental de tous. Plein de belles idées, justes et tout, mais qui, en soit ne font pas un film. La vraie intelligence du scénario, c’est de rappeler qu’on ne peut guère se préoccuper de l’avenir, même si c’est celui de la planète et de ses enfants, quand on arrive à peine à survivre à chaque journée du présent. Et là, une année difficile touche juste, et peut même mettre mal à l’aise, en dépit de l’inévitable recherche d’un film qui soit suffisamment consensuel pour rester une véritable comédie populaire.
Ce sujet est même potentiellement trop ambitieux pour un film grand public, et Toledano et Nakache ménagent la chèvre et le chou, flanchent avant d’atteindre la virulence folle de la grande comédie italienne des années 60-70 qu’ils prennent pour modèle. Ils choisissent la tiédeur, l’échappatoire facile de la rom com, qui ne fonctionne qu’à moitié parce qu’ils n’ont pas écrit un rôle réellement convaincant pour la pourtant talentueuse Noémie Merlant. Et ils finissent par bâcler leurs intrigues, avec une dernière partie mal écrite, illogique, frustrante parce que les conflits sont abandonnés sans résolution réelle. Heureusement, et on soupçonne d’ailleurs que ce soit là à la fois l’origine de l’idée du film et sa destination prévue, une année difficile se clôt sur une superbe idée, presque poétique, qui rachète in extremis les maladresses scénaristique qui ont précédé.
Il reste que ce que tout le monde retiendra probablement de une année difficile, c’est son efficacité comique – il s’agit du film le plus drôle du tandem depuis Intouchables -, qui est avant tout le résultat de l’énergie et du sens du timing de Marmaï et de Cohen, sans oublier le toujours formidable Mathieu Amalric. Et finalement, si la planète n’est pas sauvée, eh bien, voir une comédie française ambitieuse, bienveillante, qui n’est jamais vulgaire, qui nous parle de nous, de nos difficultés quotidiennes et de nos angoisses, et qui plus est, est bien filmée, bien mise en scène, et assortie d’une BO proprement jouissive (Chic, les Doors, Bowie, etc.), c’est en soi un vrai petit miracle.
Eric Debarnot
tu as oublié de citer Brel ;-)
ça t’étonne ? :)
non pas vraiment puisque c’est français ;-)… mais quand même, Monsieur Brel…