Secrètement, notre monde est envahi. Laissez-vous initier par Nicolas Kéramidas à la découverte de ces vaisseaux extra-terrestres qui ont mystérieusement atterri sur les murs de nos cités.
Depuis Le Dîner de cons, j’avoue une tendresse certaine pour les originaux en général et les collectionneurs en particulier. Nicolas Kéramidas collectionne les flashs de mosaïques murales de vaisseaux extraterrestres. Sur les 4 000 connus, il en a accumulé pas moins de 1951, un score très honorable qui lui permet d’émarger à la 368e place de la course rassemblant les 300 000 chasseurs enregistrés.
L’histoire débute en 1978, dans un temps lointain, une éternité, Tomohiro Nishikado crée le Space Invaders. De belliqueux vaisseaux extraterrestres débarquent en force, les joueurs sont invités à les repousser. Ce jeu vidéo révolutionnaire sera très vite adapté sur borne d’arcade. Le succès est mondial. Bien plus tard, en 1996, alors que jeu initial a été oublié, un graphiste et mosaïste français entreprend de poser sur des murs extérieurs, au cœur des villes, sans autorisation, de petits vaisseaux pixelisés. En 2016, soit 20 ans plus tard, il crée l’application qui permet de les flasher. Les réseaux sociaux vont se saisir l’affaire. Associant street-art et quête ludique, la chasse est lancée.
À l’image du célèbre Banksy, le mystérieux Invader a su préserver son anonymat. De nuit, il dépose ses créations aussi bien dans des lieux touristiques que dans des emplacements plus populaires, voire inaccessibles. Pour corser l’affaire, ses mosaïques sont régulièrement détruites par des grincheux ou dérobées par des collectionneurs. Avec l’accord du maître, des groupes de passionnés se sont formés afin de les « réactiver ».
Présenté sous la forme d’un carnet brut, qui aurait pu être croqué et rédigé au jour le jour, l’ouvrage est épais, dense et colorisé avec talent. Formé à l’école Disney, les personnages de Kéramidas sont très expressifs et souvent drôles.
Avec un solide second degré et une sincérité désarmante, Kéramidas nous raconte sa découverte des « SI » (les Space Invaders), puis ses expéditions à travers l’Europe. Le geek avoué s’est pris au jeu. Objectivement accro aux « SI », il cherche à nous y initier, à nous transmettre sa passion. S’il a échoué à y entrainer sa famille, plusieurs fois par an, il invite des copains, plus ou moins complices, à la chasse aux extraterrestres. Ces « flash-tours » associent camaraderie et effort physique, initiation à la culture locale et découverte de sa gastronomie. Que de la joie ! Nous assure-t-il. Vous voilà initiés, à vous de jouer !
Stéphane de Boysson