Depuis deux décennies qu’ils nous rappellent régulièrement qu’ils sont l’un des groupes en activité les plus importants de notre siècle, nous avons du mal à ne pas nous précipiter chaque fois que les hommes de Homme sont en ville. Et une fois encore, nous n’avons pas eu tort de le faire !
Ce concert de Queens Of The Stone Age à Bercy – pardon, à l’Accor Arena – suscite a priori autant d’attentes – un beau dernier album, malheureusement privé de hit, et un concert à Fourvière qui a impressionné – que de craintes – le dernier passage du groupe dans la même salle, peut-être trop « grande » pour eux (même si ce soir la fosse sera pleine et les gradins correctement remplis), ayant été décevant de l’avis général. Mais comment renoncer à être là quand on se remémore tous les beaux souvenirs que nous ont laissé leurs concerts au cours des deux dernières décennies ? Sans même parler de la place littéralement historique du groupe dans ce début du XXIème siècle : un ami nous rappelait justement qu’il considérait Josh Homme comme l’une des figures musicales les plus importantes de notre époque, parce qu’il portait une idée ni muséifiée ni trop arty du Rock… Et, bien sûr, parce que c’est grâce à lui que et Arctic Monkeys et Iggy Pop ont réalisé leurs meilleurs albums…
19h30 : Deep Tan ouvrent la soirée, et nos trois jeunes Londoniennes n’ont pas la tâche facile sur une telle scène, face à un tel public. Elles nous avaient séduits en avril 2022 à la Maroquinerie en première partie de Bodega, mais leur musique moderne, déstructurée, voire abstraite, est moins à sa place ce soir. Le son n’est pas mauvais mais, rapidement, de terribles larsens viennent régulièrement troubler le set, et le groupe semble privé de cette légèreté qui nous avait tant plu : les rythmes semblent plus mécaniques et la musique est comme désincarnée, tandis que le flow hip hop qui remplace souvent le chant sonne franchement ordinaire… Sans même parler du fait que les filles apparaissent la plupart du temps pétrifiées devant le défi d’animer une telle foule. Une dernière chanson aux sonorités orientales, plus accrocheuse, permet d’éviter un raté complet. 25 minutes peu mémorables, et un groupe à revoir dans des conditions plus favorables.
20h10 : le même genre de problème ne menace pas The Chats, bien connus pour leurs sets enflammés et spectaculaires. Et en effet, aucun souci pour les Australiens quand il s’agit d’aligner des brulots punks louchant souvent vers le modèle « Ramones », mais parfois aussi à la limite du « bourrinage » de bas niveau : ça cogne, ça hurle, ça dévale à toute allure les pistes les plus rebattues du rock violemment énervé. Suivant l’expression consacrée – n’ayons pas peur des clichés devant une musique qui les cultive allègrement -, The Chats n’ont clairement pas inventé la poudre, mais savent la faire parler ! On remarquera forcément une citation / hommage aux Stooges (Out On The Street), mais, dans l’ensemble, les titres s’enchaînent sans une seconde de pause, et on a rapidement l’impression que chaque morceau est plus frénétique que le précédent. Même si l’Accor Arena est immense, et que le public n’est pas venu pour eux, on a du mal à concevoir que personne ne pogote dans la fosse, ou pire, que peu de têtes s’agitent en rythme ! Nos Australiens terribles mériteraient d’être reçus avec un minimum d’enthousiasme, vu l’intensité de leur set ! 35 minutes « bas du front » plutôt savoureuses… même si on a eu l’impression d’être peu nombreux à les savourer !
21h15 : Queens Of The Stone Age ont promis de jouer 2 heures ce soir, ce qui peut laisser espérer que A Song for the Dead ne sera pas rayé de la setlist comme il l’a été quasi systématiquement lors des concerts précédents. Nous verrons bien…
Le concert commence fort – et dans une quasi-obscurité, tant pis pour les photographes – avec l’enchaînement de Regular John et No One Knows, qui fait exploser de joie la fosse, mais aussi les gradins où le public se lève déjà. Même si la voix de Josh n’est pas encore bien posée dans le mix, c’est un début qui impressionne.
Mais, à partir de là, comme c’est la règle des concerts de la tournée, on part en exploration dans les titres les plus récents (et même pas toujours les plus marquants) des deux derniers albums. On aimerait forcément un peu plus de ces classiques magnifiques qui ont fait la gloire du groupe, mais on ne critiquera pas Josh Homme et ses troupes parce qu’ils conjuguent plutôt QOTSA au présent. Et puis, même si le groupe a passé sa phase la plus brutalement radicale sur scène – celle de Era Vulgaris – il reste stupéfiant, techniquement : Troy Van Leeuwen, qui est l’élégance incarnée (son blazer, sa mèche de cheveux blancs, son jeu de guitare) fait des miracles en contrepoint de Homme, et la section rythmique de Jon Theodore, un batteur qui, par instants, surpasse même Dave Grohl, et de Michael Shuman, bassiste superlatif dont on déplorait initialement le style « heavy metal » et qui s’est désormais coupé les cheveux, est synonyme de tuerie absolue. Et puis Josh, même si on regrettera la disparition de sa « barbe Van Dyke » qui lui allait si bien, reste l’incarnation parfaite du charisme. Regrettons quand même les interventions toujours plus lénifiantes de Josh, entre les chansons, qui nous répète qu’il « ADORE PARIS », dans le plus pur style d’un entertainer ringard de cabaret cheap à Las Vegas : tais-toi, Josh, on te préfère quand tu chantes et que tu ne parles pas !
En fait, QOTSA jouent tellement bien qu’on se moquerait presque de ce qu’ils jouent, tant tout est magistral… Bon, on souligne le « presque », car quand on en revient après une bonne demi-heure moins excitante qui a vu les gradins se rasseoir (en dépit du formidable Battery Acid, quand même) aux meilleurs titres (The Way You Used to Do, The Lost Art of Keeping a Secret), le public est comme électrocuté, et la machine est relancée, très fort. Making It Wit Chu, on le sait, vit sa meilleure vie en ce moment, et la version qui nous sera offerte ce soir – avec la citation amusante du Miss You des Stones – sera parfaite. Le classique Little Sister clôt le set après une heure quarante, et on attend maintenant de voir ce que le rappel nous réserve…
Un rappel qui ne commence pas très bien, puisque QOTSA nous offrent la primeur d’un Obscenery jamais encore joué sur scène (bof !), avant de rendre hommage au regretté Mark Lanegan à travers un rare God Is in the Radio… malheureusement alourdi par (horreur !) un solo de batterie peu inspiré. S’ensuit une assez mauvaise version, toute raplapla, de Go With the Flow, et on s’apprête à regretter cette conclusion faiblarde d’un concert qui valait mieux que ça quand… Wham Bam… Josh lance l’intro de A Song for the Dead, triomphe du style QOTSA, avec cette menace obsédante qui broie lentement les crânes, cisaillée par des breaks absurdes, puis débouchant sur une double accélération qui annihilera littéralement toute résistance : toute la fosse de l’Accor Arena sombre dans la frénésie, et c’est là exactement ce que nous attendions de ce soir, quelques minutes de brutalité absolue et radicale.
Bon, le son aurait pu être plus fort, mais, en fait, le son peut toujours être plus fort, non ?
Texte : Eric Debarnot
Photos : Robert Gil
Pas d’accord sur le solo de batterie, cher collègue ! J’étais à la barrière avec deux batteurs (l’un virtuose, l’autre très réfractaire à Theodore) qui ont officiellement validé l’exercice :P
Je suis de ton avis sur la barbiche de Josh, en revanche. Le look bretteur avait son charme.
J’ai personnellement apprécié l’inauguration live d’Obscenery, même si c’était un choix audacieux pour ouvrir le rappel. Beaucoup de groupes de cette stature s’en seraient tenus aux hits les plus évidents, et je les attendais à ce tournant en particulier. Au final, l’inclusion de titres comme Battery Acid, Made To Parade et Better Living Through Chemistry rassure quant à la santé des setlists. Ils sont même allés jusqu’à ressortir Leg Of Lamb sur la date précédente, ce qui me laisse rêveur.
Sinon, c’était ma toute première sortie à Bercy. C’est bien laid, cet endroit. On me disait « ouaisss, tu verras, c’est un stade de 20 000 places, bla bla blou. » Une fois entré, j’avais juste l’impression d’être dans un gros gymnase. La scène est minuscule pour un tel nombre de places, et l’architecture a l’air d’avoir été dessinée par des entraîneurs sportifs. C’est bien la peine de ne pas avoir de poteaux en gradins si c’est pour donner si peu de surface scénique aux artistes. En plus, la scène est si éloignée de la barrière (même si des traces au sol suggèrent qu’elles ont autrefois été plus proches) que j’étais étonné que le service d’ordre soit à pied. Ils avaient largement assez d’espace pour arriver en monospace. Ou à poney.
Je hais les solos de batterie !
Je vois ça ^^ Quelle est ton opinion sur les balances de batterie, dans ce cas ?
>l’architecture a l’air d’avoir été dessinée par des entraîneurs sportifs.
En même temps dans les années 1980 ça s’appelait Palais Omnisports de Paris Bercy.;)
Bah putain, ça se voit ^^
Chronomètre en main, le solo a duré 2 minute et John Theodore n’est pas un manchot sur ses fûts!!!
Globablement un excellent concert avec un Josh Homme très communicatif et tout le groupe s’est montré très percutant et de là ou j’étais, le son était MONSTRUEUX quand bien même c’eut pu être un poil plus FORT!
C’est vrai que le volume était assez raisonnable, finalement. Personnellement je n’ai rien contre, ça permet de suivre le concert sans forcément porter des bouchons qui coupent les fréquences.