Spin-off ciblé « ados » de l’inénarrable The Boys, Gen V est exactement ça : une version « ado » d’une série majeure, avec une vision un peu puérile et « branchée » de ce qui est à l’origine une critique politique pertinente de l’idéologie dissimulée derrière le mythe moderne du super-héros. Plaisant, mais un peu insuffisant !
Alors que les super héros « mainstream » semble ne plus (enfin !) faire recette, leur critique, aussi intelligente (Watchmen) ou violente (the Boys) soit elle, va t elle à son tour – et ce serait logique – perdre de sa pertinence ? C’est peut être la question que ce sont posée les créateurs de Gen V, dont l’idée – vaguement inquiétante- est de proposer une version Sex Education de The Boys.
Dans un monde dystopique où la révélation de l’origine artificielle des super pouvoirs n’a pas tué la fascination du grand public pour ses héros capés 100% US, Gen V se tourne vers l’université où sont éduqués les super héros ado, que rejoint une étonnante adolescente qui a réalisé tragiquement, à l’arrivée de ses premières règles, qu’elle savait contrôler le sang. Ce qu’elle va découvrir, au delà de l’usage de super pouvoirs dans la sexualité, c’est que derrière la façade d’une université riche et bien fréquentée, se cachent de bien sombres secrets.
Il y a bien entendu d’excellentes idées dans Gen V, comme celle de lier les super pouvoirs de ces adolescents à leurs désordres émotionnels ou leurs incertitudes physiques : anorexie et boulimie, angoisse existentielle pouvant conduire à la schizophrénie, interrogations sur sa sexualité ou sur son genre, rapports difficiles avec un père ou une mère… Le catalogue est long, quasi complet, des tourments qui alimentent le sentiment des adolescents qu’ils sont différents, et, dans Gen V, leur propension à une utilisation incongrue, voire violente de leurs pouvoirs et de leurs talents. Tout cela est assez brillant, parfois très drôle, occasionnellement émotionnellement fort. Sans pour autant éviter l’écueil des clichés fatigants sur les amitiés et amours à la faculté, avec leurs dialogues rebattus et leurs conflits qui témoignent surtout de l’immaturité des protagonistes… Et finalement, ce superbe concept débouche sur pas grand chose de plus que ce qu’on peut voir dans la plupart des films et des séries sur l’adolescence.
Heureusement, il y a l’aspect policier/ thriller d’une intrigue plutôt bien ficelée, pleine de retournements, non seulement de situation mais aussi de personnages, dont, comme dans The Boys, on a bien du mal à comprendre s’ils sont bons ou mauvais : un peu des deux, comme dans la vraie vie, et le manichéisme US habituel en prend à nouveau pour son grade.
Par contre, en faisant fonctionner son histoire dans le milieu fermé – et confortable – d’une riche université pour « parvenus », Gen V se prive de tout l’aspect politique si intéressant dans The Boys, cette critique virulente de la morale US, et du capitalisme dévorant, sans parler de l’hypocrisie qui permet de combiner tout ça. Impossible de ne pas ressentir comme un manque, une régression presque, vis à vis de cette limitation de la série à des thèmes et des mécanismes moins adultes, voire plus puérils.
Heureusement, au fur et à mesure qu’elle avance, Gen V monte en tension, jusqu’à un épisode final intense et sans compromis qui ne pourra que nous ravir. Quant à l’apparition finale de Billy Butcher, au milieu du générique de clôture, elle pourrait indiquer que le fil narratif de Gen V se joindra à ceux de The Boys, ce qui serait sans doute le mieux qu’on puisse attendre.
Eric Debarnot
« Gen V se prive de tout l’aspect politique si intéressant dans The Boys, cette critique virulente de la morale US, et du capitalisme dévorant, sans parler de l’hypocrisie qui permet de combiner tout ça »
De la politique, des critiques virulentes et de l’hypocrisie. Y en a tout le long de la série…
Je ne comprends pas comment vous avez pu passer à côté.
La sélection des élèves, leur classement au sein de l’école et les critères pour savoir qui sera numéro 1, le traitement en maison de correction, le meeting de campagne électorale, comment les Supers se voient (« On est des Supers, on peut faire ce qu’on veut »)… Et j’en oublie tant…
Pas faux ! Dont acte (même si j’ai eu globalement l’impression de quelque chose de moins polémique, mais c’est sans doute subjectif).