Pierre Ferrero est inquiet. La France va mal. Il suffirait de pas grand-chose, par exemple la résurrection d’un vieux tyran, pour que notre État de droit s’effondre. Prenez garde !
Pour une raison encore inconnue, feu le maréchal Pétain revient à la vie. Le mort-vivant se précipite à Paris afin de se saisir du pouvoir. Or, non seulement le jeune président néolibéral en titre accueille bien le vieux réactionnaire revanchard, mais les deux compères fusionnent en une entité hideuse. Le monstre s’empresse d’imposer son autorité sur la société. C’est le début du long cauchemar de Pierre Ferrero.
Le scénario est ancré dans notre réalité, vous retrouverez les contrôles aux frontières, la télésurveillance omniprésente, le repli identitaire, la montée des nationalismes et de la peur de l’étranger. Mais Ferrero va plus loin, son président-maréchal séduit, fascine et transforme en cochons sauvages la plupart des policiers et des militaires. En quelques jours, un état policier se met en place. Les migrants et tous ceux qui osent les aider sont pourchassés, emprisonnés, puis déportés, sans autre forme de procès, à Cayenne. Le vieux bagne a repris du service.
Ferrero, qui ne craint pas de mêler la satire politique et les luttes sociales à des rebondissements fantastiques, a commencé à placer des histoires courtes dans des fanzines en 2019. Il s’est pris au jeu, son histoire a pris de l’ampleur. L’employé du moi nous propose une version plus aboutie. Comme poussé par l’urgence de la situation, le trait est rapide. Il n’hésite à jouer avec les proportions et à appuyer sur les expressions. Si le dessin est brutal, il est toujours précis et ses visages justes.
Ferrero s’amuse à montrer le ravissement de quelques figures, aisément reconnaissables, de notre vie politique, économique ou journalistique. Au même moment, une résistance armée se forme dans la montagne, qui retrouve les gestes et l’héroïsme des anciens maquisards. On y retrouve des militants, des migrants, mais aussi un vieux chasseur et un brave policier. Le pire n’est jamais certain.
Stéphane de Boysson