Nuit de l’Alligator triomphale à la Maroquinerie, mercredi soir, lancée par l’énergie garage de The Courettes, puis illuminée par les guitares frénétiques du flamboyant Gyasi, qui prouve qu’on peut être blues rock tout en restant glam. On vous raconte…
Avec la pluie fine qui tombe sur Paris et les dernières nouvelles qui ne semblent jamais bonnes, on a bien besoin d’un bon shot de rock’n’roll, pailleté si possible. Et ça tombe bien, car la figure de proue du glam rock contemporain est en ville ! Après son triomphe à Binic l’été dernier, on a hâte de revoir Gyasi, même si on craint une déception, toujours possible quand on attend autant d’une soirée.
A 20h, ce sont The Courettes qui ouvrent le bal : le duo « brésiliano-danois » s’est vu accorder une heure complète, ce qui prouve bien l’intérêt que leur garage rock « by the book » suscite à Paris. Bon, la batterie de Martin Couri est installée juste devant la scène, ce qui aura pour effet malheureux de priver en grande partie le côté gauche de la fosse – les premiers rangs, au moins – du son de la voix et de la guitare de Flávia Couri. C’est quand même dommage, non ? Bon, The (Fabulous!) Courettes, c’est musicalement sans surprise, jamais particulièrement renversant pour qui a écouté des décennies de rock garage avec un maximum de fuzz : par contre, c’est joyeux, sympathique et énergique, à l’image de Flávia, qui donne de sa personne tout au long du set, et à qui il est difficile de résister ! On ressent un peu moins de sympathie envers Martin, le « human sprinkler » du moment (sans aucune référence à Chris Isaak qui nous aspergeait à la grande époque de sa sueur abondante !) qui nous crachera de l’eau dessus toutes les 5 minutes, et qui doit trouver ça drôle…
Bon, les 30 premières minutes du set sont gentiment routinières : en fait sans le gimmick du son « Back To Mono » et de l’emballage sixties, la musique de The Courettes manque un peu de consistance, et on voit bien le temps passer. Heureusement, ça se réveille à mi-parcours et le set monte en puissance et en agressivité dans la seconde partie. Il y a même quelques beaux moments sur Boom! Dynamite et sur Hop The Twig. Le public – dont une bonne partie de fans du groupe conquis d’avance – est content, même si, malheureusement, The (Fabulous?) Courettes sont un peu en dessous de leur réputation ce soir. Evidemment, on ne peut, sur le coup, que se remémorer avec nostalgie les apparitions scéniques des Cramps, à leur grande époque : dans un genre similaire, c’était quand même d’un autre niveau (et zut à la nostalgie, pourtant !)…
21h30 : nous étions inquiets, avouons-le, à l’annonce du départ du guitariste du groupe que nous avions vu sur scène lors du fabuleux set de Gyasi au Festival de Binic l’année dernière, et qui nous semblait contribuer à la « magie Glam ». Mais quelques minutes en face de Leilani Kilgore qui officie désormais à sa place nous ont rassurés : Leilani, en dépit de son look punk bon teint, est une guitariste remarquable, qui contribue clairement à l’évolution musicale de Gyasi. Une rapide recherche sur le net après le concert révélera qu’elle est l’une des jeunes guitaristes montantes de Nashville, dont la « férocité » à la six cordes est appréciée ! Et l’un des plus grands plaisirs de cette soirée sera d’observer les duels de guitare réguliers entre Gyasi et Leilani, chacun poussant l’autre à l’excellence… En dépit de problèmes techniques affrontés avec brio : pour Leilani une corde cassée en plein milieu de set, la forçant à terminer avec seulement cinq cordes, et pour Gyasi la prise de câble déboîtée sur sa Gibson, l’obligeant à arrêter parfois de jouer pour la remettre en place en plein milieu d’une chanson…
Même si la plupart des morceaux joués étaient déjà présents sur la setlist de Binic – comment oublier les duels à l’épée mimés pendant Sword Fight ? Ou encore la décharge glam-metal de Fast Love ? -, le set va être nettement moins « glam-rock façon Marc Bolan » et aller clairement braconner – avec une aisance incroyable – sur d’autres terres des seventies. Et célébrer ainsi une version non pas modernisée, mais bien éternelle, du Blues (ou du Blues Rock, pour ne pas énerver les puristes !). Ainsi,Teacher débute comme un grand et magnifique moment de blues presque traditionnel, avant de déraper vers des riffs zeppelinesques… ce qui sera une relative constante de la soirée, même si l’on peut aussi évoquer les Yardbirds, ce qui est logique.
Bon, quand même, du côté glam, on a eu droit à l’irrésistible (et très Gary Glitter) Tongue Tied, à l’excitant Kiss Kiss qui vous a toujours un petit air de Suffragette City, ou à un Snake City qui évoque trop The Jean Genie pour ne pas pencher du côté de l’hommage pur et simple aux années fondatrices du Glam. Mais la majorité du set est plutôt revenue sur l’époque dorée du British Blues Boom, à la frontière entre les années 60 et 70 : on imagine facilement un Jimmy Page nous livrer à l’époque une version enflammée d’un titre comme Colorful, par exemple.
Evoquons en passant un moment surréaliste quand un spectateur – harmoniciste talentueux, mais là n’est pas la question – a réussi à monter sur scène après avoir bousculé le premier rang de la fosse, et à jouer de l’harmonica pendant un morceau entier, couvrant la voix de Gyasi (sous-mixée ce soir, malheureusement) : même si la chanson a semblé avortée par les musiciens surpris et visiblement peu à l’aise, la gentillesse et le professionnalisme (très américain) du groupe ont permis que l’intrusion farfelue ne dégénère pas en incident désagréable…
Nous n’avons senti quasiment aucun passage faible durant ce set brillant de 1h25, si ce n’est peut-être le nouveau titre, 23, qui a souffert au milieu de la déferlante rock, et a perdu sans le piano sa magie flamenco : ce n’est pas grave, on va dire que nous n’étions pas là pour ça, ce soir… Et tout s’est terminé par une sorte de longue jam (avec la citation habituelle mais difficilement reconnaissable du Waiting For The Man du Velvet) et un rappel généreux pour aller jusqu’à la limite permise par le couvre-feu. Car la générosité est indiscutablement l’une des grandes qualités de Gyasi : la joie et l’enthousiasme que le set dégage sont littéralement tangibles !
Le paradoxe de Gyasi était plus clair que jamais ce soir : il s’agit de jouer une musique profondément américaine – le blues rock – avec une sensibilité (et un look) purement anglais. Pas du tout déplacé dans le cadre d’une Nuit de l’Alligator, Gyasi perpétue son image de véritable « alien » du rock, sa beauté délicate et sa féminité tranchant avec une magnifique incongruité par rapport à la musique qu’il joue.
Un paradoxe absolument passionnant !
Texte : Eric Debarnot
Photos : Robert Gil
Je vous trouve assez dur avec les Courettes. Ils étaient franchement cool, même si c’était du déjà entendu. Le gros soucis vient du public mou du cul (assez récurent dans des concerts de Rock. Je me souviens de Jim Jones où c’était assez calme)
Bon, je faisais partie de ceux qui entendaient mal Flavia, étant à gauche de la batterie, en train de me faire cracher dessus en continu par Martin, donc mon humeur n’était pas particulièrement conciliante, je veux bien le reconnaître. J’y retournerai dans de meilleures conditions, je te le promets.
Je n’ai rien contre The Courettes, leur prestation était sympathique, la chanteuse guitariste a bien animé leur set MAIS pour moi le problème avec tous ces groupes à orchestration très limitée comme la leur c’est que sur la longueur d’une heure je trouve cela ennuyeux au bout d’une demie ! Et puis ensuite c’est le niveau des compositions qui fait la différence et là The White Stripes n’ont jamais été égalés. Désolé !