Pendant que la foule des mélomanes s’entassait au Zénith devant IDLES, les admirateurs de Hoorsees, groupe français conséquent qui offrait la release party de son nouvel album, étaient au Point Ephémère. Récit d’une soirée… trop courte !
Bon, il faut se faire une raison, ce soir : tout, ou au moins une bonne partie du public habituel de Hoorsees, est au Zénith pour voir IDLES, et on a peur qu’il n’y ait pas grand monde pour venir au Point Ephémère applaudir à la Release Party du dernier album de ce groupe français passionnant. Ce serait dommage, évidemment, mais nous qui sommes là sommes bien déterminés à faire le plus de bruit possible !
20h35 : Antonin Appaix, c’est un chanteur qui aurait été élevé en écoutant du Souchon, mais qui, en homme de son temps, aurait perverti / enrichi cet héritage de la chanson française douce et nostalgique à coup d’électronique et de samples. Il a sorti son premier album, Néoprène, l’année dernière, et se présente sur scène sur des sons pré-enregistrés (il ajoutera juste un peu de claviers vers la fin, et on se dira alors que c’est dommage que la musique entendue ce soir n’ait pas été réellement jouée…), mais aussi accompagné d’un percussionniste, Santiago. Le résultat, c’est qu’Antonin Appaix, qui se réclamera être un rockeur, est un drôle de nouveau chanteur (très) français, dont la musique est dynamisée par des rythmes et une aspiration à la danse : un mélange peu habituel d’artificialité moderne et de tradition organique. Au début, pour être sincère, on craint une superficialité et une pose très à la mode, mais, très vite, quelque chose de lumineux se cristallise. La voix est belle, les textes sont intrigants, et, cerise sur le gâteau, les sujets des chansons sont assez délirants : un musicien qui voit des rochers apparaître dans son studio, un amoureux de sa perruque qui s’envole derrière elle pour la rattraper, une vache qui cache un trésor sous son abreuvoir… ce genre de choses ! Et puis surgit Flashdance, un morceau efficace, presque disco, inspiré par la rencontre de Nanni Moretti et de Jennifer Beals, avec un sample du film Journal Intime… On a le droit de se demander ce que fume le sympathique Antonin, mais ces 35 minutes de set sont fraîches, joyeuses presque, basées sur des chansons bien fichues. Pas forcément notre tasse de thé, stylistiquement, mais il y a là bien du talent.
21h35 : Heureusement, pendant le set d’Antonin, le Point Ephémère s’est pas mal rempli, l’honneur sera sauf et l’accueil réservé à Hoorsees est particulièrement chaleureux (Bon, on sait bien qu’une release party, surtout d’un groupe local, accueille beaucoup d’amis et de familiers du groupe, mais c’est justement le charme de ce genre de soirées, amicales et bienveillantes).
Dès l’introduction, on réalise combien le quatuor parisien a évolué dans son style, et mûri scéniquement. Beaucoup moins brumeux, mélancolique, shoegaze que précédemment, Hoorsees sont désormais un groupe qui joue plus tendu, plus acéré, plus nerveux, des chansons au potentiel pop indiscutable (ça, ça a toujours été le cas !). Zoé, au centre de la scène, se débat au début avec des problèmes de sangle sur sa basse de droitière utilisée à l’envers, puisqu’elle est gauchère. Elle chante désormais sur certains titres, ajoutant une touche légère, presque décalée, très bien venue. Les deux guitares d’Alexin et Thomas (aux belles bacchantes) font un boulot formidable – et on peut comprendre la référence aux Strokes qui est faite parfois à propos de Hoorsees.
Logiquement, la setlist est consacrée en quasi-totalité au nouvel album, Big. Tous les titres en seront joués, dont l’accrocheur Charming City Life en début de set qui permet de bien poser les bases du concert : élégance, énergie et mélodies sont au menu ! Le son est excellent, même au premier rang, mais la lumière plutôt chiche – en regardant la setlist lumière du groupe, on voit que l’obscurité est une requête de Hoorsees. On regrette quand même l’absence des morceaux emblématiques des débuts du groupe (mais où est passé TV & Bad Sports ?), et on est surpris par l’impasse totale faite sur les titres du second album, A Superior Athlete, qui ne méritent pas une telle exclusion.
Au bout de trois quart d’heures seulement, Zoé annonce que ce sera la dernière chanson, ce qui est un peu rude quand on a trois albums officiels sous la ceinture. Le rappel d’un unique titre (Movie’s Architecture) permet au groupe de plus faire parler la poudre que durant le set principal, mais Hoorsees nous abandonnent un tantinet frustrés. Coïtus Interruptus ? Presque ! On voulait bien plus que ces cinquante cinq minutes parfois trop sages.
Qu’ils reviennent bientôt sur une scène parisienne avec plus de générosité, c’est ce qu’on leur demande maintenant !
Texte et photos : Eric Debarnot