Si le premier trimestre de 2024 n’a pas été des plus réjouissants, avec une météo pluvieuse et froide, et une situation politique mondiale désespérante, on a pu heureusement se rasséréner en écoutant de superbes albums pop. En voici 10 que nous avons aimé…
Durant ces premiers mois de l’année 2024 (donc janvier, février et mars…), l’équipe des rédacteurs Benzine a aimé ces 10 albums de pop, classés par ordre alphabétique de leurs auteurs :
Astrel K – The Foreign Department
Seconde échappée solo pour Rhys Edwards avec son projet parallèle Astrel K et la confirmation d’un talent prononcé pour la chose indie-pop. C’est hyper mélodique, structuré, bien pensé. On va sur plein de chemins différents, et même lorsque l’on expérimente, ça reste parfaitement audible au plus grand nombre, ce qu’est finalement la définition même du mot pop’. Le tout sans être ni putassier, ni trop facile, ni élitiste. Sophistiqué jusque ce qu’il faut. Un bien bel objet.
Cabane – Brûlée
A l’écoute de Brûlée, on jurerait entendre un Robert Wyatt qui aurait découvert la ligne claire, une Kate St John revenue dans la lumière, un John Greaves dans l’épure : ce nouvel album du projet Cabane (du Belge Thomas Jean Henri) exprime encore un peu plus le bouleversement d’une vie dans ses infimes tremblements. Brûlée dit l’essentiel qui, souvent, peut paraître un peu vain et futile. Il dit l’amour perdu comme on l’a entendu mille fois ailleurs, parfois mieux décrit, parfois mieux dessiné. Il dit l’envie d’aller mieux, de sortir du trou noir d’une liaison qui se termine. On l’a peut-être entendu mille fois ailleurs en mille fois mieux mais peu importe, ce qui compte, c’est cet instant suspendu qu’impose Brûlée. Ames sensibles ne pas s’abstenir !
Future Islands – People Who aren’t There Anymore
On retrouve dans le nouveau Future Islands, probablement leur meilleur album depuis Singles, le lyrisme, du bon côté de la grandiloquence, de cette synth-pop qui reprend la recette britannique des eighties et la libère de son aspect contraint et studieux. « L’américanise » en quelque sorte. Si les textes de Herring restent toujours aussi tourmentés, enchaînant les thèmes sombres, pessimistes, il y a à l’œuvre ici une véritable « magie pop » : on se tord toujours les mains de douleur sur Future Islands, mais en remuant son postérieur sur le dance floor, et en regardant les étoiles synthétiques qui brillent dans un ciel de comédie musicale.
GaBLé – PiCK THe WeaK
Il s’agit pour GaBLé de continuer avec ce nouvel album à surprendre, réjouir, stimuler leur auditoire en proposant une musique inédite, ludique, ambitieuse, sans sombrer dans une démarche intellectuelle absconse, surplombante… mais sans se répéter, après plus de vingt ans d’existence. On reste dans un bric-à-brac de sons, musicaux ou non, qui s’apparentent peu à peu à une jungle musicale accueillante, colorée : tous les morceaux sont de véritables chansons, la plupart complètement pop, faciles à mémoriser et à chanter en dépit de leur aspect décalé : PiCK THe WeaK a même une connotation électro pop, voire synth pop, qui le rend particulièrement aimable et facile…
Gruff Rhys – Sadness Sets Me Free
On imagine bien que vous, lecteurs de Benzine Mag, vous pouvez en voir assez qu’on vous répète, à chaque nouvel album qu’il publie, que Gruff Rhys est un génie de la pop ravissante, et intelligente qui plus est. Mais peu importe, armés de ce magnifique Sadness Sets Me Free, on va persévérer dans cette mission de salut public qu’est la promotion de l’œuvre d’un artiste majeur. Sadness Sets Me Free nous est présenté comme un retour de Gruff Rhys à des préoccupations quotidiennes, après les considérations plus élevées du précédent Seeking New Gods. Nous, on veut bien, mais, dans le fond, on s’en moque un peu, pourvu que la magie soit toujours là. Et bon dieu, qu’est-ce qu’elle est là !
Bill Ryder-Jones – Iechyd Da
Bill Ryder-Jones, porteur de grands espoirs depuis la reconnaissance de son album de 2013, A Bad Wind Blows In My Heart, réussit avec ce nouveau et superbe Iechyd Da une véritable percée qualitative : quasiment cinématographique dans sa démesure tout en restant extrêmement personnel, intime, voici peut-être l’album qui va le faire reconnaître d’un public plus large… Ce n’est un secret pour personne que Ryder-Jones se débat avec des angoisses proches d’une véritable instabilité mentale, et la profonde mélancolie qui se dégage de la majorité des titres de Iechyd Da ne relève pas d’une quelconque « pose artistique », mais bien de la réalisation du danger que cette instabilité représente. Et de l’urgent besoin de lutter, de vivre, de s’en sortir malgré tout qui doit animer l’artiste…
Helado Negro – Phasor
Mieux vaut tard que jamais dit l’adage. Et le succès critique qui semble frapper Helado Negro depuis quelques sorties en est une nouvelle illustration, méritée de surcroît. Ce quadra floridien d’origine équatorienne se balade entre langue anglaise et hispanique, mélange musique latine à des expérimentations pop sophistiquées pour créer un univers musical unique. C’est doux, sensible comme des envolées folk et en même temps groovy, rond, sensuel dans l’utilisation des synthés et des instruments. L’équilibre est très justement entretenu dans un écrin chaleureux où tout s’écoule agréablement.
Oisin Leech – Cold Sea
Cold Sea est la première échappée en solitaire pour Oisin Leech, moitié de The Lost Brothers, qui s’est offert les services de Steve Gunn pour mettre au monde un album folk aux accents irlandais, aussi épuré que bouleversant : au fil des morceaux, on se laissera doucement bercer par les notes de guitare et la voix très pure de Oisin Leech. Par moment, on pensera à Nick Drake, pour cette même facilité pour composer des chansons folk dépouillées et baignées d’une douce ambiance hivernale. Cold Sea est tout simplement un must pour cet fin d’hiver.
Retriever – A Room Outside
Il était temps pour le quatuor parisien Retriever de confirmer le potentiel entrevu lors du succès de leur single Purple. Et rien de mieux que l’exercice du premier album pour montrer ce que l’on a dans le ventre. A Room Outside, objet musical voluptueux, vient entériner la chose entre une pelletée de petits tubes irrésistibles très French Touch et compositions dream-pop léchées. Un groove imparable de bout en bout pour un disque d’une efficacité aussi simple que redoutable.
Faye Webster – Underdressed at the Symphony
Depuis ses débuts, il y a chez Faye Webster une espèce de détachement, de cool-attitude absolument charmante. Et si les statistiques d’écoutes depuis son dernier album, I Know I’m Funny haha, sont venus donner un peu plus de relief à son nom, sa nature n’a cependant pas bougé d’un iota. Preuve en est faite à l’écoute de Underdressed at the Symphony, son nouveau bébé, où l’on retrouve tous les composants habituels de sa musique, quelque part entre folk sudiste, country et rythm & blues. Son cinquième album (déjà), épaissit encore un peu plus la couche indie-rock sous un fond mélancolique teinté de légèreté.