Marzena Sowa et Émilie Plateau nous proposent la biographie de Vivian Maier, une femme fascinante, qui nous laisse, un peu, sur notre faim.
Vivian Maier nait en 1926 aux USA d’une mère française et d’un père américain d’origine allemande. Si elle a vécu, un temps, dans les Hautes-Alpes, elle passera l’essentiel de sa vie à New-York, puis à Chicago. Nous ne saurions rien d’elle, si à sa mort, ses biens n’avaient été vendus aux enchères et si l’acquéreur n’avait découvert des dizaines de milliers de photos. Toute sa vie, Vivian a photographié son environnement, ses proches et des inconnus. Or, son œil était bon et ses clichés font, désormais, l’admiration des spécialistes.
Classique, le scénario de Marzena Sowa nous expose le peu de choses que nous savons sur sa vie. Gouvernante, elle s’occupe d’enfants de familles plus ou moins fortunées. Vivian cultive un esprit libre et peu conventionnel. Ne travaillant que pour des parents démocrates, elle aime le cinéma, voyager et sortir des quartiers privilégiés. Bien que prudente, elle n’a peur de rien. Elle ne fondera pas de famille, vivra de peu et laissera, à sa mort, trois pièces remplis de coupures de journaux et de photographies, pour la plupart non développées.
Associant de petits personnages au tracé naïf et aux positions un peu raides à des décors plus réalistes, le travail d’Émilie Plateau surprendra. Bien que de tailles variables, ses cases sont toutes de format quadrangulaire, évoquant le format, très caractéristique, des clichés de l’époque. Elle alterne des représentations de Vivian et des enfants qui lui étaient confiés avec des scènes prises dans la rue, qui sont manifestement des reprises de ses photos. Vivian savait regarder, gagner la confiance de ses modèles d’un instant, pour, d’un geste, capter une émotion et saisir des regards. Curieusement, l’album ne propose pas de reproductions de ses clichés, mais ils sont aisément accessibles sur Internet. J’ai passé une longue soirée à admirer son travail.
Pourquoi n’a-t-elle jamais montré ses photos ? Quel était son projet ? En avait-elle seulement un ? Aimait-elle seulement observer et saisir, pour le plaisir, l’instant ? Nous l’ignorons.
Nous n’avons qu’une certitude, grâce à Vivian Maier, des milliers d’inconnus, souvent pauvres, voire miséreux, sont sortis de de l’ombre et ont eu, un temps, l’honneur des expositions et des plus grands musées. Ce n’est pas rien.
Stéphane de Boysson