A l’occasion de la sortie cette semaine du nouvel album de The Darts, le profondément réjouissant Boomerang, nous avons rencontré Nicole Laurenne, leur chanteuse / organiste, pour qu’elle nous explique comment la groupe réussit à être toujours pertinent, énergique et… fun !
Hey, The Darts viennent de sortir un nouvel album, qui s’appelle Boomerang ! The Darts, c’est l’un des indiscutables fleurons actuels du garage rock, tendance punk, et quiconque a eu la chance de voir les filles sur scène le sait : elles conjuguent frénésie et plaisir de manière renversante. Après la présentation en avant-première de Pour Another, poser enfin Boomerang sur sa platine, c’est l’assurance de se prendre de grandes décharges électriques d’euphorie : des tueries comme Are You Down (avec un riff dont les Hives rêvent encore !), comme le dévastateur Liar, ou comme le quasi glam-rock Hell Yeah, on n’en entend pas tous les jours ! Mais même quand elles ralentissent (un peu, pas trop, rassurez-vous) le rythme, The Darts gardent leurs mélodies attrape-coeur, et enjolivent brillamment le tout à coup de fuzz roboratif et de Farfisa ludique ! Jeter une oreille à un titre aussi implacable que Welcome to My Doldrums, c’est tomber irrémédiablement amoureux de cette musique inarrêtable, qui semble quasiment hors du temps.
Il serait donc normal d’en faire une critique complète et complètement enthousiaste, vu le degré de satisfaction qu’il génère en nous. Mais la meilleure manière de convaincre quelqu’un qu’il s’agit là d’un nouveau shot de musique essentielle à notre survie en cette époque d’intense morosité est de lui faire écouter ces 31 minutes (en 13 titres) !
Du coup, nous avons préféré laisser la parole à Nicole Laurenne, leur chanteuse et organiste (au Farfisa, donc, bien entendu !), pour qu’elle nous parle elle-même de The Darts et de ce Boomerang…
Benzine : Nicole, ce nouvel album, qu’est-ce qu’il apporte par rapport au précédent ?
Nicole : Boomerang est complètement différent de nos albums précédents, qui étaient produits par Bob Hoag dans l’Arizona, nous avons cette fois l’opportunité d’enregistrer avec Mark Rains à L.A., qui est responsable de l’enregistrement de certains de mes disques préférés [Mark Rains a produit des groupes comme Death Valley Girls ou Hooverii], et on a sauté sur l’occasion. Du coup, le son est différent, on a voulu que ça sonne plus brut, moins produit que Snake Oil. Boomerang a été écrit à un moment très positif de ma vie, et cela s’entend dans les chansons, je me débarrassais de plein de choses toxiques, c’était le début d’une nouvelle phase de ma vie. En plus du Farfisa, j’ai pu jouer tout un tas d’autres clavier, un Rhodes, un Wurlitzer, un Hammond, ça donne un son très riche.
Benzine : Si on revenait rapidement sur l’histoire de The Darts, mais aussi sur ce que tu perçois comme avenir pour le rock garage et pour le groupe…
Nicole : Eh bien, Christina [Nunez, bassiste] et moi on jouait dans The Love Me Nots, et à la séparation du groupe en 2015, on a décidé de lancer notre propre projet. On était sur une trajectoire ascendante quand la pandémie a frappé, on venait d’ouvrir pour The Damned aux USA, et de sortir un album (I Like You But Not Like That). Mais, c’est reparti maintenant, on a défendu Snake Oil de manière intensive sur scène, c’était un disque épique qui nous a redéfinies. On va encore faire un milliard de concerts avec Boomerang, ce qui nous place désormais dans une position qui est probablement la meilleure que nous avons eue.
Aux USA, il y a 15 ans, il y avait une scène garage plus vivace… Maintenant la tendance est plus au Rock Psyché… même si nous nous sentons également connectées avec cette scène, car on part dans tout un tas de directions différentes. Mais en Europe, par contre, le garage rock se porte vraiment bien ! Prends par exemple The Jackets avec qui on a joué la dernière fois à Paris, ils sont très proches de nous et sont de plus en plus forts…
Benzine : Ce qui est formidable avec The Darts sur scène, c’est la joie qui se dégage de vos sets !
Nicole : On s’amuse tellement sur scène, on ne fait pas semblant. Ça fait presque 20 ans que Christina et moi on joue ensemble ! Et même si la journée a été difficile, avec une longue route, de la mauvaise nourriture, du mauvais temps, on monte sur scène, il y a la basse de Christina, il y a mon Farfisa, et c’est LA FÊTE ! J’ai besoin de faire ça chaque soir !
Benzine : Et pour la prochaine tournée, Louise Sordoillet sera encore avec vous sur scène ?
Nicole : Louise va à nouveau remplacer Meliza pendant tout l’été, pour toute la tournée européenne : elle fait partie de la famille, maintenant, elle a d’ailleurs fait l’artwork de l’album.
Benzine : Je crois que parler de politique ne te dérange pas, alors quelle est ta vision de la situation actuelle aux USA ?
Nicole : On est sur Alternative Tentacles Records, et comme tu le sais, Jeffo Biafra, qui est une personne très éduquée, passionnée, n’a jamais peur d’exprimer une opinion politique claire ! J’ai été juriste dans une vie antérieure, et on parle beaucoup avec Jello de l’impact des nouvelles législations, de comment ça va nous affecter. Je suis par nature une personne optimiste, alors j’espère que nous ne verrons pas une nouvelle « période Trump« , et je pense qu’on commence à voir des tendances montrant qu’il s’affaiblit. Mais je suis inquiète, je suis de l’Arizona, je suis les décisions de la Cour Suprême, qui est littéralement en train d’interdire l’avortement. C’est vraiment effrayant de voir nos droits disparaître comme si de rien n’était. Et cette tendance, on la voit ici aussi en France, ou en Italie. Il est clair que les gens ont peur, et quand on a peur, on prend de mauvaises décisions, on tend à défendre ce qu’on a au détriment du bien commun…
Eric Debarnot
The Darts – Boomerang
Label : Alternative Tentacles Records / Adrenaline Fix Music
Date de parution : 26 avril 2024