Avec Jusqu’au bout du monde, Viggo Mortensen offre à Vicky Krieps sans doute son plus beau rôle à ce jour. Elle incarnant une femme de caractère et indépendante dans un western aux thématiques actuelles et emprunt d’un certain romantisme.
Les westerns n’ont sans doute plus trop la cote auprès de la jeune génération, mais pour les autres, il ne faudra pas bouder son plaisir et aller voir le nouveau film de Viggo Mortensen : il nous plonge dans l’Amérique rurale du XIXe siècle, et plus précisément en 1860, quand Holger Olsen, immigré danois alors en voyage à San Francisco, fait la connaissance de Viviane, une femme d’origine québécoise, de caractère et indépendante, avec laquelle il va s’installer dans une maison retirée de la ville de Elk Flats, dans l’état du Nevada. Mais quelques temps après, Olsen décide de s’engager auprès de l’armée nordiste, laissant seule sa compagne gérer la maison. Et c’est là que les ennuis commencent pour elle. Car elle va devoir faire face aux avances plus qu’insistantes de Weston (Solly McLeod), le fils violent et imprévisible d’un notable corrompu de la ville.
Deuxième film signé Viggo Mortensen après Falling (2020), qui racontait la confrontation plus que tendue entre un vieux père et son fils, Jusqu’au bout du monde (The Dead Don’t Hurt en VO), nous plonge dans un western finalement assez tranquille, où il ne faudra pas trop compter sur les duels au pistolet pour nous tenir en haleine. Car très vite, on se rend compte que Viggo Mortensen a choisi de privilégier le cadre propre au western plutôt que sa dramaturgie habituelle.
Ce film est surtout pour lui l’occasion de dresser un double portrait, celui d’un homme et d’une femme, superbement incarnés par Viggo Mortensen et Vicky Krieps… l’actrice dont la cote ne cesse de grimper en ce moment.
Si le film peut par moment donner l’impression de prendre son temps, et d’étirer la narration, il n’en est pas moins très agréable à suivre.
Loin des stéréotypes habituellement propres au western, le cinéaste met en scènes deux héros assez modernes dans leur personnalité, avec une dimension féministe assez marquée chez Viviane et une absence totale de masculinité affirmée chez Olson. Deux êtres pacifistes, épris de liberté devant lutter face à la violence des hommes, incarnés par un maire véreux et une famille de notables sans scrupule.
Résultat, le film dégage finalement pas mal de romantisme, et par moment une tonalité presque bucolique, notamment grâce à la tendresse qui se dégage du couple, mais aussi grâce aux superbes paysages de la région de Durango, au Mexique, un lieu de tournage incontournable pour les westerns des années 1960 et 1970. Mais le film montre aussi une certaine âpreté à travers la présence d’hommes de pouvoir, brutaux et sans état d’âme, usant de leur domination pour orienter la justice en leur faveur et rabaisser les plus faibles, surtout s’ils sont étrangers.
Benoit RICHARD