Objectif Lune, BD « monstrueuse » pour sa portée emblématique, grâce principalement à l’intuition géniale que fut la création de la fusée à damier rouge et blanc, est le fruit du travail des nouvellement créés « Studio Hergé » plutôt que d’un artiste, désormais hanté par des crises dépressives de plus en plus profondes. Il atteint une perfection presque impensable, tant graphiquement que narrativement…
1953 : Huit ans plus tôt, la guerre s’est achevée sur les premiers tirs de V2. Les Russes ne lanceront le premier satellite Spoutnik qu’en 1957 et la monstrueuse Saturn V américaine n’enlèvera le module lunaire qu’en 1969. Pour autant, Hergé se défendra d’avoir fait, avec son diptyque Objectif Lune / On a marché sur la lune, œuvre de science-fiction, mais, tout au plus, d’anticipation.
Avec ces deux albums, Hergé prend son temps pour livrer une histoire somme toute simple, mais au scénario miraculeux par son parfait équilibre entre une aventure humaine, un réalisme scientifique, un thriller d’espionnage et une franche comédie.
Pour les avoir beaucoup lus et relus, j’avoue préférer les préliminaires syldaves à l’aventure spatiale. L’histoire est plus drôle, les surprises mieux amenées et, même si c’est objectivement secondaire, le contexte plus réaliste. Le premier opus a mieux vieilli. Nous savons, désormais, que le relief tourmenté lunaire est une licence poétique, que le char est trop lourd et l’équipage trop nombreux. À l’inverse, la titanesque usine, le pas de tir, la surveillance militaire et le stress du compte à rebours sonnent juste.
Curieusement, mon ami Tintin reste en retrait, il observe et n’intervient qu’au besoin. Le premier rôle est confié à un professeur Tournesol transformé. L’inventeur farfelu du lit placard ou de la machine à brosser les costumes s’est mué en respectable atomiste. Rassurez-vous, le savant demeure imprévisible et gentiment hors de propos. Ne jure-t-il pas à plusieurs reprises qu’il s’engage à les faire sauter plutôt que de les livrer à une puissance étrangère ?
Les scènes culte abondent. Pensez à l’extraordinaire fou rire du capitaine Haddock à l’annonce du projet lunaire, à la lutte des Dupondt contre le squelette, et, mieux encore, à la furie de Tournesol offensé par le mot de « zouave », puis à son amnésie et aux soins du capitaine Haddock, ou, plus simplement, au douloureux gag du capitaine et de la porte.
Bien qu’au sommet de son art ; que ce soit dans les expressions et la mise en page, les cadrages ou le souci du détail ; Hergé souffre d’une dépression intermittente. La tristesse ne nuit pas à sa créativité, mais le contraint à s’appuyer sur son « Studio Hergé » nouvellement créé. Ainsi, il confie les décors à Bob de Moor, qui a succédé à Edgar P. Jacob.
Grâce à l’extraordinaire beauté plastique de la fusée à damier rouge, le diptyque est la plus célèbre des aventures de Tintin et la plus « merchandisée ». Qui n’a pas rêvé de posséder une grande maquette de la fusée ? La création d’Hergé est infiniment plus gracieuse que les véritables machines, qu’elles soient russes, américaines ou européennes. Je ne me lasse pas d’admirer la sublime scène nocturne de la fusée lunaire. Je vous laisse… Je rêve…
Stéphane de Boysson
Pour moi deux scènes cultes : le gag de Tournesol « qui a frappé ? » lorsque sa chambre est pulvérisée par un obus et l’engueulade du capitaine Haddock par Tintin lorsqu’il sort de la fusée complètement saoul. Exemple rarissime d’un Tintin en colère !
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