Si The Black Keys n’ont jamais été le groupe scénique le plus éblouissant qui soit, ils ont bien échauffé le Zénith de Paris hier soir, en offrant un concert convaincant et roboratif. Il faut souligner aussi la première partie solide offerte par nos chers Howlin’ Jaws qui ont démontré leur capacité à maîtriser désormais de plus grandes salles…
La récente parution de Ohio Players, l’excellent nouvel album des Black Keys a été une bonne nouvelle pour ceux, de plus en plus nombreux, qui trouvaient que le duo d’Akron, Ohio, tournait tristement en rond depuis plusieurs années, dans leur Blues Rock pop et carré : il était difficile de dépasser Brothers et les tubes étincelants de El Camino, et faire évoluer franchement leur musique était une nécessité. Du coup, on avait très envie de voir Dan Auerbach et Patrick Carney sur scène lors de cette « tournée Ohio Players » !
19h15 : Nous avons heureusement échappé aux orages qui ont éclaté sur Paris, et avons réussi à rentrer à 17h30 sans être trempés dans un Zénith (un petit Zénith, la partie haute des gradins étant fermée) qui a ensuite mis du temps à se remplir. Tout le monde n’était malheureusement pas encore là quand les formidables Howlin’ Jaws ont investi la grande scène. On était évidemment ravis de les voir là, après une ascension régulière vers la reconnaissance, au cours des dernières années… mais un peu inquiets à l’idée de les voir changer aussi franchement de dimension. L’excellente nouvelle de la soirée a donc été leur évidente capacité à non seulement gérer, mais même s’emparer d’une scène plus grande, et d’un public plus nombreux, pas venu là pour les entendre, eux. Et dès le premier morceau, le pari a été gagné : son impeccable, présence scénique convaincante, puissance de leur rock psyché sixties toujours aussi enchanteur… rien à redire. Petite cerise sur le gâteau dans ce contexte où il ne faut pas hésiter à trop en faire, les démonstrations flamboyantes de Lucas Humbert à la guitare ont enflammé la fosse. Final très fort avec leur grand Mirror Mirror au refrain irrésistible. Paris gagné, Paris gagné pour Howlin’ Jaws, clairement prêt à de grandes choses…
20h15 : Patrick Carney et Dan Auerbach lancent leur set de 1h35 sur les sons de I Got Mine, vestige d’une époque précédant le succès planétaire de Brothers, quand The Black Keys étaient encore un simple duo jouant du Blues Rock traditionnel. Bien entendu, cela permet de se souvenir immédiatement combien Auerbach est bon à la guitare (Lucas devait évidemment regarder et écouter comme nous cette maîtrise !), mais le pont psyché au milieu du morceau lui confère un aspect d’ouverture de concert en demi-teinte. D’échauffement presque. Les choses sérieuses débutent réellement ensuite, avec le sublime Gold On the Ceiling, joué dans une version plus heavy, moins glam que l’original. Le public éclate immédiatement de joie, le son est colossal, très fort comme on aime – Dan et Patrick sont appuyés par un groupe complet de quatre musiciens en arrière-plan (guitare, basse, claviers et batterie !) – et les lumières sont parfaites, avec de très jolis effets sur l’écran géant du fond. Une belle version de Have Love Will Travel (le classique de Richard Berry & The Pharaohs) permet de rappeler d’où vient la musique du duo : à ce stade, on remarque que Dan a fait saluer Patrick deux fois par la foule, mais n’a pas encore présenté les accompagnateurs, ce qui les confine clairement à ce rôle secondaire !
Everlasting Light est le premier moment de grâce du concert, avec un chant littéralement parfait : tout le Zénith est suspendu aux lèvres de Dan, et on ne peut s’empêcher de penser que c’est réellement quand ils sortent de leur formule « gros riff et mélodies basiques » que les Black Keys deviennent grands. Alors qu’on est dans le cœur de la setlist, se profile le sentiment de tourner un peu en rond, et on attend avec impatience l’arrivée des nouveaux morceaux : il y en aura quatre (on en aurait préféré une paire en plus !), et ils seront tous les quatre rafraichissants de légèreté pop et psyché. This Is Nowhere porte la marque du génie mélodique de Beck (on aurait bien aimé qu’il pointe son nez sur scène, puisque Dan nous rappelle qu’il l’avait fait précédemment, mais non…), Beautiful People (Stay High) sonne toujours très Kasabian, et on aime ça, On the Game et Only Love Matters ne bénéficieront pas nn plus de la guitare de Noel Gallagher (qui avait rejoint le groupe sur scène lors de leur première date à Londres !).
Howlin’ For You joue son rôle – trop prévisible – de crowd-pleaser. On lui préférera nettement le très beau – et là encore, bien plus léger – Fever, et sa soul vaguement synthétique, et surtout une version parfaite du I Heard It Through the Grapevine de Gladys Knight and The Pips, qui nous a presque fait passer notre regret de ne jamais avoir vu, à l’époque, Creedence Clearwater Revival le jouer sur scène : pour nous, ça aura été là le moment le plus mémorable de la soirée !
Le rappel débute par une magnifique interprétation (surtout la partie acoustique) de Little Black Submarines, alors que le final électrique hystérique semble plus convenu. Le moment est venu de se dire au revoir avec l’incontournable et forcément grandiose Lonely Boy : tout le monde braille dans le Zénith, c’est une conclusion certes évidente mais tout à fait jouissive d’un set professionnel, carré, qui a su néanmoins s’ouvrir de temps à autres sur de beaux moments musicaux.
Nous voilà rassurés quant à l’avenir des Black Keys, qui doivent clairement continuer à aller explorer de nouveaux chemins musicaux pour rester pertinents : de toute manière, il leur restera toujours assez d’hymnes « blues rock » pour faire la joie de leur public !
Photos : Robert Gil
Texte : Eric Debarnot
On a vu le même concert. Parfaitement maîtrisé. Jusqu’à l’ennui. Tout est hyper millimétré, pas de place pour faire passer plus d’émotion. Les morceaux sont pliés en 4 minutes, pas de rab, jamais, ça serait dommage de faire du rock avec ses tripes. Le son est très bon, l’éclairage sympa et l’écran géant en fond de scène efficace… mais bon, on veut vibrer sur de la musique d’abord.
Les zikos derrière s’ennuient ferme. A un moment donné, deux horns débarquent. Une grosse tête devant moi m’a empêché de les voir pendant les 2/3 du morceau. Et je fus fortement étonné…. vu que je n’avais même pas entendu qu’ils étaient là….
On attend évidemment Lonely boy, un peu atypique en fait parmi les autres morceaux. Ce sera évidemment le dernier morceau avant d’aller manger ou dormir, sans en faire plus que le strict minimum. Bref, mettez les albums du groupe à fond chez vous, ça fera le même effet.
Le public se trompe majoritairement sur la musique : beaucoup attendent du rock , alors que le blues rock est vraiment le coeur de la prestation. Mais un blues rock blanc : bien exécuté, sans âme.
Je ne suis jamais rentré aussi tôt d’un concert de rock.
Tu l’as vu, j’étais un peu moins négatif que toi, mais fondamentalement, ton opinion rejoint la mienne. Je n’avais en fait jamais été voir les Black Keys en live, alors que j’ai écouté leurs disques depuis longtemps. Tous mes amis, férus de bonne musique, m’avaient en effet signifié que le groupe n’était pas très intéressant sur scène, et ça s’est confirmé. J’ai voulu les voir au moins une fois, et j’avais espéré que le virage du dernier album soit un peu plus traduit sur scène. Mais bon, il faut reconnaître que la majorité du public du Zénith a été très satisfait !