[Cannes 2024] Jour 2 : Furiosa, La jeune fille à l’aiguille, Megalopolis, À Son image

Au programme de ce jeudi 16 mai, il y avait du très lourd au programme, avec les bolides de Furiosa : une saga Mad Max, le projet mégalo de F.F. Coppola, Megalopolis, de l’infanticide et une fresque corse.

 

 Furiosa : Une Saga Mad Max de George Miller

Furiosa suit l’histoire originelle de l’héroïne campée auparavant par Charlize Theron et désormais interprétée par Anya Taylor-Joy. Du bruit, de la fureur, des bolides compactés à la César, une vigueur indéniable et une ambition folle pour le cinéaste qui développe son univers en lui donnant un cachet plus mythologique et politique. C’est tout à son honneur que de vouloir se renouveler pour éviter le remake relifté, mais l’ensemble pâtit de soucis d’écriture, d’une structure qui peine à fluidifier les passages d’une scène à l’autre et de bavardages assez dispensables. Une séquence d’assaut, assez fulgurante et ajoutant des variations par le recours à des engins volant atteste d’une maestria indiscutable, et on lui saura gré de faire oublier des choix plus funestes dans d’autres passages où la surenchère et le recours au numérique penche un peu trop vers ce que les blockbusters peu inspirés nous livrent depuis quelques années.

La jeune fille à l’aiguille, de Magnus von Horn

Noir et blanc (« superbe » ou « sublime » noir et blanc, diront les journalistes) léché pour un condensé de misérabilisme où rien ne manquera, entre la femme enceinte s’effondrant dans les betteraves, l’avortement à l’aiguille à tricoter, une gueule cassée, un cirque de monstres humains et des infanticides à la chaîne. C’est permis, hein, car « inspiré d’une histoire vraie », alors on peut y aller franchement en ajoutant une musique bien malaisante, des cauchemars horrifiques et une actrice enlaidie qui soulève un sourcil dès que la situation s’envenime – ce qui arrive à peu près toutes les 120 secondes.
L’affiche aura probablement droit à ses slogans « Le film choc du Festival de Cannes » ou « Le coup de poing de la Croisette » ce qui fera sans nul doute rougir de plaisir son réalisateur.

Megalopolis de Francis Ford Coppola

e fameux Megalopolis de Francis Ford Coppola, projet d’une vie qu’il a fini par financer par lui-même pour pouvoir se garantir une liberté artistique totale, rejoint par une pléiade de stars ne demandant qu’à travailler devant la caméra d’une légende encore vivante. La projection restera probablement dans les annales du Festival de Cannes, tant elle a suscité des réactions contrastées. Huées, applaudissement, éclats de rire ont ponctué un film absolument hors-normes, kitsch et baroque, expérimental et mièvre, mélange improbable entre romance, blockbuster et dissertation nébuleuse. Coppola passe des acrobates à Marc Aurèle, de l’image de synthèse au film noir, de la décadence romaine à la science-fiction sans aucun complexe. Dans cette intrigue très dense opposant le maire d’une mégalopole à un architecte idéaliste convaincu de pouvoir changer le monde, la question de l’utopie est centrale. La foi indestructible du protagoniste est bien évidemment le miroir de celle d’un cinéaste qui n’a de compte à rendre à personne. Riche de son indépendance financière et sans crainte du ridicule, il va jusqu’au bout de son délire. Peu de chance qu’il soit collectivement partagé, mais on ne peut que s’enthousiasmer de voir une proposition aussi audacieuse, pour bancale qu’elle soit, dans un cinéma où les studios décident massivement quels sont les goûts du public pour les imposer aux créateurs.
La sortie de la projection de presse offre donc ces grands moments de débats enflammés, où les réactions clivées vilipendent le nanar quand d’autres plus courageux crient au chef-d’œuvre crépusculaire… Que ce serait drôle de retrouver ce film au palmarès…
Pour les plus courageux, le film sortira le 25 septembre.

À Son image, de Thierry de Peretti

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Revoilà Thierry de Peretti, le cinéaste Corse dont la cote ne cesse de monter ces dernières années avec les remarqués Une vie violente ou Enquête sur un scandale d’état . Son nouveau film prend la forme d’une fresque suivant la vie d’une photographe qui va documenter l’évolution des activités militantes nationalistes corses durant une vingtaine d’années. Le film retrace avec une grande finesse la destinée intime et les mouvements politiques de l’île, sans jamais perdre de vue le récit initiatique d’une femme tiraillée entre son désir de donner à voir et le questionnement éthique qui en découle. Une grande réussite, émouvante et esthétiquement très maitrisée, portée par la formidable interprétation de Clara-Maria Laredo. (Quinzaine des cinéastes – Sortie le 4 septembre 2024)

Plus de détails sur le Journal du festivalier du Sergent Pepper