Sommes-nous proches de la parité dans le Rock ? Non, nous en sommes même loin, en particulier dans tous les métiers techniques de la musique et de la scène. Aider les femmes à trouver leur place dans un milieu où pendant des décennies, le machisme a régné, voilà l’objectif de l’Association « More Women On Stage » qui organise son festival ce mois-ci.
Benzine : Est-ce que tu peux te présenter, nous expliquer ce que tu fais ?
Marion : Je m’occupe du Festival « More Women On Stage », de toute la coordination. Je suis là depuis la création du festival, la première édition à l’Olympic Café. L’année dernière, la deuxième édition a eu lieu, comme cette année, à Petit Bain. Au début, je ne m’occupais que de la production, mais ça a grandi…
Benzine : Raconte-nous un peu les origines de « More Women On Stage »…
Marion : A l’origine, il y a Lola Frichet, la bassiste de Pogo Car Crash Control, qui a écrit derrière sa basse la phrase « More Women On Stage ». Et ça a pris, il y a pas mal de musiciennes qui l’ont mis aussi derrière leurs instruments, et en 2022, on a eu l’idée de monter le festival. On a fait ça en un mois et demi, ça a été assez lunaire, mais on a déjà eu une super programmation, et on a réussi à monter un programme complet avec des tables rondes, des master class, une expo photo, des concerts.
Benzine : Lola était impliquée dans ce premier festival ?
Marion : Lola était totalement d’accord avec le festival, elle a approuvé les idées, et elle a fait une master class sur la basse, et un podcast…
Le tout début, c’était un peu roots, mais on a créé un truc, et on s’est dit… bon l’année prochaine, on a un an pour tout préparer, on va pouvoir faire quelque chose d’encore mieux. Cette année, on est sur le même modèle que l’année dernière à petit Bain, avec des concerts, un club le samedi soir, des masterclasses, des tables rondes, un marché, des concerts rooftop
Benzine : Et le succès a été conforme à vos attentes ?
Marion : la première édition a été complète, la seconde non, mais la jauge à Petit Bain est plus grande, donc ça s’explique…
Benzine : Finalement, aujourd’hui, votre objectif avec ce festival c’est quoi ?
Marion : L’objectif reste de mettre en avant les femmes et les minorités de genre dans la musique, on a vocation de toucher de jeunes musiciennes – ce qui était l’idée originale de Lola, et nous est venus, dans l’Association, en tant que professionnels de la musique, élargir l’approche à toutes les professions de la musique, que ça soit la technique, l’administration, etc.
Benzine : Ce qui se répercute dans les tables rondes, par exemple ?
Marion : On veut varier de plus en les sujets. Cette année, on a une table ronde sur les labels, avec une explication sur ce que c’est qu’un label, avant de parler des choix artistiques, des engagements des labels. Ça peut être l’occasion pour les jeunes artistes de comprendre comment les labels fonctionnent, tout en apportant le biais du militantisme dans la démarche. On aura une seconde table ronde sur la parité dans les tournées, donc beaucoup plus orienté « pro », avec des retours d’expérience de personnes travaillant sur les tournées, qui vont raconter comment elles ont réussi, ou pas, à mettre en place des équipes paritaires, quels ont été les soutiens, les freins, etc.
Benzine : Et il y a des artistes connus qui participent et qui vous soutiennent…
Marion : Cette année il y a par exemple Jeanne Added, l’année dernière on a eu Suzane et Mademoiselle K. Au delà des artistes rock, on voit de plus en plus que les idées se propagent, par exemple sur les tournées, et dans tous les styles de musique. C’est important que ça diffuse dans des milieux loin de nous. On voit maintenant pas mal de t-shirts et de sweats sur les tournées.
Benzine : Et quel est votre positionnement par rapport au Festival les Femmes d’en Mêlent, qui promeut aussi la place des femmes dans le Rock ?
Marion : Justement, nous, on n’a pas vocation à rester dans le Rock, mais plutôt de toucher le maximum de monde, dans tous les genres musicaux. Et puis, de toute manière, il n’y a pas de concurrence entre nous, toutes les initiatives qui vont dans le même sens sont bonnes à prendre !
Benzine : Et qu’est-ce que vous avez comme aspiration, au delà du festival et des initiatives actuelles ?
Marion : En un an, l’Asso a beaucoup évolué et développé d’autres pôles : une tournée, des masterclasses tous les mois, ce qui nous donne des activités tout au long de l’année… Même si en ce moment, bien entendu, on est focalisés sur le Festival… Et puis, en fonction du succès du Festival cette année, on préparera l’année prochaine. L’évolution, c’est aussi la mise en place de masterclasses « techniques », au delà de l’utilisation des instruments. Cette année, au Festival, on a une masterclass Régie. On a beaucoup de demandes sur les masterclasses techniques, il y a un besoin. La particularité de nos masterclasses, c’est qu’elle sont organisées en « mixité choisie », ce qui fait que certaines personnes se sentent plus à l’aise pour poser des questions, pour reconnaître un manque de savoir, que dans des ateliers traditionnels, où les femmes ne se sentent souvent pas « légitimes » sur des sujets techniques. En fait, même pour les musiciennes, avoir des moments où on est toutes ensemble, ça permet de partager plus facilement…
Benzine : Autre chose à souligner sur le festival ?
Marion : Eh bien, à propos du festival de cette année, il faut aussi parler de la masterclass guitare, avec Artie de Psychotic Monks. Et on aura aussi un marché, avec des créatrices et des associations…
Benzine : Alors, il ne nous reste plus qu’à vous souhaiter un maximum de succès et surtout d’impact !
Propos recueillis par Eric Debarnot le 3 juin