Après 19 ans d’absence, Lovejoy, groupe méconnu de l’indie-pop britannique, est de retour avec un très bel album, sorti en catimini fin juin. Retour sur un disque et un groupe à (re)découvrir.
Le label Sarah Records a fermé ses portes en 1995. Mais le culte qui l’entoure n’a peut-être jamais été aussi fort. Des festivals tels que le Glas-goes pop ou le Paris Pop Fest programment les rares groupes du label encore actifs. Skep Wax publie les compilations hommages Under the bridge. Et des groupes, plus ou moins jeunes, perpétuent cette idée de l’indie-pop défendue à l’époque par Sarah Records : une pop à guitares toujours mélodique et souvent mélancolique. Parmi eux, le groupe de Richard Preece, Lovejoy, dont le premier album date de 2000. Soutenu par d’anciens membres de Blueboy et de Brighter, deux formations phares signées sur Sarah Records, Lovejoy a toujours proposé une musique héritée d’un certain âge d’or de l’indie-pop, entre 1987 et 1994. Des mélodies limpides, des guitares qui carillonnent, un chant discret, vaporeux parfois et une douce mélancolie presque adolescente. La mort en 2007 de Keith Girdler, leader des formidables Blueboy, et producteur des premiers Lovejoy, avait mis un terme à l’aventure du groupe de Richard Preece. On ne s’attendait donc pas vraiment à la sortie de ce très bon … And It’s Love, logiquement dédié à la mémoire de Keith Girdler.
Ceux qui connaissent bien l’indie-pop britannique, les groupes Sarah Records, mais aussi les labels qui en revendiquent aujourd’hui l’héritage, reconnaîtront la plupart des noms salués dans les notes de pochette de … And It’s Love : Alan McGee, Ed Ball, Beth Azry, Matinée Recordings, Too Good To Be True Records, etc. Autant de noms qui évoquent une époque en partie révolue mais que quelques labels et groupes revendiquent encore aujourd’hui. Et ce nouvel album de Lovejoy en est une belle illustration. Regency Square, le titre qui ouvre …And It’s Love et qui évoque un peu Slowdive, annonce la couleur : pas d’innovations ni d’expérimentations ici, mais bien la volonté de creuser un sillon déjà tracé par d’éminents aînés. D’ailleurs, Lovejoy ne s’en cache puisque le groupe reprend ici la superbe When you lose your lover learn to lose d’Ed Ball et en propose une version qui n’est pas sans évoquer l’immense Lloyd Cole. Plus loin, le groupe réinterprète superbement Miss You, une chanson des cultissimes Biff Bang Pow!, le groupe d’Alan McGee, le boss de Creation Records (Jesus & Mary Chain, My Bloody Valentine, Oasis, etc).
Malgré toutes ces références, ou les petites sonorités électro qui parsèment le disque et qui rappellent la première moitié des années 90, …And It’s Love ne sent jamais la naphtaline. Au contraire, l’album de Lovejoy est l’œuvre d’un songwriter humble et sincère qui, malgré les coups durs et le temps qui passe, n’a jamais renoncé et poursuit sa quête de la pop song parfaite. Be The Light, la chanson magnifique qui clôt … And It’s Love, en est la plus belle preuve.
Accompagné de musiciens fidèles et talentueux (Ally Board, Keris Howard), Richard Preece nous offre donc un beau disque que l’on ne peut que chaudement recommander.
Grégory Seyer