[HBO/MAX] « House of the Dragon – Saison 2 » : du feu et des parlottes (la suite)…

Il est facile de résumer la seconde saison de House of the Dragon : la même chose que la première. Soit : des dragons, on s’enflamme, des parlottes, on s’ennuie vaguement. Bref, une série qui se cherche toujours et ne s’est pas encore trouvée.

House of the Dragon S2
Emma D’Arcy -Copyright Ollie Upton/HBO

Il aura donc fallu attendre deux ans pour retrouver House of the Dragon et constater que Ryan J. Condal en est toujours plus au moins au même point, comme sa série. Ce n’est pas réellement une grosse déception, le prequel de Game of Thrones ayant d’indéniables qualités, mais on n’est pas non plus au niveau attendu. Car, devant l’approche beaucoup plus « adulte », raisonnée qui était celle de cette nouvelle série, qui éliminait beaucoup des excès (de sang, de stupre, de provocation gratuite) de son « modèle », et choisissait une réflexion plus mûre autour de personnages moins caricaturaux, engagés dans des conflits de pouvoir et de sentiments complexes, on rêvait à un nouveau tour de magie comme celui réalisé par Better Call Saul après Breaking Bad : poursuivre avec la même qualité, le même niveau de plaisir pour le téléspectateur, mais gagner en « profondeur ».

House of the Dragon S2 afficheDevant cette bordée d’épisodes – réduite de 10 à 8, alors qu’avec deux épisodes de plus, Condal aurait pu nous régaler des débuts de la guerre entre les deux clans de la maison Targaryen déchirée, et aurait sans doute ravi tous les fans -, on ne peut que répéter les mêmes commentaires, les mêmes compliments et les mêmes critiques que ceux que nous écrivions il y a deux ans. Pour simplifier : quand Condal sort les dragons, tout le monde est content du spectacle offert (mais il n’y a guère que deux épisodes qui jouent cette carte-là…), quand il filme d’interminables discussions entre ses personnages, cela manque juste un peu de « talent » pour que ça soit réellement fascinant, et l’ennui rôde. Pas un ennui mortel, non, mais une vague impression que les choses n’avancent pas et qu’on attend plutôt la prochaine « scène d’action » (enfin, scène avec des dragons…).

Ce qu’on nous raconte donc dans cette seconde saison, c’est la planification / préparation de la guerre, inévitable, entre deux clans (deux « teams », les verts et les noirs…) : celui soutenant la jeune reine Rhaenyra, choisie pour lui succéder par son père mourant, et celui de ses frères tenant King’s Landing, soutenus par la majorité de la noblesse qui refuse à ce qu’une femme monte sur le trône. Rhaenyra préférerait éviter le bain de sang qui s’annonce, n’a de toute manière pas assez de dragons opérationnels, et craint le manque de loyauté de Daemon, son époux (et oncle, au demeurant) parti recruter une armée parmi des partisans potentiels qui, pour ne rien arranger, se détestent entre eux. En face, le piège déclenché par les ambitions d’Alicent s’est refermé sur elle, et c’est la relation difficile entre le jeune roi auto-proclamé, Aegon, et son psychopathe de frère, Aemond, qui va s’avérer déterminante. Ce sont Ewan Mitchell (Aemond) et Matt Smith (Daemon) qui incarnent les personnages les plus complexes et retors, et offrent les scènes les plus marquantes de la saison, mais il faut reconnaître que Rhaenyra (Emma D’Arcy) gagne en substance au fur et à mesure des épisodes.

Concluons en remarquant combien le rôle des dragons dans les conflits de l’univers de G.R.R. Martin s’apparente à celui de l’arme nucléaire : arme absolue, donnant un avantage décisif à celui qui dispose de plus de puissance de feu, ils peuvent être utilisés comme garants de la paix négociée (selon le souhait de Rhaenyra) ou comme instruments de destruction massive (le rêve d’Aemond, qui n’hésite pas à en faire usage contre des sujets de son propre royaume qui « ne l’aiment pas assez » !). Une représentation – simpliste mais pas totalement fausse – des positions des démocraties et des régimes autoritaires par rapport à la Bombe. Le modèle de gouvernement prôné par Rhaenyra regroupe en effet – non sans « anachronisme » – nombre de valeurs prônées actuellement par l’Occident : égalité des sexes, accession au pouvoir de catégories sociales « non favorisées par leur naissance », et bien sûr – pour faire crier au wokisme les enragés habituels – reconnaissance de l’homosexualité comme comportement sexuel « normal ».

Peut-être d’ailleurs que ce serait en poussant un cran plus loin ces réflexions « politiques » que House of the Dragon pourrait gagner en audace et en singularité…

Eric Debarnot

House of the Dragon – Saison 1
Série US de Ryan J. Condal et George R.R. Martin
Avec : Emma D’Arcy, Matt Smith, Olivia Cooke, Ewan Mitchell, Tom Glynn-Carney…
8 épisodes de 1 h, mis en ligne (MAX) de juin à août 2024