[Live Report] Rock en Seine – Jour 1 : Lana Del Rey sur le toit de Paris !

Grosse ouverture cette année de Rock en Seine, avec l’unique date prévue en France de Lana Del Rey. La journée affichait – logiquement – complet, mais nul n’a été déçu du concert de l’idole absolue, iconique qui plus est, qu’est devenue Lana.

2024 08 21 Lana Del Rey Rock en Seine J1 (12)

Sans véritable surprise, les abords de la Grande Scène sont quasiment inaccessibles même en arrivant dès 16h : respect, bien entendu, aux innombrables fans de Lana qui campent depuis des heures, certains depuis plus d’une journée, pour s’assurer les premiers rangs devant la scène !

2024 08 21 Rory Rock en Seine J1 RG (2)17h40 : la journée débute avec RORI, toute jeune artiste belge, dont on redoutait le style « urbain / pop contemporaine », et qui nous offre trente minutes de « chansons rock » finalement assez classiques, ou qui en tout cas sacrifient assez peu aux modes de l’époque. RORI a d’ailleurs une bonne voix soul, qu’elle pourrait encore mieux utiliser, mais qui rend son set tout à fait sympathique. Les sons sont en majeure partie pré enregistrés, même si un guitariste et un batteur font un peu de figuration sur scène… et servent un peu de caution rock. Toutes les chansons ne sont pas fantastiques, c’est vrai, mais, au jugé, on appréciera un nouveau titre furibard et assez ambitieux, Jalousie. Vu la jeunesse de RORI, il n’est pas interdit d’attendre de bonnes choses d’elle, dans le futur, et si elle arrive à se dégager – comme elle l’a montré sur scène – des codes pénibles de la soupe qui se vend en ce moment.

Joli moment d’émotion à l’entracte quand une pub Deezer fait chanter à la foule les paroles de Video Games. La magie de la foule (eh oui, tout n’est pas négatif dans la foule)…

2024 08 21 Towa Bird Rock en Seine J1 RG (2)18h40 : Towa Bird, c’est la bonne surprise de ce début de soirée : de l’indie rock un peu ordinaire mais énergique, avec deux guitares électriques bien jouées, dont celle de Towa. Pour l’accompagner, comme avec RORI, seulement un guitariste, pas manchot pour le coup, et un batteur, ce qui signifie qu’une bonne partie de ce qu’on entend est aussi pré-enregistré. On pourra déplorer quelques morceaux mous et très banalement « pop mainstream », mais ils sont heureusement compensés par des passages heavy (comme B.I.L.L.S.) qui font souffler un peu d’air frais sur le festival. On fait des doigts d’honneur aux milliardaires (Check !), et on finit par chanter le lesbian sex (acclamations dans la foule !) sur le très réussi Drain Me! A revoir, surtout dans des conditions meilleures, dans une petite salle, pour voir si tout cela est bidon ou non.

19h50 : on a installé des champignons (en plastique) sur scène pour Pomme, ce qui fait un peu peur… il est clair que pour le coup, ce ne sera pas rock’n’roll !

2024 08 21 Pomme Rock en Seine J1 RG (4)On aborde donc avec Pomme la partie difficile de la journée : de la chanson française pénible, à nos oreilles peu habituées à ce « style musical », qui va nous plonger dans l’ennui, et surtout la consternation. Pomme se déclare fan de Lana et raconte avoir débuté en chantant Video Games dans les bars. Bon, on veut bien, mais nous infliger ses effets de voix pénibles (une mauvaise imitation de Barbara, qui est clairement sa « vraie » référence), ses chansons informes, ses chapeaux en carton-pâte en forme de champignons, son talent limité qu’il vaut mieux déguiser en fantaisie, c’est trop ! A un moment, elle décide de massacrer une chanson de Joe Hisaishi de ses trémolos affectés. Bon, on dit ça, on ne dit rien : reconnaissons que Pomme était bien entourée de musicien.nes de talent qui ont fait diversion chaque fois que l’occasion leur en a été offerte : on a même eu un morceau rythmé, dansant, presque bruyant, avec une pointe d’intensité (Pomme nous avait bien prévenus à l’avance que ce serait le seul !). Le final avec lâcher de bulles et jogging à la Jagger le long de la scène, autotune en l’honneur de Barbara, et un moment de démagogie insupportable quand on retarde une chanson parce que quelqu’un se sent mal au milieu des 35.000 spectateurs, confirme que ça peut toujours être pire. Insistons sur le fait qu’une partie du public semblait ravie. Mais il est clair que, pendant 1h15 qui nous ont paru très longues, on n’avait pas le sentiment d’être à Rock en Seine, surtout avant une artiste du niveau de Lana del Rey.

21h45 : la scène est prête, décorée de plantes vertes et de (fausses) colonnes en ruines. La question qu’on se pose maintenant, c’est combien de retard aura la diva ce soir, 15 minutes, 45 ? 2 heures ? Le pire est toujours possible mais les fans sont patients. Et résignés.

2024 08 21 Lana Del Rey Rock en Seine J1 (1)22h10 : Vingt-cinq minutes seulement… Estimons-nous heureux (on apprendra ensuite que Lana était en train de s’échauffer et chantait pour France Inter. Bon). Après une assez longue vidéo d’introduction, Lana Del Rey est enfin là, à quelques mètres (ou dizaines, ou centaines, selon la chance de chacun) de nous. Et elle est impressionnante, dégageant un glamour cinématographique « classique », avec une coiffure qui évoquera Brigitte Bardot. Et un visage « bergmanien ». Bref, autour de nous, on hurle, on pleure : « Elle est si belle ! ». Et quand Lana attaque Body Electric – une chanson qu’on n’a pas entendue depuis longtemps – on se rend compte qu’il va être difficile, très difficile d’entendre la voix de Lana, étant donné que des milliers de fans « in love » chantent avec elle sans discontinuer. Et connaissent TOUTES les paroles de TOUTES les chansons PAR CŒUR (et il y en a, des chansons !). On remarque quand même que la version de Body Electric offerte ce soir est… écourtée. Et ce sera le cas de quasiment tous les titres. Il est vrai que les chansons de Lana sont toujours longues, mais il est dommage de partir du principe que le public n’aura pas la patience de les écouter (et de les chanter !) en entier : à Paris, étant donné la ferveur – presque fanatique – de la foule, ça n’aurait certainement pas été le cas !

Parlons tout de suite de l’énorme scénographie qui entoure Lana : des danseuses, des chorégraphies, une balancelle, une table (de maquillage ?), des chaises, et même une Harley Davidson (qui ne servira pas…). Chaque chanson est l’occasion d’une mise en scène, qui s’avère – à notre goût – envahissante, lourdaude. C’est le genre de show qu’on attend à Las Vegas, et, vu la qualité du répertoire de la dame, c’est largement superfétatoire. Bon, on image aussi que Lana, qui n’a jamais été une bête de scène, et qui semble souvent mal à l’aise en public, a besoin de ce professionnalisme autour d’elle pour être bien…

De notre point de vue, la première partie du set d’une heure et demie est relativement « froide » : tout le mode hurle et chante, tout le monde est content d’être là, Lana nous offre quelques belles douceurs (Summertime Sadness, Born To Die…), mais on peut difficilement parler de « magie ». C’est après un petit interlude musical que le set bascule enfin : un choix de chansons plus douces, plus lentes, plus émotionnellement fortes, et on atteint enfin le plaisir espéré : Bartender (sublime, tout simplement, notre coup de cœur de la soirée), Chemtrails Over the Country Club, … Tunnel under Ocean Blvd, etc., que des titres de très haut niveau, extraits des albums les plus récents de Lana, clairement les meilleurs. Après ça, même Video Games, incontournable, a un côté un peu plus convenu.

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Curieusement, avant le rappel, Lana nous balance son hologramme (!) qui nous chante la magnifique Hope is a Dangerous Thing…, accompagné par le pianiste du groupe, qui, lui, joue en live. Ça fait froid dans le dos si ça annonce ce que sera la musique « live » bientôt…

Rappel très court, avec A&W et Young and Beautiful, et une conclusion curieusement « foxtrot », pour une soirée qui a confirmé le statut littéralement intouchable de Lana Del Rey en France. Et que, désormais, même si elle n’est pas et ne sera jamais une grande performer, elle peut offrir de très beaux concerts. Après, subsiste la frustration née de la certitude que les mêmes chansons chantées de la même manière dans une salle de taille humaine, ce serait quand même cent fois mieux…

Texte : Eric Debarnot
Photos : Eric Debarnot (Lana del Rey) / Robert Gil (Autres artistes)

9 thoughts on “[Live Report] Rock en Seine – Jour 1 : Lana Del Rey sur le toit de Paris !

  1. Bonjour, j’ai aussi assisté à ce concert et désire apporter plusieurs commentaires mais je vais le faire en plusieurs courriels différents.
    Towa Bird : je suis quand même très surpris que vous n’ayiez pas mentionné la très bonne interprétation de la reprise de Blur « Song 2 » (1997). D’autant plus que c’est un morceau entrainant et connu du public ! D’autre part seule la basse et peut-être un peu de clavier (mais pas certain) étaient enregistrés ce qui n’en font pas « une bonne partie » de l’instrumentation.
    La suite de mon avis sur le reste de la programmation au prochain mail…

    1. Bon dieu, j’ai honte, je n’ai pas reconnu le titre de Blur, c’est pour ça que je ne l’ai pas mentionné. Merci 1000 fois ! Je vais d’ailleurs ajouter ce point dans le live report, car il est important !

  2. Le concert de Pomme ne m’a pas intéressé du tout et j’ai trouvé sa durée beaucoup trop longue. Ce qui me semble normal quand on aime pas !
    Cependant je suis en désaccord avec vous sur deux points : premièrement elle n’est pas « une mauvaise imitation de Barbara » car sa musique n’a rien à voir avec celle de la dame en noir ! Elle lui a juste rendu un hommage musicalement que je n’ai pas aimé mais ce n’était pas une copie. Deuxièmement je ne partage pas non plus votre avis d’écrire que c’est « un moment de démagogie insupportable » quand elle s’est inquiétée à deux reprises de problémes dans l’auditoire probablement de malaises. Au contraire cela est de la bienséance et de l’empathie dont ce monde si cruel aurait bien souvent besoin en de nombreuses circonstances. Que n’aurait-on pas dit si elle ne l’avait pas fait ? De plus j’ajoute que Lana Del Rey a procédé de la même façon pour deux cas similaires et que ne lui avez pas reproché. Alors deux poids deux mesures pour une même situation suivant que vous aimez ou pas un artiste musicalement ? Bizarre cette façon de penser ! j’ajoute que des messages sur de possibles problèmes dans la foule ont été affichés sur les écrans et je ne vois pas pourquoi en retour les artistes et le groupes ne pourraient pas agir de la même façon ?

    1. Merci Jean-Pierre ! La référence à Barbara m’a paru immédiatement évident dans la manière dont elle chante, et non pas en effet dans la musique.
      En ce qui concerne l’attention au public, il y a une énorme différence entre ec qu’a fait Lana (interrompre sa chanson en attendant que la situation soit prise en charge) et ce qu’a fait et surtout dit Pomme, qui était en gros (je ne saurais pas citer ces mots exacts) : « oh, je me sens mal quand je suis témoin de ce genre de choses » en feignant de s’évanouir à moitié. ça, c’est vraiment un genre d’attitude que je qualifie de démagogique faute de mieux, qui caractérise une artiste sans éthique ni morale.

      1. Désolé mais votre faible et inexacte argumentation ne me convainc pas du tout ! Pour moi les deux façons de faire des deux chanteuses étaient semblables pour un même type de situation… Je pense que ce qu’il faut retenir c’est la finalité et rien d’autre. Je vous trouve quand même bien sévère voire méchant avec Pomme qui tout aussi criticable sur sa musique (quoique j’ai déjà vu et entendu bien pire en concert, des noms, des noms !) ne mérite pas du tout votre jugement toujours sur cette même action. Mais bon chacun son opinion bien sûr…

  3. Bonjour, contrairement à ce que vous avez écrit « la première partie du set d’une heure et demie » n’était pas la première partie mais l’entièreté du concert et plus exactement une heure vingt cinq avec rappel. D’autre part je trouve qu’avec un retard conséquent elle n’a pas eu un mot d’excuse ou d’explication, cela relève d’une indélicatesse certaine et ce n’est pas parce toute diva qu’elle est on ne doit pas lui opposer. Quant à la musique je me suis assez souvent ennuyé. La faute à une carence de bons morceaux et sachant que certains bons n’ont pas été joués. Alors je sais bien qu’avec neuf disques à son actif il est difficile de satisfaire tout le monde mais quand même. Sinon je reconnais que ce fut un beau/bon concert style Las Vegas comme vous dites. Pour finir je suis d’accord avec vous pour penser que rien ne remplacera les salles fermées à dimension humaine comme j’ai eu l’occasion d’entendre cette chanteuse à l’Olympia il y a plus dix ans en avril 2013.

    1. Merci pour ces précisions. Après, Lana Del Rey est une artiste qui ne fait pas l’unanimité et il est assez courant que ses détracteurs trouvent sa musique ennuyeuse.

  4. une question : la dernière fois qu’elle a joué à RES , j’ai été choqué par l’appel massive aux bandes et surtout au play-back de sa voix. etais-ce encore le cas ?

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