Ride – Interplay : les survivants de l’Oxfordshire

L’été, période propice aux rattrapages, et en particulier des albums à côté desquels nous étions passés. Aujourd’hui, Interplay de Ride, les pionniers du Shoegaze qui explorent de nouveaux territoires depuis leur reformation.

Ride Photo Cal McIntyre
Photo : Cal McIntyre

On compte, assez bizarrement, peu de groupes nés en Oxfordshire et un tant soit peu connus en dehors des limites du comté mais presque tous ont été des précurseurs pour l’indie rock britannique. On peut citer le post-punk-psychédélico – beatlesien (oui je sais cela ait beaucoup pour si peu de lettres) de XTC à la fin des années 70, l’expérimentalisme presque autiste de Radiohead ou la pop acidulo-déjantée de Supergrass à partir des nineties. Aucun n’a survécu au temps qui passe, à la pression du système « perfidalbionesque » (en restant poli) de l’industrie musicale ou aux ego de leurs membres, sauf un, qui, malgré quelques péripéties et un break de près de vingt ans, fait preuve d’une seconde jeunesse réjouissante : RIDE.

InterplayLes jeunes shoegazers, auteurs des sublimissimes Nowhere (1990) et Going Blank Again (1992) annonciateurs de la déferlante britpop, reformés en 2014, sont revenus au printemps 2024 avec un septième album sobrement intitulé Interplay. Ils y jouent sur les paradoxes, le changement dans la continuité et les hommages, plus ou moins appuyés et assumés, à l’électro – rock des années 80, que l’on redécouvre à mon sens dans ce qu’il avait de meilleur, ce qui était loin d’être acquis à première vue quand on connaît cette « sentence » prononcée par Andy Bell en 1990 : « Les années 80 ont été un sale moment pour la musique, il ne s’est rien passé à l’exception de ces quelques groupes, The Smiths, Echo and The Bunnymen, The Jesus and Mary Chain. »

Interplay s’ouvre avec Peace signs, clin d’œil à l’album précédent, This Is Not a Safe Place. On se délecte du phrasé hypnotique de la guitare d’Andy Bell, comme aux plus beaux jours shoegaziens du groupe (Chelsea girl ?) mais accompagné, certains diront noyé, par des sons synthétiques affirmant une modernité certaine. Une Bell(e) illustration à mon goût d’une volonté de renouveler en s’inspirant aussi des sessions clubesques qu’il a assurées en 2023. Une bonne impression que l’on retrouve aussi sur les titres Stay free, Sunrise Chaser et Midnight Rider.

D’évidence, tout dans Last Frontier, pop song vibrante et envoutante, fait penser à New Order et Joy Division : Andy a fait remarquer dans une interview aux Inrocks que Interplay pouvait aussi être vu comme une contraction de deux titres des Mancuniens, Interzone et Shadowplay. Même impression sur Monaco, une chanson bien entendu rafraîchissante. Hommages et desserts…  Light in a Quiet Room, Last Night I Went Somewhere to Dream et Portland Rocks, purs hymnes ridiens à deux voix et aux guitares planantes, soulignent la parfaite mise en avant de la section rythmique. Essaouira flirte avec l’ambient et mêle avec délices rock progressif, rythmique soul et pop clinquante.

En conclusion, Interplay est un album éclectique mais cohérent. Une belle promesse pour des concerts en France prévus début 2025. Courez-y, c’est encore meilleur en live !

Stephan Triquet

Ride – Interplay
Label : Wichita Recordings
Date de parution : 29 mars 2024

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