Colette, la native bourguignonne, a été aussi propriétaire bretonne ! Ce fut pour elle l’occasion de décompresser d’une vie parisienne remuante mais aussi de vivre des amours passionnés… et sulfureux. Une période de sa vie relatée dans ce roman graphique bouillonnant…
Bretagne, 1910. Colette, riche et célèbre, décide d’acheter un manoir à Rozven. C’est ici qu’elle viendra s’y reposer, entre deux spectacles de music-hall à Paris. Elle y séjournera jusqu’en 1926 et vivra là-bas une partie de ses amours tumultueuses, d’abord avec son mari Henry de Jouvenel, puis le fils de ce dernier, Bertrand, ce qui lui inspirera son roman Le Blé en herbe.
Colette, un ouragan sur la Bretagne est un biopic assez classique dans la forme. Si le style narratif, fluide et dynamique, correspond assez bien au personnage vibrant de vie que représentait l’écrivaine française, il pêche un peu par son absence de séquences fortes et de respirations. On reste sur cette impression que toute la vie de Colette, avec ses multiples rebondissements et ses péripéties amoureuses, est diluée dans un magma bouillonnant ou chaque séquence succède à l’autre sur un rythme effréné, sans doute un peu trop vite pour marquer vraiment le lecteur.
Le trait témoigne de la maîtrise de son auteur, Joub, mais son aspect un peu naïf, inspiré de l’école « franco-belge », peut dérouter également, assez éloigné de ce qu’on pourrait attendre d’un ouvrage consacré à une autrice de renom. Là encore, d’aucuns pourront arguer, et cela s’entend, qu’il colle bien à l’image virevoltante d’une femme toujours en mouvement, véritable « ouragan ». Quant aux côtés les plus controversés de Colette – qui assumait totalement sa vie libertine propre à choquer le bourgeois —, ils semblent ici presque édulcorés sous le caractère gentillet du dessin.
Quoiqu’on en pense, il serait difficile d’imaginer cet ouvrage s’imposer parmi les meilleures BDs de l’année. Ce n’est pas tant qu’il soit mauvais, et il se laisse lire, c’est juste qu’il reste globalement assez moyen, dépourvu d’éléments de nature à le faire sortir du lot. Par ailleurs, on pourra aussi regretter le fait que le récit ne démarre qu’en 1910, alors que Colette cherche une maison en Bretagne, une région qu’elle adorait. A cette époque, la romancière approche de la quarantaine, avec déjà une petite carrière derrière elle (avec notamment sa série des Claudine). Hors des contraintes de format, on a donc un peu de mal à comprendre pour quelle raison ce pan de sa vie a été ignoré par Jean-Claude Cornette, qui s’est centré sur la période « bretonne » en terminant par Monte Carlo en 1925. De même, on aurait aimé voir évoquer son enfance à Saint-Sauveur-en-Puisaye, en Bourgogne, et sa relation très spéciale qu’elle avait avec sa mère, Sido, féministe et athée convaincue.
Laurent Proudhon