[Live Report] Meatbodies à la Station – Gare des Mines : la cérémonie d’ouverture de la saison des concerts

Après leur prestation très remarquée à la Route du Rock, Meatbodies étaient hier soir à Paris, et ont offert à un public trop clairsemé un set puissant, virtuose et mélodique.

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Meatbodies à la Station Gare des Mines – Photo : Robert Gil

Il semblerait que Meatbodies, groupe phare de la scène garage californienne, aime à visiter Paris à des dates difficiles : après leur passage en juillet 2023 dans une capitale déjà désertée, les revoilà alors que les Parisiens se focalisent sur la cérémonie d’ouverture des Jeux Paralympiques, que la circulation est difficile, et que les derniers vacanciers ne sont pas rentrés. Bon, on sait très bien que ces dates sont logiques étant donné la participation du groupe à divers festivals européens durant l’été, mais il est difficile de ne pas regretter que des gens responsables d’un album aussi considérable que leur dernier opus, Flora Ocean Tiger Bloom, ne remplissent pas une salle comme celle la Station…

2024 08 28 STTO Station Gare des Mines RG (2)A 19h55, le groupe parisien S.T.T.O. débute son set devant quelques dizaines de personnes, ce qui est loin d’être idéal. S.T.T.O. ne sont pas encore très connus sur la place, mais ils ont publié un premier album, Keep Smiling We’re Drowning, en mars dernier, qu’ils viennent défendre ce soir dans cette salle que, a priori, ils connaissent bien. Si les membres de S.T.T.O. ne sont pas des perdreaux de l’année, ils dégagent immédiatement une énergie de bon augure, boostée – comme souvent lorsqu’il s’agit de groupes « du cru » – par la présence dans le public d’amis. S.T.T.O. jouent un rock’n’roll assez « classique » (dans le bon sens du terme), mais irrigué d’influences contemporaines, sans pour autant sonner comme des copies de gens célèbres. On apprécie la section rythmique solide, et le guitariste soliste qui nous offrira tout au long des 40 minutes de set de très beaux sons. On est plus réticent quant aux vocaux, pas le point fort de S.T.T.O., et quant à certaines compositions qui manquent de singularité. De manière paradoxale, leurs fans leur réclameront depuis le début The One I Love, une chanson qui ne nous convaincra guère, alors que le punky Gimme Some Chips, et surtout le dernier titre, Express Train, avec son final bien bruyant, nous ont semblé de meilleures expressions de leur talent.

21h05 : Nous qui n’étions pas à la Route du Rock, nous sommes surpris de voir Meatbodies débouler ce soir en format « power trio » : renseignement pris, il semble que tout n’aille pas pour le mieux avec Casey Hanson. Si ce resserrement de la musique lui confère une compacité, et peut-être même une puissance accrue, on se désole d’être désormais privés des formidables « duels de guitare » que se livraient Chad Ubovich et Casey, et, du même coup, de la joie et de l’enthousiasme qui en découlaient.

2024 08 28 Meatbodies Station Gare des Mines RG (2)Par contre, impossible de ne pas être ravis par le son, énorme mais excellent, par la virtuosité technique des musiciens, et par la richesse de la musique, qui semble au fil des titres, voire même à l’intérieur des morceaux les plus longs, se promener à travers différents genres musicaux : punk rock, garage, psyché, heavy metal, sans oublier de belles mélodies sucrées « à la californienne »… il y en a pour tous les goûts !

Les cheveux de Chad ont beaucoup poussé ces derniers temps, et avec son T-Shirt « Metallica« , il a désormais plutôt un look de « métalleux standard », ce qu’il n’est évidemment pas, et observer de près son jeu de guitare brillant est un ravissement toujours renouvelé. Dans la salle, qui est quand même à demi remplie, le moshpit se fait brutal et véhément : lorsque Chad, dans un de ses rares mots adressés au public, veut nous raconter qu’ils ont passé les derniers jours à Bordeaux, quelqu’un lui crie « Fuck Bordeaux ! », ce qui n’est ni malin, ni encourageant pour Chad qui s’enfermera ensuite dans son mutisme.

Meatbodies jouent leur heure habituelle de concert sans setlist, ce qui témoigne de la cohésion du trio, mais qui fait qu’on peut peiner à reconnaître immédiatement les titres, le set n’étant pas focalisé sur Flora Ocean Tiger Bloom : on se souviendra néanmoins des belles versions offertes de The Assignment, et surtout du riche et complexe They Came Down. Il reste que, au final, malgré le plaisir musical offert dans une salle où la chaleur était, qui plus est, élevée, ce concert a manqué un tantinet de passion. Ou, peut-être, « d’incarnation », comme s’il s’était agi ce soir de jouer le mieux possible une musique de très haute qualité, sans pour autant y mettre toute son âme.

Pas de quoi se fâcher toutefois avec Meatbodies, sans doute fatigués à la fin de leur tournée, juste de quoi espérer qu’ils reviendront vite nous rendre visite, dans de meilleures circonstances. En tous cas, c’était un beau démarrage pour la nouvelle saison de concerts !

Texte : Eric Debarnot
Photos : Robert Gil