Après sa désopilante série sur les chefs d’État, Mélénas, Jules César et Napoléon, Karibou s’attaque à la fin du monde. L’apocalypse aura lieu demain à 19 heures précises. Comment allez-vous réagir ?
Le Président de la République l’a annoncé lors d’un flash spécial. Pour l’occasion – c’est tout de même la fin du monde ! – il s’offre un vieux rêve : apparaître torse nu à la télé avec un tatouage tribal signifiant « sagesse » en maori. Que feront tous les autres ? Et vous, quel est votre rêve le plus fou ?
Le sujet n’est pas original, il a donné lieu à d’innombrables drames ou comédies. Karibou reprend un dispositif similaire à ceux de Troie Zéro et Waterlose : des gags d’une page, des décors simplifiés, des héros récurrents et, surtout, des situations et des dialogues absurdes. Mais, au lieu de s’attacher à un « grand » homme et à son destin, il s’attarde sur un moment tragique.
Alternant de légères bichromies rouge ou bleu, le dessin réaliste de Thierry Chavant est classique. Les rares fantaisies de ses bourgeois parisiens sont capillaires. Quelques pleines pages viennent néanmoins rompent la monotonie du gaufrier.
Alors, comment réagiront nos voisins ? Si on met de côté les rares suicidaires et les quelques partouzeurs, la plupart vont aller travailler ! La police s’apprêtait au pire, mais son intervention s’avère inutile. La panique attendue est évitée, le contrôle social est surpuissant et la futilité de la vie urbaine (semble) absolue. Alors que sa compagne lui propose de rester au lit, un cadre supérieur hésite à mettre une cravate Mickey. Si une institutrice et une mère de famille laissent tomber les anciens filtres et se lâchent, les petits chefs et les grands patrons cherchent une dernière occasion de faire du profit.
C’est fou… mais pas (totalement) impossible. Après tout, notre monde accepte bien la guerre, la prédation et l’épuisement attendue de ses ressources. Les gags sont inégaux, mais les meilleures pages, les plus franchement décalées, sont consacrées à notre président, dont le narcissisme, le cynisme et le détachement font, une dernière fois, mouche.
Stéphane de Boysson