Pourquoi d’intéresser aux livres de Katrine Engberg, encore une autre écrivaine de polars scandinaves parmi tant et tant d’autres ? C’est une excellente question, et son quatrième roman, L’île de Bornholm apporte des réponses convaincantes…
Avez-vous déjà entendu parler de Katrine Engberg, une autrice danoise relativement récente dans le genre encombré des « polars scandinaves » ? Peut-être que le succès de son premier roman, L’enfant étoile, très remarqué (aux USA, il y a même eu des critiques pour la comparer à Jo Nesbø !) a attiré votre attention ? Sinon, le fait que L’île de Bornholm soit déjà le quatrième polar mettant en scène son couple d’enquêteurs, Jeppe Kørner et Anette Werner, vous aura plus que probablement échappé. Et d’ailleurs, vous n’avez probablement pas beaucoup de raisons d’ajouter une nouvelle écrivaine à la déjà interminable liste d’auteurs plus ou moins brillants, mais toujours compétents, de polars scandinaves.
Permettez-nous toutefois de défendre cette Île de Bornholm, qui nous a paru dégager une « petite musique » originale. Au départ, cette histoire de corps tranché en deux (de haut en bas !) découvert dans deux valises séparées à Copenhague semble cocher toutes les cases (convenues, désormais) du genre. Et puis le fait que cette nouvelle enquête permette de reconstituer la paire de héros, alors que Jeppe, accablé par une rupture amoureuse, a quitté la police pour travailler comme bûcheron sur… l’île de Bornholm, qui est justement le lieu de provenance des fameuses valises, est un peu trop pratique pour être vraiment crédible… Mais bon, pourquoi pas ? Après tout le Danemark est un petit pays.
Engberg – qui a déjà derrière elle une jolie carrière d’actrice – est, sans surprise, une professionnelle compétente dans la construction et la conduite d’une enquête « à la scandinave », avec suffisamment de tension, de suspense et de surprises pour nous tenir accrochés jusqu’à la dernière page, et sa révélation touchante. Pas de problème a priori pour lire cette Île de Bornholm bien recroquevillés sous la couette alors que, dehors, la pluie tombe ! Plaisir garanti aux amateurs…
S’il y a, à notre avis, une particularité, une « aspérité » peut-être, qui puisse retenir l’attention chez Engberg, du moins dans ce dernier livre, c’est la vision extrêmement déprimante de la vie et des relations humaines qui imprègne chaque chapitre du livre. Bon, on sait bien que la « glauquitude » est souvent un attribut du polar scandinave, mais ici, il y a des pages qui génèrent un véritable inconfort, grâce à l’empathie vis à vis de personnages pas gâtés par la vie que l’écriture d’Engberg dégage. Bref, derrière le polar efficace, il y a un drame humain poignant, presqu’une tragédie grecque classique, en fait.
Non, finalement, corrigeons ce que nous avons écrit plus haut, ce n’est peut-être pas le meilleur livre à lire en plein automne froid et pluvieux, si l’on a envie de garder le moral au beau fixe. Mais c’est quand même intéressant, non ?
Eric Debarnot