« Starlet » de Sean Baker : Elles rêvaient de Paris

Une semaine avant Anora, la Palme d’or cannoise de Sean Baker, Starlet sort enfin en salles en France. L’occasion de découvrir un récit d’amitié intergénérationnelle tirant son charme de petits imprévus.

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La Palme d’or cannoise d’Anora aura donc facilité la sortie dans les salles françaises de Starlet, un Sean Baker vieux de 12 ans qui avait eu bonne presse à domicile. Le tout distribué par The Jokers (connu entre autres pour avoir parié très tôt et avec grand succès sur une sortie hexagonale de Parasite dans la foulée de Cannes) avec les 3 premiers films du cinéaste : Four Letter Words, Take Out et Prince of Broadway.

Il est donc question de Jane (Dree Hemingway), femme de 21 ans vivant en colocation et propriétaire du Chihuahua dont le nom donne au film son titre. Elle va finir par sympathiser avec Sadie (Besedka Johnson), femme de 85 ans à laquelle elle achète un Thermos. Postulat de départ en apparence plus modeste que celui très social de Take Out et Prince of Broadway. Films respectivement centrés sur un livreur pour un restaurant chinois et un immigré clandestin vivant de la vente de contrefaçon.

La banalité du pitch fonctionne grâce à un ton doux-amer, au naturel du jeu des actrices et au charme du film de voisinage. Avec une digression sur la disparition de Starlet ou ces propos de la veuve qui ne connaît Paris qu’au travers de Fred Astaire et d’Audrey Hepburn.

Spoiler
Avant un twist sans doute étonnant à l’époque, un peu moins pour qui découvre le film après ses récentes œuvres concernant des personnages faisant commerce de leur corps. Jane est actrice porno. Ce qui donnera au film son pire (une scène avec un colocataire vulgaire) et son meilleur (la description du monde du porno). A la lumière de ses derniers films, on peut supposer que la fixation de Baker sur de tels personnages vient du fait qu’il voit en eux l’incarnation de la culture mercantile de son pays natal.

Là où les derniers films du cinéaste ont eu tendance à tirer vers le cynisme au nom de la description d’une logique libérale de survie, le film tient sur le mélange équilibré de malhonnêteté et d’attachement de l’amitié de Jane pour Sadie.

Une duplicité qui aboutira à une fin aussi touchante qu’abrupte. Une fin dont le côté sec vaut mieux que bien des dénouements à rallonge. Dans les qualités du film, on trouve aussi le score atmosphérique du musicien électronique danois Manual, assez proche dans l’esprit de celui de Harold Budd et Robin Guthrie pour Mysterous Skin.

Starlet n’a rien d’un grand coup d’éclat du cinéma indépendant US. Mais il tire son charme des petites déviations de son récit.

Ordell Robbie

Starlet
Film américain de Sean Baker
Avec : Dree Hemingway, Besedka Johnson, James Ransone…
Genre : Drame
Durée : 1h43mn
Date de sortie en salle : 23 octobre 2024

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