Dans ses meilleurs moments, Anora est un film d’auteur à la newyorkaise pas très original mais enlevé. Il est hélas aussi laborieux dans son décollage que poussif dans sa conclusion.
Au cours de son quart de siècle d’activité de cinéaste, Sean Baker s’est souvent intéressé à ceux et celles dont le corps est un outil de travail. Acteurs/actrices pornographiques, prostituées. Et une strip-teaseuse dans cet Anora palmé.
Ani (Mikey Madison) exerce donc son métier à Brighton Beach, zone russophone de New York. Elle va se rapprocher d’un de ses clients : Vanya (Mark Eydelshteyn), fils d’un oligarque russe. Ils se marient. Apprenant la nouvelle, les parents de Vanya décident de se rendre aux Etats-Unis pour faire annuler le mariage.
Anora est laborieux dans sa mise en place. Ou plutôt passe trop de temps à poser un enjeu assez vite évident : le conte de fées non dénué de cynisme d’Ani. Le couple formé est ainsi autant lié du côté d’Ani à une attraction qu’au désir de survie. Pour elle c’est un coup de poker permettant de passer de la précarité à l’opulence.
Le film ne s’améliorera qu’au moment de l’arrivée des hommes de main des parents de Vanya. Il devient alors une bonne récitation de certains basiques du cinéma indépendant et du cinéma newyorkais. Le très drôle amateurisme des truands donne l’impression qu’ils sortent d’un fim des frères Coen. Le film arpente des coins de Brooklyn déjà vus chez James Gray en mode comédie d’errance new-yorkaise (coucou After Hours !). Le tout photographié dans l’esprit des Scorsese newyorkais seventies, filmé en caméra à l’épaule et monté avec efficacité. L’énergie et l’abattage de Mikey Madison (la série Better Things, Once Upon a Time… in Hollywood) sont la vraie révélation du film.
Hélas, le récit retrouve quelque chose de poussif au fur et à mesure qu’il s’approche de la conclusion.
Bien sûr, il s’agit d’un film avec environ une heure et demie divertissante. Le problème est que lorsqu’il fonctionne le film n’est ni du grand cinéma ni artistiquement singulier. Ce qui l’empêche (de peu) d’accéder au statut de comédie indépendante correcte
Ordell Robbie.