En concluant habilement avec ce Retour de flamme l’histoire du cycle Antipodes+, Sfar et Trondheim, aidés par le dessin à la fois élégant et efficace de Vince, rattrapent l’impression mitigée laissée jusque là par cette branche improbable de leur Donjon.
Comme cela faisait un an, presque jour pour jour, que le tome 10.002 de la branche Antipode+ du Donjon avait été publié, on avait un peu oublié combien il nous avait déçu, voire irrité : entre l’accumulation de références de la culture « pop », les circonvolutions d’un récit qui manquait de punch, et nos difficultés à relier ces aventures baroques (entre Indiana Jones et Blacksad, Sfar et Trondheim ratissaient large) au cœur héroïque de leur saga de Fantasy tragi-comique, on avait le sentiment que rien ne fonctionnait vraiment.
La première bonne nouvelle de ce Retour de flamme, c’est que c’est un… « retour de flamme » ! En tous cas de celle que nous ressentons depuis des décennies pour les délirantes aberrations du couple Sfar–Trondheim. La seconde, c’est que ce nouveau volume conclut l’histoire entamée avec Rubéus Khan, et de manière plutôt satisfaisante : sans hésiter à faire disparaître / régler leur compte à une partie de ses personnages, bons comme mauvais. Et avec une dernière page, magnifique, aussi bien graphiquement qu’émotionnellement, une dernière page « surprise » qui relie Antipode+ à Potron-minet (improbable ? Oui, mais bien joué) et qui pourrait amorcer une second récit.
La troisième bonne nouvelle, la plus importante, c’est que la narration, avec trois fils se déroulant en parallèle (les explorations de Rubéus Khan dans le « centre de la terre », la nouvelle vie de Mimi, proxénète, dealeuse et patronne d’une clinique pour prostituées et drogués, et les recherches de Tommy dans la bibliothèque de l’université) est très efficace. Et que les nombreuses scènes de violence ou de baston contre des armées de mercenaires et de tueurs sans foi ni loi recrutés par Tonton Stanislas, sont dessinées et mises en scène par Vince de manière tout à fait réjouissante.
Mais ce qui, incontestablement, réjouira les aficionados du Donjon, c’est le nombre de connexions qui sont établies, ou confirmées, avec la série principale, comme le coffre aux âmes, ou comme les automates et les flammes de vie : ce lien consolidé d’Antipodes+ avec le Donjon nous donnerait presque envie de voie paraître un tome +10.004 et un nouveau cycle narratif !
Eric Debarnot