On sait depuis un bon moment que les jeunes rockers de Dynamite Shakers sont incontournables pour qui conque aime sa musique vivante, tranchante, intense, excitante, intemporelle… et voilà que de plus en plus de gens s’en rendent compte eux aussi. Du coup, la Boule Noire était complète hier soir pour un nouveau triomphe scénique du groupe !
Dynamite Shakers, l’un des groupes français les plus convaincants sur scène depuis longtemps, tout au moins dans le genre du « pur rock’n’roll » sixties, tendance garage punk / power pop, etc., ont au fil de ces deux dernières années débuté une ascension irrésistible vers la reconnaissance publique… Même si pour le moment, ce qui reste de « rock critics » français ne semble pas avoir pris acte de leur existence (pas assez à la mode, sans doute, le vrai Rock !?). Et ce concert à la Boule Noire, en attendant une Maroquinerie l’année prochaine, est un marqueur fort de ce début de célébrité acquise de haute lutte sur les scènes de France. Ce d’autant plus que la petite salle charmante du Boulevard de Rochechouart affiche complet ce soir. Et que le public sera bel et bien présent en masse, en dépit des conditions météorologiques très défavorables sur la Région Parisienne, qui auraient pu décourager les fans les moins convaincus.
20h00 : On débute la soirée dans le genre « Grunge » avec le trio de Pythies, juste de retour d’une tournée épique sur la Côte Ouest des USA, où les filles auront entre autres pu découvrir la ville mythique de Seattle et rencontrer d’ancien acteurs de l’explosion musicale des années 90. En tout cas, c’est ce que Lise, la blonde bassiste, ne se privera pas de nous raconter, en long et en large, entre les morceaux… au point où l’on pourra trouver ça un peu irritant. Musicalement, on reste dans le même registre, et avec le même vécu, que la dernière où nous les avions vues, au Supersonic : un style musical attrayant référencé années 90, justement, pour qui aime que ça cogne, une poignée d’excellentes chansons (Fuck The Pain Away / Ouroboros / Eclipse, surtout, en conclusion), d’autres plus passe-partout. Alice – la guitariste, qui cassera malheureusement une corde dès le premier morceau, et devra ensuite batailler presque tout le set… – et Anna ont changé de look, depuis la dernière fois, mais le groupe reste dans un féminisme combattif (encore une fois, on invite les filles, nombreuses dans la salle, à occuper le premier rang en lieu et place des spectateurs mâles…) et surtout dans une jolie sincérité. Seul problème finalement ce soir, un set de plus de cinquante minutes qui ne réussit pas à rester passionnant de bout en bout : sur trente-cinq minutes, avec une sélection des titres les puis puissants, ça aurait été plus fort. Et ça aurait accessoirement permis aux Dynamite Shakers d’attaquer plus tôt (du fait du couvre-feu de 22h30, il semblerait qu’il leur ait fallu sacrifier deux titres de leur setlist…).
21h20 : Remplacement complet du matériel, donc pas moyen de démarrer avant. En regardant le quatuor vendéen participer à la préparation du set, on peut être un peu inquiet de voir que chacun des musiciens de Dynamite Shakers semble renfermé sur lui-même, qu’ils échangent peu entre eux. Et quand le concert démarre, alors que le son des instruments est impeccable, le chant d’Elouan est trop en retrait pour que ceux qui sont devant la scène puissent bien l’entendre, la faute à une absence de retours sur scène, limitant les voix à la sono et donc pénalisant les premiers rangs. Dommage…
D’entrée de jeu, comme d’habitude, Dynamite Shakers tapent fort, très fort : en enchaînant Broken Space Spirit, puis I Can’t Wait for You, deux marqueurs clairs de leur style, les Vendéens nous rassurent. Pas de compromis, ça joue fort, vite, sans oublier les mélodies qui vont bien. A la batterie, François, de plus en plus impressionnant au fil des années, lâche des rafales d’une violence saisissante, n’hésitant pas parfois à tenter des fioritures surprenantes. La basse de Lila-Rose semble plus mélodique que jamais, et au fil de la soirée, on va constater combien sa présence s’impose plus clairement aujourd’hui sur scène. Et bien entendu, Calvin est le superbe guitar hero qui ajoute la cerise vénéneuse au sommet du gâteau, avec un look androgyne de plus en plus « New York Dolls », ce qui est indiscutablement une belle référence (même si on peut se demander, au milieu de ce public très jeune, qui connaît les Dolls…).
Après une introduction de titres déjà bien connus, la setlist bascule avec des chansons inédites (pour nous tout au moins), qui vont permettre à Elouan de se réjouir de pouvoir nous proposer ce soir autant de nouvelles compositions… dont certaines chantées en français, ce qui est une évolution intéressante.
Mais surtout, c’est quand Dynamite Shakers nous offrent une paire de morceaux mid-tempo, chantés par Lila-Rose, et enrichis de très belles parties de guitare, que l’on réalise que, oui, ils évoluent, ils mûrissent, et ils deviennent encore plus intéressants. Même si nul ne saurait se plaindre de la terrible efficacité de leur musique en live, il est bon de constater qu’ils en ont sous la pédale, et peuvent élargir leur spectre musical.
Bon, ceci posé, c’est à partir du merveilleux « hit » Ridiculous que Dynamite Shakers vont passer la surmultipliée, et atteindre cette frénésie scénique qui fait leur réputation : lors de la seconde moitié du set, ils seront tout simplement intouchables. Sincèrement, nous ne croyons pas qu’il y ait dans l’hexagone un seul groupe capable de rivaliser avec eux dans le genre de Rock intraitable et élégant qu’ils ont choisi : What’s Going On? et Look How Fast It Goes font sombrer la Boule Noire dans le bonheur et l’hystérie conjugués. En final de set, Blow My Mind et The Bell Behind The Door permettent d’atteindre l’extase promise : les sourires et le plaisir visible de jouer ont réapparu sur scène, les mines sérieuses du début de soirée témoignaient seulement de la concentration des musiciens qui ne voulaient pas louper cette date symboliquement importante dans leur trajectoire. Et ils ne l’ont pas loupée, qu’ils soient rassurés !
Mais ce n’est pas fini, même si les 22h30 sont atteintes : le groupe revient pour nous offrir un rappel, une reprise bien sentie du I Wanna Be Loved de Johnny Thunders – enfin des Hearbreakers, plus exactement. Encore une référence d’une classe folle, qui positionne bien Dynamite Shakers comme les héritiers des rockers les plus « classes », les plus proches aussi de notre cœur.
Allez, on se revoit à la Maroquinerie le 12 mars prochain !
Texte et photos : Eric Debarnot