« Fannie la renoueuse », de Gess : une femme forte, au talent singulier

Tel l’univers d’Hellboy du grand Mike Mignola, avec ce quatrième album en huit ans, Gess enrichit et densifie son très personnel monde parisien des « talents ». Dans un Paris sombre de la fin du XIXe siècle, la Pieuvre mêle intrigues violentes, pouvoirs mystiques et fresque historique.

Fannie la renoueuse - Un récit des Contes de la Pieuvre - Gess
© 2024 Gess / Delcourt

Rappelons le concept. En 1898, la bande d’apaches de la Pieuvre règne sur le milieu parisien. L’apache est une création de la presse destinée à faire peur au bourgeois et à lui vendre du papier. Le journal Le Gaulois le présentait comme : « l’escroc, l’escarpe, le rôdeur de barrière, le faquin à poignard, l’homme qui vit en marge de la société, prêt à toutes les besognes pour ne pas accomplir un labeur régulier, le misérable qui crochète une porte ou éventre un passant. » Notez que l’époque est violente et que le petit peuple n’a, alors, pas oublié les fusillades de la Commune.

Fannie la renoueuse - Un récit des Contes de la Pieuvre - GessSi le Paris de Gess s’inspire du Fantomas de Pierre Souvestre et Marcel Allain et de l’Arsène Lupin de Maurice Leblanc, il y intègre des « talents ». Stan Lee qualifierait ces derniers de mutants.

Ainsi, la jeune Fanny communique avec les esprits. L’Oeil, l’un des tout-puissants chefs de la Pieuvre, la fait enlever afin de prendre soin de sa fille Primera. Le très foisonnant scénario de Gess peut s’apprécier sans avoir lu les précédents opus. Il associe des personnages entrevus dans le second tome, dont la Bête, l’homme qui résiste aux balles, et l’immortel Pluton, à de nouveaux « talents ». Son imagination parait sans limites.

Bien que simple, le dessin est original et ne laissera pas indifférent. La reconstitution historique est précise. Gess multiplie les personnages, les cadrages et les séquences oniriques, tout en jouant habilement avec les couleurs.

Le monde décrit est violent. La police est lointaine et les politiques corrompus. Rien de neuf, me direz-vous. Convoités par les bandes rivales de truands, les fameux « talents » sont rudoyés et souvent tués. Tel l’argent, le « talent » ne fait manifestement pas le bonheur. Si les patrons de la Pieuvre sont froids et sans pitié, les « talents » peuvent néanmoins s’amender ou, tout du moins, essayer. À Suivre…

Stéphane de Boysson

Fannie la renoueuse – Un récit des Contes de la Pieuvre
Scénario et dessin : Gess
Éditeur Delcourt
208 pages – 27,95 €
Parution : 11 septembre 2024

Fannie la renoueuse – Un récit des Contes de la Pieuvre — Extrait :

Fannie la renoueuse - Un récit des Contes de la Pieuvre - Gess
© 2024 Gess / Delcourt