[Live Report] October Drift et Sex Shop Mushrooms au Point Ephémère : un groupe redoutable sur scène !

Pour le dernier concert de 2024 pour beaucoup d’entre nous, fans parisiens de musique Rock, les Anglais d’October Drift n’ont pas failli à leur impeccable réputation de grosse machine live. Il y en a même eu pour dire que ce set entrerait dans le top des plus beaux moments de l’année !

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October Drift au Point Ephémère – Photo : Eric Debarnot

Le rock’n’roll est un mystère. La musique en général est un écheveau, tressé serré, de mystères, en fait. Ce soir, notre sujet de réflexion sera : pourquoi certains artistes ou groupes, pas très convaincants sur albums, sont-ils aussi magiques, aussi impérieux sur scène ? (Alors qu’à l’inverse, il ne manque pas de « fakers » incapables de nous passionner en live, alors qu’ils ont de bonnes chansons…). Dernier exemple en date, October Drift, le quatuor indie rock de Taunton, qui a des difficultés à convaincre avec ses albums pourtant remplis d’hymnes rock engageantes, voire franchement commerciales : ils ont gagné depuis leurs débuts il y a moins de dix ans une réputation flamboyante « d’acte live » incontournable. Du coup, pour nous, il ne faisait aucun doute qu’entre Sprints au Trabendo (un groupe qui, à l’inverse, a sorti l’un des grands disques de 2024, mais peine à reproduire la même magie sur scène…) et October Drift au Point Ephémère, le choix était facile. Il est néanmoins indiscutable que, les deux groupes s’adressant au même public, October Drift ont souffert de la concurrence, et le Point Ephémère n’était pas rempli, malheureusement, comme ils l’auraient mérité.

2024 12 16 Sex Shop Mushrooms Point Ephémère (2)20h25 : Les Parisiens de Sex Shop Mushrooms – un nom de groupe amusant – se lancent dans un set de 35 minutes qui n’aurait pas dépareillé en 1993 à Seattle. Vous l’avez compris, les racines musicales du groupe sont fermement plantées dans le terreau fertile du grunge : les riffs sont acérés, comme on dit, le chanteur hurle comme Cobain, et la section rythmique est d’une puissance rare, avec en particulier une remarquable batteuse qui, mine de rien, semble s’amuser comme une folle derrière ses fûts. Ce qui est appréciable dans leur style musical, c’est le recours systématique à des ruptures de tons, à des rythmes qui s’entrechoquent, avec une audace séduisante. Ce qui l’est moins, c’est que les morceaux ne sont pas particulièrement accrocheurs, au-delà de la violence impressionnante avec laquelle ils sont interprétés. Bref, un set énergique qui était une introduction impeccable à October Drift

2024 12 16 October Drift Point Ephémère (13)21h30 : Ce qui est amusant avec le look scénique d’October Drift, c’est que trois des musiciens (le guitariste, le bassiste et le batteur) sont habillés en noir, tandis que Kiran Roy, le chanteur, est vêtu tout de blanc, joue sur une guitare blanche et chante dans un micro blanc. Et ce qui est encore plus amusant pour nous, Français, c’est que – surtout depuis qu’il s’est coupé les cheveux – Kiran est le portrait craché de Mathieu Amalric (jeune…) ! Enfin, si l’on peut imaginer un Amalric qui s’agite en permanence comme un pois sauteur mexicain, et qui monte dans les cintres de toutes les salles où joue le groupe : cette fois, c’est sur Blame The Young qu’il réitérera sa performance (attendue) avant de se laisser tomber sur les bras levés de ses fans, en dépit du manque de densité du public. Un vrai casse-cou.

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Mais on parle de Kiran, sur lequel tous les yeux sont fixés, mais ce qui secoue avec October Drift, c’est que le bassiste et le guitariste n’arrêteront pas non plus de sauter dans tous les sens, pendant les soixante-quinze minutes du set : pour être impressionnant, c’est impressionnant ! On se demande même si on a jamais vu un groupe aussi dynamique sur scène. Evidemment, le son, énorme, est à la mesure de ce déversement insensé d’énergie : on est littéralement laminés par la musique, qui, pourtant, garde en permanence sa coloration positive, joyeuse presque. Et on sait bien que c’est cette tendance à l’emphase spectaculaire et au « feel good » tous azimuts que les détracteurs du groupe déplorent : c’est peut-être vrai sur disque, mais sur scène, quel plaisir ! De l’intro qui tue en alignant Demons et Tyrannosaurus Wreck, jusqu’à la fin du set principal sur Not Running Anymore, aucune baisse de tension, puisque même les titres un peu plus lents ont une tendance au crescendo irrésistible (Oh The Silence, magnifique !) : c’est néanmoins le prodigieux Insects, qui rappelle pas mal les Pixies, qui constituera le sommet pour nous d’un concert qui se sera maintenu à des hauteurs vertigineuses.

2024 12 16 October Drift Point Ephémère (9)Dans la salle, un moshpit, organisé par des fans anglais qui ont fait le voyage pour nous apporter leur renfort, laisse déferler une joie de vivre enchanteresse : même si ça secoue beaucoup, on ne voit autour de nous que des sourires radieux, on n’entend que des cris de joie. Bref, une expérience pas si courante que ça quand on parle de concerts de musique « extrême » dans ce style.

Et à la fin, en guise de rappel, puisque, même si l’heure du couvre-feu est dépassée, personne n’a envie de se quitter, Kiran et Chris, le batteur, descendent une nouvelle fois au milieu du public, pour une superbe version acoustique et a capella de Like The Snow We Fall : un dernier moment de communion générale entre amoureux de la musique, qui clôt donc parfaitement l’année 2024…

La leçon de cette soirée, c’est que la « dérive d’octobre » s’est apparentée plutôt à un ouragan : on a entendu certains de nos amis affirmer que ce concert avait rechargé leurs batteries, pas loin d’être à plat après bien des sets un peu mornes. Et qu’il figurerait sans doute très haut dans leur liste des grandes expériences live de 2024 !

Texte et photos : Eric Debarnot