Décevant retour au Brésil pour Karim Aïnouz qui nous livre avec son Motel Destino un film peu excitant, entre scénario faiblards, mauvais dialogues et mise en scène en toc.
Retour au pays pour Karim Aïnouz après la parenthèse européenne du Jeu de la reine, et plus précisément dans le Ceará, état du Nordeste brésilien, là où il avait déjà tourné une partie de Praia do futuro. Sur une trame narrative qui évoquera Le facteur sonne toujours deux fois et La fièvre au corps, soit un voyou en fuite pourchassé par la pègre locale, un mari jaloux et autoritaire et sa femme qui rêve d’une vie meilleure (et tous les deux tenanciers d’un love hotel), Motel Destino entend (re)jouer la valse des libidos et des frustrations sous le soleil brûlant de l’équateur, « là où aucune ombre se pose ». Prenant place dans un hôtel bariolé et paumé, en vérité un lupanar poisseux un rien miteux, Motel Destino voit se cogner sans cesse ses personnages cherchant à assouvir leur passion et à échapper à un destin tout tracé.
Il y avait de quoi saliver avec un tel pitch et une telle configuration des corps, en surchauffe permanente et aux peaux trempées de sueur. Pourtant, absolument rien ne va fonctionner pendant presque deux heures, et on se demande bien comment Aïnouz a pu passer à côté de son film quand il avait, entre les mains, un récit prometteur mêlant pulsions sexuelles et meurtrières et des acteurs muito quentes. Comme s’il n’avait su quoi en faire. Ou peut-être parce que les dialogues sont terriblement mauvais, jamais à la hauteur des enjeux et des tensions annoncés qui, très vite, vont se dégonfler comme une baudruche. Résultat : ça bande mou, au Motel Destino.
L’intrigue patine et peine à rendre intéressante, et surtout palpable, la dynamique des désirs, exprimés ou refoulés, censée se déchaîner entre le fougueux Heraldo, Dayana et son mari Elias. D’autant que ces trois-là, dans leur écriture, manquent d’épaisseur psychologique, n’étant finalement que des figures trop stéréotypées dans une histoire elle-même trop balisée. Aïnouz, comme conscient des lacunes du scénario de Wislan Esmeraldo, meuble comme il peut en proposant une mise en scène qui fait toc, bardée d’éclairages aux néons (certes très cinégéniques) et de riffs de guitare électrique répétitifs, et préférant presque tout miser sur le physique de ses acteurs plutôt que de leur demander de bien jouer. Parce que bon, Iago Xavier a peut-être une belle gueule, ça ne l’empêche pas de jouer comme un pied.
Ça bande vraiment mou, au Motel Destino…
Michael Pigé