Si la comédie musicale rebute toujours une grande partie des cinéphiles, il reste suffisamment d’adeptes, espérons-le, pour bien accueillir ce Joli joli qui enchantera les fêtes de fin d’année.
On l’a vu ces derniers temps, la comédie musicale est peu assumée dans la promotion des films : les producteurs craignent de les voir cantonnés à une niche, et prennent toujours soin de montrer que des projets comme Emilia Perez, par exemple, ne sont pas réductibles à ce seul genre, dont l’appellation pourrait refroidir une partie du grand public.
Aucun risque pareil avec Joli Joli, qui revendique très clairement son appartenance, et sait à qui il s’adresse. Aller voir ce film, c’est en accepter les règles singulières : des intérieurs de studio (assumés au point qu’une défenestration se limite à un enjambement depuis le rez-de chaussée, une piscine fait 10 cm de profondeur…), un voyage dans le temps (1977, et des blagues un peu balourdes sur l’absence de téléphone portable), des chansons constantes, des situations archétypales et une ambiance d’opérette où la facticité est reine.
Les amateurs retrouveront avec plaisir l’écriture d’Alex Beaupain pour les chansons, qui renouent avec la mélodie et les textes des Chansons d’Amour de Christophe Honoré, son goût pour la diversité d’orientations sexuelles, à même d’épicer les traditionnels triangles amoureux. Le film n’est pas exempt de défauts, notamment dans les scènes dialoguées qui peinent à trouver leur rythme et quelques répétitions dans les motifs. Mais il faut prendre le film pour ce qu’il est : une réunion de talents qui s’essaient à élargir leur palette. Clara Luciani, presque timide en actrice, échange de rôle avec des comédiens qui poussent courageusement la chansonnette, le plus souvent avec un indéniable talent parmi lesquels Laura Felpin convainc particulièrement.
L’humour de certains titres (l’éloge de la fiscalité par Thomas VDB, celui de la morphine par une infirmière déjantée) enrichit le spectre des amourettes conventionnelles. Si l’écriture de Beaupain peut virer à la formule du dictionnaire des rimes sur certains titres, elle n’en garde pas moins une belle âpreté sur d’autres, que ce soit dans les conflits amoureux, le coup de foudre où le très beau jeu qui unit les amants désenchantés autour d’une piscine sur un plateau de tournage.
Une petite gourmandise de fin d’année, pour public averti n’ayant pas fait d’excès de sucre avant la séance.
Sergent Pepper